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Cette soirée était définitivement bien étrange. En quelques heures seulement, j’étais passé par la nervosité, l’angoisse, la rage, l’inquiétude et bien d’autres émotions qui s’étaient mêlées en un fouillis chaotique. Mais là, à cet instant, dans ses bras, je n’éprouvais plus que la sérénité et le plaisir charnel qu’elle avait si facilement provoqué. À demi-mots, je lui soufflais combien elle m’avait manqué, et je fus soulagé de l’entendre y répondre de la même façon. Si mes idées tendaient vers une conclusion à laquelle je restais hermétique malgré moi, je tentais malgré tout de l’assimiler en même temps qu’elle prenait mon visage en coupe pour apposer sur mes lèvres un baiser à la douceur inouïe. J’accueillais ses lèvres à nouveau en paix avec moi-même. C’était étonnant, cette facilité avec laquelle elle parvenait à me faire sentir à ma place. J’avais pourtant lutté de longs mois, de longues années avant d’enfin pouvoir respirer de nouveau. Elle rabattait la couverture sur nos épidermes échauffés et frissonnants, et aussitôt, j’enlaçais sa taille en la calant tout contre moi. J’éprouvais la fatigue mais peinais à la ressentir réellement, bien trop conscient de la proximité de Sae Yeon, et pourtant… Apaisé, serine, soulagé, je me laissais bercer par les battements de son cœur et le son si doux de sa respiration. Je restais attentif jusqu’à être certain qu’elle ne soit endormie, puis ce fut à mon tour d’être happé par le sommeil.

Si je pouvais sentir sa peau contre la mienne, si malgré tout j’étais rassuré de l’issue de cette soirée et de la distance dont nous avions souffert, je ne pus repousser les cauchemars de venir entraver la tranquillité de notre première vraie nuit ensemble. Les frissons de douleur et d’angoisse me secouaient de manière régulière et je si je faisais tout ce que je pouvais pour repousser les images, elles s’imposaient finalement à moi en un véritable cauchemar. Mes yeux chutèrent sur le sol non sans prendre le temps de jauger ma tenue. Je poussais la porte de l’appartement gagné par une angoisse soudaine. D’où venait-elle ? J’en secouais la tête en espérant pouvoir m’en débarrasser, mais rien n’y fit. Je ressentais ce poids écrasant sur ma poitrine alors que j’avançais dans la pièce principale et y déposais mon sac. L’ambiance, l’atmosphère semblait différente, mais en quoi ? Qu’est-ce qui avait bien pu changer pour que je n’étouffe après seulement quelques pas dans mon foyer ? Je balayais la pièce du regard mais tout était à sa place… ce ne fut qu’à cet instant que je compris. Je me concentrais sur les sons vers lesquels je me dirigeais… mon cœur s’affolait dans ma cage thoracique, il hurlait presque de faire cesser le supplice que je m’infligeais. Je savais… et pourtant je refusais de rebrousser chemin. Je m’arrêtais devant la porte de la chambre de Minseok pour poser mes doigts tremblants sur la poignée de sa porte. L’hésitation et la raison me poussèrent à faire demi-tour, à ne pas découvrir ce qui se cachait derrière le battant… mais je voulais en avoir le cœur net. La mort dans l’âme, je poussais finalement la porte et découvrait ce que je redoutais : Sae Yeon… dans les bras de Minseok… J’eus la sensation que l’on m’arrachait le cœur tandis que j’étais le témoin de leurs ébats. Un instant, je restais interdit sur le pas de la porte, incapable d’émettre le moindre son ou de bouger. Je croisais finalement ses perles sombres, ce même regard que j’avais pu voir alors que j’étais celui qui lui faisait pousser de tels soupirs. Une fraction de secondes seulement, mais bien suffisamment pour m’anéantir. Il n’y avait plus désormais qu’un trou béant à la place de mon cœur, ils venaient de me l’arracher… tous les deux…

Je me réveillais dans un sursaut brutal. Mes yeux papillonnèrent sur la pièce que je ne reconnaissais pas. Il me fallut quelques minutes pour me souvenir, pour comprendre, et je m’autorisais à couler un regard vers la brune endormie avant de me redresser. Assis dans le lit, j’essuyais les larmes de cette douleur que j’éprouvais comme si elle avait été réelle. Minseok avait su distiller le doute et la peur dans mes veines, et rien que pour ça, je le haïssais. Le myocarde affolé, la respiration hachée, je tentais d’imposer à nouveau le calme en rivant mes yeux à la silhouette endormie de Sae Yeon. Les souvenirs de la soirée me revinrent par fragment, des images qui ne ressemblaient en rien à ce cauchemar… C’était moi… j’étais celui avec qui elle avait passé la nuit… n’est-ce pas ? Comment l’imaginaire pouvait-il être si puissant ? Tremblant, je reprenais place et la tirais vers moi pour que mon corps épouse le sien. Je collais son dos à mon buste tandis que j’essayais de contrôler mes muscles dont les spasmes trahissaient la douleur et la terreur. « Je t’en supplie… ne t’approches pas de Minseok… » soufflais-je. Je profitais de son sommeil pour lui confesser ce qui me déchirait. « Je sais… qu’il ne t’intéresse pas, je sais que tu n’irais pas vers lui mais… crois-moi, s’il a décidé quelque chose, il va jusqu’au bout. S’il veut te mettre dans son lit… j’ai peur qu’il y arrive… et je crois que je n’y survivrais pas… Tout ce qu’il a dit pendant ces vacances… » J’avouais d’un murmure ce qui me hantait depuis que nous avions passé la porte de cette villa, ces supposés congés. « Je ne veux pas te perdre… » lâchais-je finalement. Et pour effacer les images de ce cauchemar, je décidais de parsemé son dos de baiser. De son épaule en passant par ses omoplates, je descendais jusqu’au creux de ses reins. Je rayais sa peau de mon inférieure en y ajoutant quelques caresses sirupeuses.