Non. Il n’est pas calme. Ce n’est pas parce qu’on le dit qu’on est forcément calme. Je ne fais pas exception à cette règle. De façade, je suis calme, mais ça ne veut pas dire que c’est le cas dans ma tête. Bon, la plupart du temps, je suis calme. C’est rare de me voir autrement. Je suis quelqu’un de normalement stoïque. Cela dit, pour Seo jin, c’est différent. Je le connais depuis quelques mois et je peux largement deviner qui il est. Ce n’est pas quelqu’un qui est relaxe, mais énergique, hyperactif et plus encore. Le bouton panique est tout le temps enclenché. Lorsque quelque chose ne va pas, il ne se bat pas, il se bat à la retraite pour aller vaquer à ses autres occupations. En revanche, il a dorénavant un enfant à s’occuper. Une grande responsabilité pour quelqu’un d’irresponsable. J’ai encore de la difficulté à comprendre qu’il puisse avoir un bébé. En même temps, ce n’est pas si compliqué de comprendre ce qui s’est passé. Un coup de vent à ce pissenlit et voilà, cela a germé. Ce n’est pas sorcier, mais il est trop stupide à comprendre que le latex peut éviter bien des catastrophes. Je ne dis pas que la toute-petite soit une erreur, mais elle aurait pu naître dans de meilleures circonstances. Bref, ce n’est pas mon problème. Elle a désormais un père très anxieux qui ne sait pas comment respirer convenablement.

Est-ce que je veux avoir des enfants ? Non. Je suis contraint d’aider Seo jin, mais normalement, je n’en veux pas. Je ne souhaite pas en avoir. C’est dégoûtant, c’est salissant et encore ; trop bruyant. Heureusement, elle a dormi la plupart du temps. De toute façon, lorsqu’elle pleurait, je laissais à ma secrétaire qui s’en occupait. Pour ma part, je devrais nettoyer la totalité de mon bureau et le désinfecter en grandeur. Enlever cette odeur de couche. Changer de corbeille afin d’avoir une corbeille sans de couches souillées à l’intérieur. Les regards m’importent peu. Je m’en balance des chuchotements qui me concernent, je sais que les rumeurs sont grotesques. La plupart du temps, elles sont fausses tout comme maintenant. Ce n’est pas mon enfant. Ce n’est pas ma fille dont je transporte dans la salle de réunion. Je n’ai pas de femme dans ma vie et encore moins qu’elle soit chanceuse. Je n’ai pas procréé pour m’en occuper pendant les heures de travail. Je ne suis pas idiot. Je sais qu’un enfant, c’est énormément de responsabilité. Je possède ses compétences, je peux largement m’en occuper, mais je ne souhaite pas en avoir de mon sang. La possibilité de les voir naître me dégoûte et encore, je ne veux pas être constamment sale. Je ne voudrais pas prendre des douches sans arrêt.

Ainsi, le père chaotique est là pour s’occuper de cette gamine qui est en train de dormir sur mon bras. Cela n’a pas pris énormément de temps afin qu’elle puisse se réveiller et faire ses caprices. Je roule des yeux. Je pourrais les foutre dehors de mon bureau pour être au calme, mais ça serait sans cœur de ma part. Je vais prendre mon mal à patience et les tolérer le plus longtemps possible. Espérons que la journée se déroule rapidement afin d’être chez moi et de respirer un bon coup. Le commentaire de Seo jin ne passe pas inaperçu. De qui elle retient ? Un petit rire m’échappe : « De toi, certainement. » La pomme ne tombe pas bien loin de son arbre. L’enfant n’est pas du tout du voisin. On voit clairement les ressemblances physiques ainsi que le tempérament. Elle ne sera pas un cadeau en vieillissant. « Prépare-toi d’avoir des cheveux blancs tôt. » Finis-je par dire avant de m’installer à mon bureau. Je soupire d’aise avant de me désinfecter les bras et les mains. Je pourrais manger, mais je n’ai pas faim. Je mange les repas dont je prépare. J’ai un lunch. Toutefois, avec la compagnie dans mon bureau, l’appétit m’est coupé. Je mangerai plus tard, ça ne me dérange pas du tout. Cependant, je les regarde attentivement. Je suis devant mon ordinateur, mais ça ne m’empêche pas de les observer. Comment vont-ils faire pour gérer l’heure du déjeuner ? Plus que je le vois faire et je trouve qu’il fait légèrement pitié.

Je me concentre sur mon écran et sur les dossiers dont j’ai à gérer. Je ne me soucie plus de ces deux personnes qui mangent dans mon bureau. Je n’ai pas vu le temps passé que j’entends mon prénom. Je sors de mon dossier afin de lever mes yeux vers... Comment je peux le décrire ? Je pousse un soupirer en voyant l’état de sa fille. Je n’imagine pas l’état des vêtements de Seo jin. « Il manquait quelques trucs dans le sac de ta petite et ma secrétaire en a profité pour lui offrir quelque chose. » Répondais-je à ses questionnements. Je finis par me lever et aller dans une armoire en particulier. Ouvrant pour prendre une chemise et un pantalon propre pour les déposer sur le dossier du canapé, mais je suis armé. D’ailleurs, j’asperge d’eau son visage en lui disant : « Avant d’aller travailler, je te conseille de te changer. Je ne tolère pas la saleté. » C’était plus fort que moi. Toutefois, j’entends les répliques de mon frère dans ma tête, mais je m’en moque. Je ne veux pas de saleté près de moi ! « Et ta fille mérite un bain aussi, prend la salle de bain s’il le faut... » Elle peut largement prendre son bain dans un évier, non ? Ma manie de la propreté a pris le dessus. « Et c’est moi qui conduis à la fin de la journée ! Allez ! Oust ! » J’arrose une énième fois : « Le temps file ! »

Est-ce que c’était le chaos ? Est-ce que tu étais en enfer ? Est-ce que la petite tenait de toi ? Sans doute. Sans doute que tu étais en partie responsable du petit monstre que tu avais engendré. Pourtant, même si tu te retrouvais dans une situation catastrophique, est-ce que tu lui en voulais ? (C’était surtout à ta connerie que tu t’en prenais.) Est-ce que Haena te ferait blanchir les cheveux de par ses bêtises ? Sans doute. Tu les teindrais, peut-être. (Pour qu’elle ne s’en veuille pas un jour.)

Est-ce que le repas se passe bien ? Est-ce qu’il ne s’agit pas d’une parfaite catastrophe ? Tu n’en as presque pas l’impression, même après lui avoir débarbouillé le visage qui s’était retrouvé, sans que tu ne comprennes comment, maculé de compote.
Ta chemise est sans doute bonne à mettre au lavage, ton pantalon aussi - l’intégralité de vos fringues, en réalité. Cependant, tu ne songes qu’à farfouiller dans les affaires de ta fille, pour au moins la changer.
Pourquoi est-ce que tu découvres, dans le sac, des choses qui ne semblent lui appartenir ? Il manquait des trucs. révèle Cheng. Il manquait des choses et sa secrétaire en avait profité pour faire un cadeau à la petiote. « Oh … » souffles-tu, tout perturbé à l’idée. Des cadeaux pour la gamine, tu n’en avais pas tous les quatre matins non plus - bien sûr que Sun et Myung Soo lui en faisaient, de temps en temps, mais autrement … Clairement, un cadeau de Cheng - enfin, sa secrétaire - était le dernier truc que tu avais pu imaginer. « Fallait pas … ? C’est gentil. Merci ! » souffles-tu. Tu souris malgré tout. « Même si … Elle a déjà des tonnes de doudous, hein. » ajoutes-tu, doucement. Et si celui-ci devenait son préféré ? (Est-ce que tu pourrais t’empêcher de penser à Cheng en le voyant ?)

L’homme d’affaires se lève alors, pour aller chercher une tenue dans une de ses armoires. Tu l’observes un instant, intrigué, avant de remarquer, dans sa main, son habituel pschitt qui te fait immédiatement plisser les paupières. Tu n’as pas vraiment le temps de le voir venir, cependant : voilà qu’il t’asperge la figure, en te lançant que tu devais aller te changer avant de retourner travailler. « Eh ! » t’écries-tu, alors que tu te tournes de trois quarts pour protéger ta petite. Est-ce qu’elle méritait un bain ? Sans doute. En tout cas, le mouvement brusque pour la protéger de l’eau - qui avait partiellement échoué - accompagné de ton petit cri, avait suffi pour qu’elle se mettre à pleurer. Ah putain. « J’ai la pe .. » commences-tu déjà à râler, sans avoir le temps de terminer ta phrase. Voilà qu’il t’annonce qu’il conduirait au retour, pour ensuite t’asperger encore un coup. « Mais ! C’est bon, hein, j’ai compris ! » piailles-tu, alors que tu tentes de dorloter ta gamine. « T’étais pas obligé de l’arroser avec .. » ronchonnes-tu, réalisant au passage que tu l’avais tutoyé dans les locaux. Sans doute que tu allais t’en reprendre un coup. C’était de sa faute, aussi. Qu’est-ce qu’il pouvait être con, quand il s’y mettait. Sans doute que ta mauvaise foi parlait. (Est-ce que la présence de Haena dans tes bras ne suffisait pas à te conférer un totem d’immunité ?)

Néanmoins, tu ne tardes pas à filer dans la salle de bain, tout en attrapant vos nouvelles fringues au passage, pour aller vous rincer. Tu n’oses trop trainer et reviens bien vite, après avoir calmé la petite. (Heureusement pour toi, elle semblait, bien souvent, rapidement réussir à passer à autre chose.) « Merci … Pour la tenue. » souffles-tu, en désignant le pantalon auquel tu avais tout de même dû retrousser le bas pour ne pas marcher dessus. Ce ne serait pas parfait … Mais pour la journée, ça suffirait. « Je la laisse là ? » souffles-tu, avant de filer, après un dernier à tout à l’heure à ta petiote adorée.