ootd - Les yeux rivés sur le groupe, j'admirais leurs corps se mouvoir au rythme de la musique sur une chorégraphie endiablée. Je me suis toujours demandé comment ils faisaient pour donner cette impression de légèreté, de facilité. On croirait qu'il n'y avait rien de compliqué, qu'ils n'éprouvaient aucune difficulté à danser comme ils le faisaient. Évidemment, leurs nombreuses heures d'entraînement aidaient grandement à parfaire leur aisance. Un nombre d'heures très important... Même trop important. Je pense que quelques petites heures en moins dans une semaine n'enlèveraient rien à leur perfection. Cela me faisait souvent mal au cœur de les voir se tuer à la tâche, au point d'être totalement sur les rotules à la fin de la journée. Malheureusement, je n'avais aucun contrôle sur leur emploi du temps. Au fil de ces quatre années, j'avais appris à les connaître et à nouer des liens avec eux. Même si je n'avais pas les mêmes affinités avec chacun, cela ne m'empêchait pas d'être proche d'eux. Et puis il y avait Jun... Avec lui, c'était encore différent. Cela faisait trois semaines que notre relation professionnelle avait plus qu'évolué en une relation intime. Nous avions décidé d'entamer une relation cachée aux yeux du reste du monde, et pour le moment, cela se passait relativement bien... Même si parfois, on pouvait rencontrer des moments relativement frustrants. Comme celui que nous vivions en ce moment. Si nous avions la chance de pouvoir nous voir quasiment tous les jours, ce n'était pas pour autant que nous pouvions passer du temps ensemble en tête-à-tête. Et ça avait un côté pire que frustrant parfois. Le fait de se voir, d'être si près l'un de l'autre, de se frôler... Et de ne pas pouvoir réellement se toucher... C'était bien plus difficile que ce que je ne l'avais imaginé au départ.

Mon regard se posait machinalement sur Jun, mon regard était bien malgré moi très souvent happé vers lui. Il faut dire que son charisme était indéniable. Il était fait pour ça, il n'y avait pas de doute là-dessus. Un léger sourire sur le visage, je l'admirais dans son élément et ne pouvais m'empêcher de le trouver très beau dans l'ensemble que je lui avais d'ailleurs moi-même créé. Je devrais sûrement arrêter de lui faire des tenues qui le mettaient tant en valeur, ça n'aidait pas mon pauvre petit cœur à ne pas succomber davantage. Heureusement, aujourd'hui nous n'étions pas sur un gros projet. Il s'agissait de tourner le clip version chorégraphie. On était donc sur un changement de tenue limité, et uniquement de la danse sur un fond noir. Ce genre de projet était directement tourné dans l'immeuble de l'agence, ce qui était plutôt pratique question organisation. Le clap retentit, et sonnait la fin de la première partie de l'enregistrement. Le réalisateur donnait une demi-heure de pause aux garçons avant d'enchaîner sur la deuxième partie, avec un changement de tenue entre deux. Les garçons saluèrent l'équipe avant que tout le monde ne se sépare un peu pour vaquer à différentes occupations. Certains allaient manger un petit quelque chose mis à disposition par la production, pendant que d'autres décidaient de quitter la pièce pour prendre l'air ailleurs.

Dans ce moment de temps mort où chacun était éparpillé, je vis une opportunité de pouvoir passer un petit moment avec Jun. Je captai son regard, et lui fis signe de me suivre en lui montrant la porte que j'avais empruntée peu avant pour me rendre à d'autres endroits du bâtiment. Je sortis la première avant qu'il ne prenne le chemin peu après. Je l'attendis au détour d'un couloir, histoire qu'il puisse voir le chemin que j'empruntais, avant de passer une porte qui menait à une sorte de réserve de fourniture assez grande avec pas mal d'armoires et d'étagères ordonnées avec une allée centrale... Un endroit où les gens venaient rarement. Ne m'ayant pas vue entrer dans la pièce, je savais que Jun devait se demander où j'étais passée. Et alors que j'avais entendu ses pas passer devant la porte, j'attendis deux secondes avant d'ouvrir cette dernière et d'attraper le jeune chanteur à la volée pour le tirer avec moi à l'intérieur. Prenant sa main, je l'entraînai rapidement jusqu'au fond, dans un endroit à l'abri des regards, caché par de larges étagères couvertes de différents cartons. Mon dos rencontrant le mur, ma main tirant sur la sienne pour l'attirer à moi. Un large sourire étirait mes lèvres alors que j'étais heureuse d'enfin pouvoir passer un peu de temps avec lui. Mon cœur s'emballait instantanément à sa proximité. Mes doigts vinrent lentement serrer sa veste que j'attrapai. "Tu m'as manqué..." Lui avouais-je alors que je me servais de cette prise pour l'approcher encore plus de moi et de capturer ses lèvres avec une envie folle, à l'instar d'une junkie qui aurait enfin sa dose après un manque bien trop long. Et alors que nos langues se mêlaient l'une à l'autre, j'avais enfin la sensation de pouvoir respirer de nouveau... Cette relation était vraiment complexe, les moments de tendresse bien trop rares... Mais lorsque l'on pouvait enfin se retrouver, c'était comme si tout était décuplé et plus intense...

 

ootd - Sur le rythme des basses et des accords entêtants, nous enchaînions les pas en une chorégraphie minutieusement préparée. Pied, main, coup de tête, des gestes que le temps avait mué en réflexes. Des automatismes dès qu’un fond de musique venait susurrer à nos oreilles. Je ne voyais plus que le plateau, les décors dans lesquels je m’étais transformé. Je n’entendais plus que les notes d’une mélodie entraînante sur laquelle je me déchaînais. Les tournages, les concerts, les représentations, les émissions… je prenais plaisir à être tout ce que je n’étais pas : extraverti, charmeur, impétueux. Il subsistait deux Jun, le timide et sérieux derrière les caméras ; le joueur, ouvert et communicatif qui faisait tourner les têtes. J’aimais ces deux facettes tant elles étaient complémentaires, mais chacune d’elle évoluait dans un univers bien défini. J’agrémentais mon dernier geste d’un clin d’œil et enfin sonna le glas de cette matinée de tournage, une pause amplement méritée. J’observais mes amis et collègues de travail ainsi que le staff qui s’affairait déjà à préparer le second plateau. Discrètement, je glissais un regard en direction de Sae Yeon qui, comme à son habitude, se trouvait en retrait. Un léger coup de tête et je compris aussitôt ce qu’elle tentait de me communiquer. Trois semaines s’étaient écoulées, trois semaines et je peinais toujours autant à réprimer mon sourire. Trois semaines et j’avais découvert un nouvel univers avec elle. La dépression n’était plus qu’un mauvais souvenir, une période sombre qui me paraissait désormais appartenir à une autre vie. Mais si les relations amoureuses ne m’étaient pas inconnues, avec elle, tout me semblait décuplé.

Presque machinalement, j’allais récupérer mon téléphone et prévoyais de fuir par la porte derrière laquelle Sae Yeon venait de disparaître. Mais c’était sans compter sur les curieux. « Jun ! Tu vas où ? On va manger un morceau ! » J’affichais un air faussement déçu et désignait l’appareil. « Désolé, je dois appeler Halmae… » Je déglutissais avec difficulté de ce mensonge que je balançais avec aisance, j’espérais seulement que ma grand-mère ne m’en tienne pas rigueur. « Oh… ok, à tout à l’heure ! » Et sans attendre, je quittais la pièce pour flâner en direction du couloir. J’eus le temps d’apercevoir ses longues mèches d’ébène avant qu’elle ne se volatilise. Je ralentissais le pas, hébété par cette soudaine disparition, mais je n’eus pas le temps de réagir qu’une main m’agrippa le poignet et me tira en arrière. Je souriais en reconnaissant Sae Yeon et me laissais conduire vers le fond de la salle de stockage sans opposer de résistance. Elle se retourna avec souplesse alors que son dos vint heurter l’étagère et mon sourire s’élargit bien davantage à son aveu. « Tu m’as manqué aussi. » soufflais-je. Les mots devinrent superflus tandis que ses lèvres pressèrent les miennes avec envie. Je fondais alors dans la douceur de ses carmines et la chaleur de sa respiration. Un baiser au travers duquel je pouvais sentir la tension de ces instants volés. Si ses mains crochetaient ma veste, je glissais une paume au creux de ses reins et pressais son corps contre le mien en même temps que je m’accrochais à l’étagère de ma main libre.



 

ootd -

Le temps filait et ne semblait pas vouloir se mettre en pause un moment pour nous laisser un peu plus longtemps de ces rares moments volés que nous pouvions passer ensemble. Je soupirai légèrement malgré moi alors qu'après un coup d'œil à son téléphone, Jun indiquait qu'il faudrait bientôt retourner à cette réalité qui jouait contre nous. "Déjà ?... Alors encore deux minutes et après on y va..." Tel une enfant, j'avais la sensation de négocier pour grapiller encore un peu de bonheur à ses côtés. Passant mes bras autour de sa taille, je vins poser ma tête contre son torse.. Pendant quelques instants, je fermai les yeux, me laissant simplement bercer par la mélodie de son cœur, enivrée par son doux parfum... Envoûtée par sa chaleur... Je n'avais aucune envie d'être séparée de lui.. Un caprice bien inutile puisque, lorsque j'ai accepté d'avoir une relation avec lui, j'avais signé un accord tacite qui m'interdisait d'avoir le moindre caprice d'une petite amie lambda. Je devais être raisonnable.. Mais que c'était difficile parfois. Je mis malgré tout quelques instants avant de pouvoir me décoller de lui, non sans un dernier geste de tendresse. Encadrant son visage de mes mains, je vins lui voler un dernier baiser tendre et langoureux, lui faisant passer toute la frustration que j'avais de devoir le quitter.. Et je pouvais sentir à quel point il me rendait ce sentiment.

Après avoir profité de ce dernier petit moment, je redevins la Saeyeon sérieuse et raisonnable. Je le relâchai donc complètement, avant de passer près de lui pour me diriger vers la porte. Avant d'ouvrir celle-ci, je lui dis: "Je vais sortir la première. Je dois vite retourner dans la loge où se trouve les tenues, je suis presque sûre qu'un des garçons a besoin de moi pour son changement." Même si je laissais tout bien en évidence pour chacun des garçons, il y en avait toujours un ou deux qui galéraient avec tout ça. Ça m'amusait, je devais bien l'avouer. Mais du coup, cela faisait que je devais me presser... Après un dernier sourire en sa direction, et après avoir vérifié qu'il n'y avait personne dans le couloir, je quittais le stock pour me diriger là où on avait besoin de moi.

Comme si j'avais su lire l'avenir, je me fis alpaguer à peine j'entrais dans la pièce. Amusée, je me rendis compte que, comme d'habitude, certains éprouvaient des difficultés avec les tenues qui leur étaient attribuées, et je pouvais sentir leur détresse d'ici, surtout que l'heure tournait et qu'ils allaient bientôt devoir y retourner. Heureusement pour eux, il n'y avait rien de compliqué, et en quelques gestes je réussis à tout arranger comme il le fallait. Entre deux, Jun avait fini par rejoindre la loge également pour enfiler sa tenue... Et je me risquais parfois à un regard en sa direction, chose que j'évitais au maximum, avec cette peur latente de me faire trahir par la manière dont je pouvais le regarder, qui n'avait clairement rien à voir avec celle dont je regardais les autres. Mais je devais bien avouer que je n'avais pas pu m'empêcher de venir à nouveau me tenir près de lui. Et sans vraiment réfléchir, je vins boutonner les derniers boutons qui terminaient sa tenue, avec un petit sourire sur le visage. Évidemment, personne ne prêtait attention à nous, les autres finissaient de se vêtir, ou pour ceux que j'avais aidés précédemment, quittaient déjà les lieux pour se rendre sur le tournage. Mon regard croisait celui de Jun, et je me sentais à nouveau toute chose... Comme si souvent lorsque nos regards se croisaient. J'avais envie de lui dire tellement de choses à cet instant... Que je l'aimais, que j'étais sûre qu'il serait parfait... Mais avant de laisser échapper quoi que ce soit d'inconvenant dans notre situation, je m'éloignais rapidement de lui avant de le laisser partir avec les autres pour la suite du tournage. Et alors que mon regard suivait sa silhouette qui quittait la pièce, je soupirais à nouveau. Il n'était tellement pas facile de ne pas faire de gaffe... J'avais la sensation que plus le temps passait, plus il était difficile de retenir des gestes de tendresse presque réflexe... Ce qui devait me faire redoubler d'attention.

Je ne suivais pas le joyeux petit groupe, pas pour le moment. Mon regard se posait sur mon sac non loin, ce sac si volumineux qui contenait tout ce dont j'avais besoin n'importe où n'importe quand. Je m'approchais de ce dernier, avant d'en sortir une pochette... Comme pour m'assurer qu'elle était toujours là. Lorsque je vis qu'elle était bel et bien là, je la remis à sa place... Et me demandais quand est-ce que j'aurai l'occasion de parler à Jun, maintenant que j'avais enfin trouvé le courage de le faire. En effet, cette pochette contenait les lettres de nos échanges... Ça faisait quelques jours que je les baladais avec moi, mais nous n'avions vraiment pas pu avoir de temps pour parler sérieusement... Et ce n'était pas quelque chose que je pouvais lui dire comme ça au détour d'un couloir... C'était réellement frustrant. Après ce petit moment de solitude et d'isolement, je trouvais la force de retourner dans le tumulte des activités actuelles du groupe.
 

ootd - J’avais beau la couver d’un regard énamouré, je me sentais gauche et particulièrement mal à l’aise d’avoir succombé si facilement à cette pulsion sauvage. Je ne me reconnaissais pas dans cette impatience brutale, ce besoin presque viscéral qu’elle faisait naître au travers même d’un simple effleurement. Son regard, son sourire, son parfum, et même ses gestes provoquaient en moi une myriade d’émotions toutes plus contradictoires les unes que les autres. Ses aveux firent écho à mes pensées, celles que je gardais sous silence mais que j’avouais sans mots dès lors que je l’embrassais ou que je la possédais. J’ignorais encore ce que j’éprouvais réellement pour Sae Yeon, mais je savais qu’il s’agissait d’une affection bien plus profonde que ce que je pouvais imaginer. J’appréciais nos retrouvailles, si courtes puissent-elles être, mais depuis quelques jours, je me surprenais à en ressentir un manque douloureux. J’acceptais de me cacher, de la retrouver dans des pièces vides au détour d’un couloir, d’effleurer sa main en la croisant, de lui offrir un sourire entendu lors d’une réunion… mais je découvrais depuis peu que ces échanges devenaient presque indispensables. Il ne se passait pas une journée sans que je ne croise son regard qui m’apportait la sérénité que j’avais tant recherché. Je m’en contentais non sans éprouver le besoin de plus.

Si j’énonçais la dure réalité et les obligations qui nous incombaient, j’accueillais sa protestation comme si c’était la mienne. J’aimais mon métier, ma carrière, je prenais plaisir à jouer avec les caméras et à changer de personnalité au gré de mes tenues, mais avec Sae Yeon, j’avais découvert une autre facette de ma vie qui me comblait de manière inattendue. Elle m’enlaçait alors, et j’y répondais en l’écrouant de mes bras à mon tour. Un court instant, bien trop court à mon goût, durant lequel je fermais les yeux pour profiter de sa chaleur. J’avais la sensation de recharger mes batteries, et si elle avait initié ce rapprochement, elle y mit un terme également. Puis, dans un baiser mêlant douceur et passion, je compris que notre moment touchait à sa fin. Je pressais alors mes lèvres contre les siennes comme si c’était la dernière fois que je le faisais, je caressais sa langue une dernière fois de la mienne avant de plonger à nouveau dans ses perles sombres. Un pas en arrière, elle me laissait orphelin de son étreinte et se dirigeait déjà vers la porte. Si je m’attelais à ne rien laisser paraître, je n’en ressentais pas moins l’oppression de cette solitude soudaine. Un dernier sourire, et elle disparaissait déjà derrière la porte, me laissant avec le souvenir fantôme de ses bras autour de ma taille. Avant de sortir et de me replonger dans l’effervescence de ce tournage, je m’accordais un moment pour calmer mon cœur affolé. Le dos pressé contre le métal froid de l’étagère, je ressassais cette concupiscence nouvelle qui me faisait perdre la tête. J’avais pourtant grandi avec les notions du bien et du mal, et si j’avais la certitude d’apprécier chaque instant volé en sa compagnie, je ressentais le poids de la culpabilité.

Je vérifiais l’heure une dernière fois avant de m’aventurer à mon tour dans les couloirs et de regagner la loge dans laquelle Sae Yeon s’affairait déjà à venir en aide à mes collègues et amis. Nous quittions un univers de couleurs pour embrasser un monochrome de noir. Je passais mes vêtements non sans glisser un regard vers la brune. Régulièrement, je l’observais resserrer les ceintures, refermer les chemises, et je ne pus m’empêcher d’éprouver une certaine jalousie. Je la ravalais aussitôt en laissant quelques boutons volontairement ouverts que Sae Yeon vint fermer. Un à un, les chanteurs quittèrent la pièce, et si j’eu l’envie de subtiliser un baiser à celle dont le sourire me faisait fondre, elle recula finalement. Peut-être était-ce mieux ainsi ? Je risquais gros en me montrant si téméraire. J’aurais pu attendre que la pièce soit vide pour me retrouver avec elle, mais à mon tour, et à contre-cœur, je regagnais le plateau et la laissais ainsi seule.

Sitôt que je retrouvais l’agitation du studio, j’affichais un sourire de circonstance et m’empressais de retrouver mes marques dans le décor. J’osais un dernier regard vers le staff où j’étais sans doute le seul à remarquer son absence, une fraction de seconde seulement avant qu’il ne me faille prendre position pour enchaîner les pas. La musique éclata alors et avec elle, je me glissais de nouveau dans la peau du chanteur. Mais j’avais beau me concentrer sur la chorégraphie et les caméras, je la cherchais malgré moi. Les minutes s’égrenaient, les prises se multipliaient et je redoutais de devoir troquer le studio contre un autre lieu d’enregistrement pour un autre sans l’avoir aperçu. Un pas, puis un autre, je pivotais et glissais sur le côté avant de fixer à nouveau l’endroit où je la retrouvais finalement. Je ne cherchais pas même à retenir le sourire qui étirait mes pulpeuses et m’en servais aussitôt pour jouer avec la caméra. Soulagé de la voir, j’appréhendais avec bien plus de sérénité le reste du tournage, jusqu’à finalement être appelé ailleurs. Si certains restaient sur ce décor, nous étions trois à quitter les lieux et j’espérais que notre styliste puisse venir avec nous. Mais je constatais qu’elle demeurait immobile. J’ignorais quoi dire ou quoi faire, aussi je laissais passer dans mon regard tous les mots que j’étais incapable de prononcer en public. Tu restes ici ? Tu ne peux pas venir avec nous ? Mais dans ses onyx attristés, je ne pus qu’il lire la résignation. Réfléchis Jun, réfléchis… Nous étions à mi-chemin lorsque l’idée germa dans mon intellect. Discrètement, je tirais d’un coup sec sur la manche de ma chemise et en fis sauter la couture avec une facilité déconcertante, et toujours aussi discrètement, je poursuivais mon ascension sans ne rien dire. Une fois sur place, j’écoutais d’une oreille attentive les consignes du directeur qui remarqua aussitôt ma manche arrachée. « Jun ! Mais… ta chemise ! » Je feignais aussitôt la surprise. « Ma chemise ? Quoi donc ? » J’aurais sans doute pu gagner un prix pour mon jeu d’acteur. Je sursautais alors qu’il saisissait ma manche subitement pour l’examiner de plus prêt. « Oh… » soufflais-je. J’espérais ne pas être débusqué, et je fus soulagé lorsque sa voix retentit. « La styliste, appelez la styliste, il faut recoudre ça ! » J’ignorais si je devais être fier de ma manœuvre ou honteux d’avoir agi ainsi… mais entre les cris du directeur, je retenais surtout que je devais me rendre dans l’atelier de Sae Yeon afin qu’elle m’y retrouve pour réparer le trou béant dans le tissu.

Faussement inquiet de devoir imposer du retard au staff, je me retenais de courir et empruntais les couloirs à la hâte. Je n’attendais que quelques minutes seulement avant que la porte ne s’ouvre sur elle. J’haussais les épaules comme pour m’excuser de la déranger tandis que mon sourire trahissait la fierté d’avoir réussi mon coup. « Je me suis accroché à… je ne sais pas trop quoi et… voilà. » Je lui présentais la manche qui pendait lamentablement au bout de mon bras. « Je suis maladroit… » Un coup d’œil vers l’horloge et je comptais déjà les minutes que je pouvais ainsi glaner. Bien moins que le répit de la pause, mais je m’accordais cette nouvelle escapade sans remord. Avant même qu’elle ne fasse le moindre geste, je fis courir ma paume sur sa taille et pressais l’autre dans son dos pour l’approcher de moi et fondre sur ses pulpeuses. Je profitais éhontément de cette intimité volée en goûtant son sourire avec avidité.

 

ootd - J'avais eu un peu de mal à rejoindre le brouhaha extérieur du tournage. Il faut dire que j'étais restée un moment seule dans le silence de la loge avant de finalement retourner affronter le monde extérieur. Mais j'étais néanmoins impatiente de pouvoir à nouveau poser mes yeux sur Jun, qui devait être en train de tout donner pour procurer au réalisateur les meilleures prises possible. Lentement, je reprenais ma place, en retrait, laissant mes yeux voguer sur les garçons... Avant que mon regard ne puisse enfin se poser sur l'objet de mes convoitises. C'est drôle, mais en le voyant là, je me sentis heureuse, comme s'il m'avait déjà manqué sur le peu de temps où nous avions été séparés. Nos iris se croisèrent un instant, et son sourire fit accélérer mon cœur qui s'affolait d'un coup. Je prenais ce sourire pour moi... Même s'il jouait instantanément avec la caméra. J'aimais énormément toutes ces petites choses que l'on pouvait faire à la vue de tous, sans qu'ils ne puissent comprendre la réalité de ce qui se cachait derrière tout ça... Des instants, des gestes, des sourires volés... Mais qui nous faisaient un bien fou alors que nous devions feindre une simple collaboration entre nous, sans jamais dévoiler ce nouveau lien, cette nouvelle relation qui nous unissait l'un à l'autre.

Mais les choses tournèrent ensuite d'une manière qui ne me plaisait pas beaucoup. Jun, ainsi que deux autres de ses camarades, furent emmenés sur un autre lieu de tournage pour faire d'autres prises de vues... Chose dont je n'avais pas le souvenir, peut-être un ajout de dernière minute ? Et si nous ne pouvions pas nous parler, le regard de Jun fut assez explicite pour que je puisse entendre sa voix se manifester dans ma tête, posant à haute voix les questions muettes qui émanaient de lui. Je ne peux que lui renvoyer ma surprise et ma désolation. Je n'avais pas été conviée sur cette autre partie de tournage, restant avec les autres membres qui, eux, continuaient ici. Je soupirais alors que je vis Jun quitter la pièce... L'endroit me semblait tout de suite plus froid, plus gris... Comme s'il avait emporté avec lui toute la couleur, toute la chaleur de cet endroit. Et malgré ma déception, je devais faire comme si de rien n'était et continuer à être spectatrice, aux aguets du moindre problème vestimentaire ou de maquillage dont pourraient souffrir les garçons.

Il ne fallut pas longtemps avant qu'un retournement de situation ne se fasse apparaître. Un des membres de l'équipe qui était plus tôt avec Jun revint sur le plateau, se dirigeant à grandes enjambées vers moi. Je le regardais, perplexe, me demandant ce qu'il pouvait bien vouloir. "Nous avons besoin de vous. Jun vous attend dans votre atelier, sa tenue a besoin d'être recousue rapidement !" Je ne pus empêcher mon regard d'exprimer la surprise que je ressentais face à cette nouvelle. Mais bien évidemment, même si la surprise m'assaillait, je ne me fis pas prier pour tout abandonner et foncer rapidement jusqu'à mon atelier. Évidemment, je ne courais pas, mais marchais d'un pas rapide, comme la bonne employée que j'étais... Croit-on réellement que c'est pour ça que je fonce là-bas ?... Certains naïfs y croiraient sûrement, ceux que je croisais, ou encore celui qui m'avait prévenu y croirait sans aucun doute. Mais en réalité... J'étais juste impatiente, quoi qu'intriguée, de retrouver Jun pour un temps, aussi court fût-il.


Lorsque j'entrais enfin dans mon atelier, il était déjà là. Je m'approchais de lui, et ne pus cacher mon étonnement face à sa manche complètement décousue. Et alors que, pendant une seconde, j'eus la naïveté de croire qu'il s'était vraiment accidentellement accroché quelque part pour en arriver à cet état... Ses mots, son regard, son attitude me hurlaient que tout ceci était en réalité... un coup monté. Je n'eus pas réellement le temps de réagir à cette supposition qu'il m'attirait déjà à lui, afin de sceller nos lèvres dans un nouveau baiser passionné. Comme souvent, je sentais mes idées qui se mettaient bien malgré moi à s'embrouiller, mon cœur s'accélérait de nouveau et mon corps réagissait malgré moi à cette nouvelle proximité soudaine. Un léger sourire se formait sur mes lèvres alors que je rompais notre baiser sans pour autant m'éloigner de façon significative. Lentement et avec douceur, ma main vint trouver la sienne, entremêlant nos doigts, avant que je ne la lève afin de laisser apparaître le bras où se trouvait le fameux petit accident. "Pour que ce soit décousu comme ça, tu as dû vraiment... Vraiment, être maladroit." Lui dis-je, avec un sourire amusé. J'avais compris la situation, et je ne pouvais m'empêcher d'être heureuse qu'il ait fait une bêtise pareille... Car oui, c'était une bêtise, mais que pouvais-je lui reprocher ? C'était finalement une façon comme une autre de pouvoir passer encore un peu de temps ensemble après ces moments de séparations qui avaient dû lui sembler aussi longs qu'à moi. "Ce n'est pas très gentil de saboter mon travail comme ça..." Ajoutais-je avec une moue faussement vexée. Pour ce genre de chose, il pouvait me rajouter autant de travail qu'il voulait, cela ne me gênait pas le moins du monde.

Avec douceur, je venais rapprocher mes lèvres des siennes, les effleurant sans pour autant les unir pour le moment. "Il va falloir que tu trouves un moyen de te faire pardonner..." Lui dis-je, alors que je sentais mes lèvres appeler leurs jumelles à corps et à cris. Je ne cherchais donc pas plus longtemps et vins prendre possession de ses pulpeuses dans un baiser fiévreux, trahissant cet ascenseur de sensations qu'il pouvait me faire vivre. Au bout de quelques instants, mes doigts commencèrent à s'afférer sur son blazer que je commençais à déboutonner avec une dextérité désinvolte, et je m'en débarrassais, l'envoyant un peu plus loin sur le vaste plan de travail de l'atelier. Et sans quitter ses lèvres, alors que nos langues dansaient maintenant un tango enflammé, guidé par ce besoin viscéral de sentir coûte que coûte la présence de l'autre, je laissais mes doigts agiles se remettre au travail, venant déboutonner les boutons de sa chemise que j'avais pourtant un peu plus tôt refermée pour le tournage... Et je trouvais ça relativement plus sympa dans ce sens-là. Il ne me fallut que quelques secondes pour parvenir à mes fins, je pouvais remercier mes années de pratique à ses côtés, même si ce genre d'actions avait finalement eu lieu dans des buts relativement variés. Avec une lenteur calculée, je venais passer mes mains sur son corps, les remontant sur son ventre, puis son torse dans une ligne droite parfaite, avant qu'elles ne se perdent sur ses épaules, venant les dénuder et laissant le tissu glisser le long de ses bras... Avant que je ne rattrape la chemise au vol, qui s'apprêtait pourtant si joyeusement à rejoindre le sol. La ramenant près de moi, je venais rompre, bien malgré moi, ce baiser qui me faisait pourtant tellement chavirer... Et, presque à contre-cœur, je venais lui indiquer : "Il faut que je m'occupe de cette pauvre chemise..." Soufflais-je contre ses lèvres. On sent ma motivation niveau zéro là, maintenant. Si mon corps protestait, ayant bien d'autres envies avec le corps à moitié nu de mon amant contre le mien... Je tentais de conserver un peu de lucidité... Même s'il ne fallait pas grand-chose pour me faire complètement perdre pied, si réellement il le voulait. Et j'avais tellement envie de hurler... Je ne comprenais pas ce que mon corps avait... Avec Jun, nous avions pourtant eu un corps à corps un peu plus tôt avant tout ceci... Et pourtant je le sentais tout autant brûler que précédemment, comme s'il n'avait pas su tarir le brasier qui menaçait bien trop facilement de s'allumer en moi.
 

ootd - Si je tentais d’afficher une mine coupable et honteuse, je ne parvenais pas réprimer ce demi-sourire victorieux d’étirer mes pulpeuses. J’ignorais d’où me venait cette témérité nouvelle, mais je la saluais pour m’avoir poussé à agir. J’observais Sae Yeon s’avancer vers moi, incrédule face au vêtement que je venais de saccager. Mais avant qu’elle ne puisse dire quoique ce soit, je l’emprisonnais déjà de mes bras et lui imposais le silence de mon sourire. Je m’enivrais de sa chaleur et des bulles de parfum qu’elle exhalait. Je goûtais à ses lèvres sans retenue, jouais avec sa langue impunément et me laissais débordé par ce besoin irrépressible de l’éprouver, de ressentir tout d’elle. Jusqu’à ce qu’elle ne s’éloigne de quelques centimètres. Je n’opposais aucune résistance tandis qu’elle mêlait ses doigts aux mien et levait le trophée d’une manche déchirée pour l’exposer à ma culpabilité. Je pouvais lire dans ses onyx qu’elle avait compris mes sous-entendus. « Très… très maladroit… » insistais-je d’un sourire malicieux qui faisait écho au sien. J’aurais sans doute dû me sentir mal à l’aise et inquiet de retarder le tournage, de mettre producteurs, réalisateurs, chanteurs et tout un staff à l’arrêt, mais contre toute attente, je me sentais léger. Dans ses bras, plus rien n’avait d’importance que le chant mélodieux de son rire et la chaleur du regard qu’elle posait sur moi. Une lueur espiègle éclaira ses iris et elle m’acculait de faux reproches, et pour toute réponse, je lui offrais un nouveau sourire. Je n’eus pas le temps de répondre qu’elle m’asséna une nouvelle réplique, là contre mes lèvres. Elle effleurait ma bouche de la sienne et ce simple contact me rendait déjà fou. Mon cœur s’emballait et mon esprit s’envolait dans les méandres de souvenirs encore frais. Elle aurait pu me demander ce qu’elle voulait, peu importait ce qui pouvait lui passer par la tête, j’aurais acquiescé sans la moindre hésitation. Je me retenais de fondre à nouveau ses carmines qu’elle utilisait comme une arme, et comme si elle avait compris qu’il m’était impossible de tenir plus longtemps, elle m’embrassa finalement.

Je n’éprouvais désormais plus que la sensation de ses lèvres contre les miennes, de sa langue caressant sa jumelle, de l’ivoire qui s’entrechoquait, chaque geste, chaque inspiration trahissait l’ivresse d’une passion partagée. Dans le même temps, je fis voguer mes paumes jusqu’au creux de ses reins avant de les faire glisser un peu plus bas. Je me délectais de cet instant, un échange qui prit une nouvelle dimension alors qu’elle faisait sauter les boutons de mon veston pour l’envoyer valser plus loin. Pour chaque bouton qu’elle détachait, mon cœur loupait un battement. Et alors qu’elle s’attaquait à ma chemise, j’eus l’impression de perdre la raison. Des gestes précis et rapide, et avant même que je ne puisse m’en rendre compte, elle ouvrait les pans de mon vêtement pour annexer mon torse de ses mains curieuses. Ma respiration hachée et mon corps qui se tendait trahissaient l’envie et le désir qui me consumaient déjà. Elle pianotait avec délicatesse jusqu’à mes épaules en faisant fuir la soie dans son sillage. Je sentis à peine le tissu glisser le long de mes bras, trop obnubilé par son toucher qui irradiait chaque parcelle de mon épiderme. J’étais prêt à faire connaître le même sort à sa chemise, mais, sans quitter mes lèvres, elle me ramena à la réalité d’une simple phrase. Le soupire brûlant filtra l’ourlet de chair, et si j’avais la furieuse envie de lui faire subir le même sort, d’exposer son buste et de m’en repaître d’un toucher sirupeux… je me contentais de la maintenir fermement contre moi. Je vins apposer mon sourire sur le sien avec une tendresse infinie et qui me surprenait. En totale opposition avec le flot de pensées voluptueuses qui inondaient mon esprit, je me rendais compte que je savais faire preuve de self control. Alors que mon corps entier hurlait le désir que je ne cherchais pas même à masquer. « Oui… » soufflais-je finalement. J’avais saboté ma tenue dans le seul but de passer du temps avec elle… et par la même occasion, je venais de lui rajouter du travail. Mon intelligence avait ses limites… À contre cœur, je la relâchais, car je savais que si je ne lui rendais pas sa liberté, j’aurais été incapable de me contrôler davantage. « Tu… penses que ça prend combien de temps ? »

Je l’observais prendre place derrière sa machine à coudre et s’atteler à y apporter tous les réglages nécessaires, puis fis voguer mes perles sur la pièce. Je ne m’étais jamais attardé à la regarder réellement : les étagères encombrées de boites desquelles dépassaient les morceaux de tissu, les mètres emmêlés sur le plan de travail, les boites d’aiguilles ouvertes, un futon mal plié dans le coin de la pièce. Un… Je tournais brutalement les yeux vers Sae Yeon face à cette découverte. « Depuis quand… » je désignais l’objet de ma curiosité d’un geste en priant pour que mes pensées ne s’avèrent pas être la réalité. Mais face à son sourire amusé je fus très vite rassuré. « Non hein… » soufflais-je plus pour moi que pour elle. Une nouvelle idée germa alors dans mon esprit, mais avant que je ne puisse la formuler, la porte s’ouvrit brusquement sur l’un des employés de l’agence. Je me détournais aussitôt dans l’espoir de cacher l’appendice d’une virilité fièrement dressée et m’accrochais au plan de travail en espérant que l’intrus ne parte aussi vite qu’il était venu. « Sae Yeon, j’ai besoin d’un biais vert… tu as ça ? »

Je ne comprenais pas grand-chose à leur conversation, aussi je m’enfermais dans un silence gêné que ma tenue pouvait aisément expliquer. De longues minutes pendant lesquelles Sae Yeon s’affairait sur ma chemise et renseignait son visiteur. De longues et interminables minutes qui s’achevèrent finalement alors qu’il quittait les lieux, et dans son départ, j’expirais lourdement. La tension qui m’avait étreint se diluait indolemment dans mes veines et je tentais un regard vers la brune pour échanger un rire de soulagement. Du coin de l’œil, je maudissais quiconque prévoyait d’entrer et me glissais finalement derrière Sae Yeon. J’entourais sa taille de mes bras et vins déposer un baiser dans son cou. « Tu veux toujours que je me fasse pardonner ? » lui susurrais-je au creux de l’oreille. D’un coup de menton, je lui désignais le futon. « Qu’est-ce que tu fais ce soir ? » Je mordais mon inférieure d’anticipation, non sans un sourire mutin. Puis je décidais de joindre les gestes à la parole. Elle avait exploré mon torse plus tôt, aussi je tentais de lui infliger le même sort. J’attrapais sa chemise pour la tirer de sa ceinture et glisser une main sous le coton. « Je peux fausser compagnie au groupe ce soir… » Je traçais quelques ronds sur le bas de son ventre. « … trouver une excuse … » Je pressais ma paume sur ses côtes et du bout des doigts, je taquinais l’armature de son sous vêtement. « … on pourrait se retrouver ici… » Elle fit basculer sa tête sur mon épaule alors que j’empoignais sa poitrine. Je devais bien l’avouer… si je ne m’étais jamais montré intéressé par ce que les femmes pouvaient m’offrir, nous étions visiblement doués à ce petit jeu. Une nouvelle fois, j’embrassais son cou avant de lui rendre sa liberté. « Ce soir ? » demandais-je avec insistance. L’heure tournait, et si je mourrais d’envie de l’étendre sur le plan de travail, je me faisais violence pour rester raisonnable.

 

ootd - Je ne savais pas trop comment j'avais fait pour me contenir et être raisonnable là, maintenant. Je venais de le débarrasser de son veston et de sa chemise, non sans annexer son torse d'un toucher doux et fiévreux à la fois. Je n'étais pas parvenue à repousser cette envie irrépressible de le toucher, c'était plus fort que moi... J'aurais simplement pu déboutonner rapidement sa chemise pour la récupérer, mais j'avais finalement fait traîner les choses... Et réveillé en moi, comme en lui apparemment, un désir qui s'était légèrement endormi depuis notre corps à corps un peu plus tôt. On pourrait pourtant croire que cet épisode nous aurait permis d'aborder les choses plus facilement et d'avoir calmé nos ardeurs... Apparemment, il n'en était rien. Si je pouvais sentir le désir brûler mon bas-ventre de façon invisible, le désir de Jun, lui, était bien plus apparent... Et ça ne m'aidait pas vraiment à garder mon sang-froid. Malgré tout, je devais rester professionnelle et ne pas lui causer d'ennuis. Le temps lui était compté, et je devais encore réparer les bêtises qu'il avait faites sur sa chemise. S'il me gardait prisonnière encore un petit moment, un dernier baiser nous liait, un baiser dont je savourais la tendresse avant qu'il ne m'embrasse et que je me retrouve orpheline de son étreinte. "Si tout se passe bien, pas très longtemps," lui dis-je pour le rassurer. Je savais que, malgré tout, il était soucieux de ne pas trop faire attendre l'équipe de tournage. Et de mon côté, je ferais au mieux pour que cet épisode imprévu se termine vite et bien.

Passant derrière ma machine à coudre, je vins faire tous les réglages et les ajustements pour pouvoir réparer la manche de sa chemise. C'est la voix de Jun qui me sortit brusquement de ma concentration, alors que, sur l'instant, je ne comprenais pas réellement ses mots, je suivais son regard qui me désignait le futon dans un coin de la pièce. "Depuis un moment déjà..." lui répondis-je simplement alors que je continuais tranquillement mon ouvrage. J'avais demandé à le faire installer, pour le confort des membres qui devaient rester parfois ici un certain temps, et puis pour le mien quand je passais des heures et des heures enfermée dans cette pièce, histoire de pouvoir trouver le repos sur quelque chose de plus confortable qu'une simple chaise. Je croisai son regard qui semblait perdu et légèrement stressé et ne pus retenir un sourire amusé. Était-il en train de s'imaginer qu'il ait pu se passer des choses entre un autre homme et moi dans ce futon ?... Vu sa réaction, je pense que c'était bel et bien le cas. S'il savait qu'il était le premier homme à m'avoir touché en cinq ans, il serait sûrement rassuré. Mais c'est une information que je lui donnerais plus tard, sûrement.

La porte s'ouvrit me faisant sursauter légèrement, manquant presque de me faire faire une bêtise. Il faut dire qu'entre cette chemise à raccommoder, mon corps fiévreux qui avait du mal à redescendre, et la présence de Jun... Ce n'était pas vraiment un moment pendant lequel je m'attendais à avoir de la visite. Je levai les yeux vers le jeune homme qui venait de pénétrer dans mon antre et réfléchis un instant à la question qu'il venait de me poser. "Il me semble que j'en ai. Regarde dans les cartons sur cette étagère," lui répondis-je en même temps que je lui indiquai du doigt ladite étagère. Alors qu'il cherchait, il commença à entamer une discussion, discussion dans laquelle j'entrais tout naturellement vu qu'il s'agissait de boulot et de mon domaine de compétence. Je jetai parfois des coups d'œil sur Jun et ne pus m'empêcher de légèrement sourire... Autant amusée qu'un peu perturbée de la situation. Il faut dire que, le pauvre, ne se trouvait pas dans la meilleure des positions actuellement. Une fois que notre visiteur eut trouvé ce qu'il cherchait, il nous salua et quitta les lieux. Alors que mon regard croisait celui de Jun, nos rires se firent écho à ce moment-là, et j'étais bien contente de finalement me retrouver seule avec lui à nouveau. Je venais de terminer de recoudre sa chemise par la même occasion. Me relevant, je laissai le tissu venir se porter à ma vue, afin de voir si tout tombait correctement, et heureusement, ça avait l'air d'être parfaitement en ordre. Je posai la chemise sur le dossier de ma chaise, et n'eus pas vraiment le temps de réagir que Jun s'était déjà glissé derrière moi sans que je ne l'aie vu faire. Un frisson me parcourut alors que ses lèvres se posaient sur ma nuque en un baiser. Ses bras vinrent se placer autour de moi et je me sentis de nouveau confortablement à ma place... Mais alors que je croyais que tout ceci n'était qu'une petite marque d'affection... Je me trompais royalement. Sa question, dans un premier temps, m'interpellait. "Oui, je ne serais pas contre," lui répondis-je, me demandant où il voulait en venir. Me désignant le futon, ajoutant à cela sa demande concernant mon emploi du temps de ce soir... Les choses commençaient lentement à se frayer un chemin jusqu'à mon esprit... Etait-il en train de me proposer de venir assouvir nos pulsions si injustement réfrénées, ici ce soir ? Je devais avouer que cette idée m'amusait... Et je n'avais absolument rien contre ça. Passer du temps avec lui quand c'était possible était tout ce que je voulais, alors en plus s'il me proposait un câlin en même temps... Bien évidemment que j'étais partante... Mais j'avoue que mon esprit fut embrumé par les actes de ce cher Jun qui semblait vouloir se venger de ma petite attaque sur lui plus tôt. Ses doigts sous ma chemise brûlaient ma peau, et ravivaient bien trop violemment la flamme du désir que j'avais si bien tenté d'éteindre plus tôt... J'avais donc envie de le mordre actuellement, sachant que nous étions condamnés à attendre ce soir pour assouvir ce nouveau désir. Ma tête bascula légèrement en arrière alors qu'il venait empoigner ma poitrine... Décidément, il n'avait pas décidé d'y aller avec le dos de la cuillère... Tout ça pour finalement s'éloigner et me rendre ma liberté... Me laissant avec une frustration dont je me serais bien passée.

Je vins remettre correctement ma chemise, alors qu'il insistait pour que je lui donne une réponse pour ce soir. "Très bien... Ce soir," lui dis-je afin de le rassurer sur ma participation à ce petit événement qu'il venait de créer pour nous. Malgré tout... Attendre jusqu'à-là était quand même un supplice qu'il avait rendu encore pire avec sa petite attaque. "Je tiens quand même à dire que ce n'est pas très gentil de m'attaquer comme ça pour m'abandonner aussitôt." Une moue faussement boudeuse, ceci ne manquait cependant pas d'un fond de vérité. "Tu sais que..." Mon doigt vint crocheter la taille de son pantalon, et lentement je l'attirai vers moi, mordant légèrement ma lèvre inférieure. "Je pourrais décider de ne pas être très gentille non plus..." Je jouai quelques secondes avec le bouton de son bas, alors que mes lèvres venaient lui voler un rapide baiser. Stoppant finalement mon geste, je m'éloignai légèrement de lui avec un sourire amusé. "Mais tu as de la chance, j'ai décidé d'être raisonnable aujourd'hui." J'attrapai la chemise que j'avais préalablement posée sur le dos de la chaise, avant de la lui tendre afin qu'il la prenne. "Allez, rhabille-toi vite avant que je ne change d'avis !" Dans un souci d'auto-conservation, je préférais qu'il se vêtisse seul, histoire que je ne sois pas de nouveau tentée de faire n'importe quoi. J'allais d'ailleurs l'attendre près de la porte, préférant mettre une certaine distance entre nous, le temps qu'il soit décent. Il avait un pouvoir attractif bien trop puissant sur moi, je le sentais encore rien qu'en ce moment, juste en posant mes yeux sur lui. Une fois qu'il eut terminé, il s'approcha, afin de quitter la pièce et poursuivre les activités qui attendaient encore sa présence. Mais avant, je l'agrippai au passage afin de lui voler un dernier baiser passionné avant que l'on ne soit de nouveau séparé par une mer de gens qui nous empêchaient de vivre cette histoire d'amour récente qui n'aurait demandé qu'à pouvoir s'exprimer. Je le laissai ensuite partir avec la promesse d'un rendez-vous nocturne que j'attendais maintenant avec impatience.

Une fois ma petite interlude avec Jun terminée, je retournai sur l'autre lieu de tournage où étaient restés une partie du groupe, et où le jeune chanteur n'était pas. Je ne savais pas si c'était mieux ou non... En tout cas, cela me permettait de calmer mes ardeurs et de laisser lentement le poison du désir se diluer calmement dans mes veines. Le temps se mit à défiler, le tournage avançait bien. Et en fin de journée, tout était bouclé. J'étais remontée avant les garçons dans la loge afin de tout préparer au préalable, pour m'occuper d'eux avant qu'ils ne puissent rentrer chez eux. Si j'avais tranquillement commencé à m'occuper du petit groupe avec qui j'étais restée, celui où se trouvait Jun se faisait encore absent. Mais cela ne faisait rien, au moins quand ils arriveraient, j'aurais déjà fini avec une partie du groupe et les choses iraient plus vite. Je tentais de retenir mon esprit de vagabonder sur la suite potentielle de cette soirée... Mais il était difficile d'arrêter une imagination prolifique comme la mienne. De plus... J'étais impatiente de retrouver l'homme que j'aime, simplement.


 

ootd - En moins de temps qu’il n’en fallait, elle réparait le tissu que j’avais volontairement abîmé. Une pièce unique conçue de ses mains et je n’éprouvais pas la moindre honte quant à la cicatrice que je lui avais infligé. La mine amusée de Sae Yeon et ses mots avaient suffi à me donner envie de recommencer, simplement pour m’évader un instant avec elle. Mais chacune de nos rencontres étaient conditionnées par le temps. Encore et toujours ce temps qui nous manquait. Je savais, j’étais celui qui avait posé les conditions d’une relation basée sur le mensonge, j’avais mis des limites à notre histoire dans le seul but qu’elle ne souffre pas. Je ne connaissais que trop bien les ravages d’une médiatisation précoce, bien plus encore alors que dès le premier jour, nous avions fait preuve d’une passion sans précédent. Une pulsion sauvage et animale, viscérale et irrépressible comblée au travers d’une nuit dont j’éprouvais encore les vestiges d’un corps à corps brûlant. Si autrefois je tenais à Fae pour le professionnalisme dont elle faisait preuve, cette discrétion à toute épreuve au point de ne pas la remarquer mais de sentir sa présence, aujourd’hui je tenais à Sae Yeon d’une façon bien différente. Elle avait fait renaître l’homme, l’amant, peut-être même le romantique seul le temps nous le dira. Je refusais qu’elle soit l’objet d’une haine vicieuse et sordide, aussi je me détournais de son visiteur impromptu en espérant masquer la concupiscence que nos baisers avaient réveillé. Je voulais cacher notre relation aux yeux du monde entier et jouir de nos instants volés sans penser aux langues qui cracheraient leur venin si elles venaient à l’apprendre.

J’eus l’impression que les minutes se transformaient en heures, et la tension qui m’écrasait se dissipait peu à peu jusqu’à ce qu’enfin le visage inconnu quitte la pièce. Sitôt que la porte se refermait derrière lui, je l’approchais de nouveau de Sae Yeon, l’enlaçait et me délectais de son corps par un toucher aux allures de vengeances. Je n’avais qu’une envie : me vautrer dans la luxure et laisser libre cours à mon imagination dans laquelle je me voyais déjà la consumer, mais il me fallut faire preuve d’une volonté de fer. Je ne pouvais décemment pas retarder le tournage indéfiniment, et si je me félicitais de ce coup monté pour voir Sae Yeon, je m’en voulais malgré tout de devoir interrompre toute une équipe dont le temps était précieux. Mais avant de la quitter, je fixais déjà notre prochain rendez-vous. Avec l’insistance d’un homme éprit, je lui faisais promettre de me retrouver le soir même, dans la même pièce, avec un but en tête : faire de cette soirée un moment mémorable. J’esquissais un sourire à la perspective de la voir à nouveau, quelques heures de dur labeur avant d’apprécier une fois encore la douceur de ses courbes. Une nuit, une vraie nuit entière avec elle, la première depuis des semaines, la première depuis ce dérapage… J’allais répondre à sa remarque, mais avant même que je ne puisse le faire, elle joignait le geste à la parole et s’attaquait désormais à la ceinture de mon pantalon. Je faisais un effort surhumain pour faire fuir l’envie et le désir qu’elle raviva en crochetant mon pantalon de ses doigts agiles. « En effet… ce n’est pas très gentil… » soufflais-je. Mes pensées s’embrouillaient à nouveau, mon corps frissonnait de cette proximité et ma respiration se saccadait. Elle m’acheva finalement d’un baiser en me rendant ma liberté. Le soupire m’échappait et j’expirais en même temps toute la frustration que nous nous étions infligés. Avec une pointe de regret, je m’exécutais et enfilait la chemise fraîchement réparée puis passait le veston assorti.

Nous nous étions laissés emportés par l’envie, le besoin de se toucher et de se retrouver, et dès lors qu’il nous fallait reprendre pied avec le monde extérieur, l’atmosphère devenait plus lourde. J’éprouvais cette distance que nous nous imposions pour tromper les regards curieux et je m’étonnais de la vivre si mal. Je faisais bonne figure et tentais de prendre le recul nécessaire à ce choix, cette relation, mais je sentais mon cœur se pincer tandis que je fermais les derniers boutons. La flamme du désir s’était éteinte et j’étais soulagé à l’idée que mon corps ne trahirait pas notre secret, mais alors que j’avançais d’un pas pour quitter la pièce, Sae Yeon s’interposait une dernière fois. J’appréciais le velours de ses lèvres sur les miennes, la chaleur de son sourire et je lui offrais un regard désolé en replaçant une mèche de ses cheveux. « À ce soir. » lui murmurais-je, et je disparaissais enfin derrière le battant. Le pas bien plus lent, je rejoignais le studio dans lequel l’équipe m’attendait. Je fus presque acclamé de soulagement alors que je reprenais ma place et que nous pouvions reprendre le tournage.


Les heures s’étaient écoulé à une vitesse folle, et je remerciais le ciel d’avoir ainsi pu faire passer l’après-midi sans que je ne m’en rende compte. Nous bouclions les dernières prises, les deniers ajustements, les dernières prises de vue, et enfin, le staff au complet se congratulait d’être parvenu à bout de cette longue journée. Les sourires et les poignées de main s’échangeaient dans une ambiance presque festive, et nous étions finalement congédiés. J’affichais un large sourire en quittant les équipes de tournage, je m’inclinais avec respect et rejoignais la loge à grandes enjambées. En poussant la porte je découvrais les autres membres déjà prêts à partir et je dû réprimer ma joie alors que je glissais un regard vers Sae Yeon. Subtilement, je remarquais le sourire qui étirait ses pulpeuses, le même que j’arborais désormais, puis je me dirigeais vers les portants pour troquer l’habit de scène et retrouver une tenue plus confortable. Dans une bonne humeur contagieuse, les blagues fusaient et les rires résonnaient en écho dans la pièce, et je me surprenais à jouer à nouveau avec Sae Yeon, aux yeux de tous… J’arpentais les lieux, vêtu uniquement de mon boxer et je pu voir sa mine amusée se renfrogner d’exaspération. Je lui mettais sous le nez ce qu’elle pourrait toucher sous peu, pris d’une hilarité partagée. Mais très vite, j’aperçu son visage se décomposer. J’ignorais pourquoi elle se fermait ainsi, avais-je été trop loin ? Je sentis alors deux mains glisser sur mes côtes et sursautais à ce contact. Aussitôt je fis volteface pour me retrouver nez à nez avec Minji armée d’un sourire qui me glaçait le sang. « Mi… Minji… ?! »

L’air était soudain devenu bien plus lourd, et j’eus une fraction de seconde à peine pour réagir alors qu’elle tentait de se jeter sur mes lèvres. D’un geste, je la repoussais et l’observais, à la fois horrifié et complètement perdu. « Jun ? Je sais que je suis partie un moment, mais… tu ne m’embrasses pas ? » Je pouvais lire la gêne et l’impatience luire dans ses perles sombres, mais je restais interdit face à l’aplomb dont elle faisait preuve. N’avais-je pas clairement mis fin à notre relation ? J’avais clôturé ce chapitre de ma vie le soir où elle s’était invitée chez moi, je l’avais chassé avec tout le respect dont elle avait su faire preuve. Et soudain je réalisais… elle me détaillait lourdement jusqu’à ce que je me précipite sur mes vêtements et les enfiles à la va-vite. « Pourquoi je t’embrasserais ? » lâchais-je abruptement. « Pardon ? Tu as oublié ? On est ensemble Jun, depuis plus d’un mois maintenant… » Je m’étouffais presque à son annonce, et comme si le mensonge ne lui suffisait plus, elle réitéra sa tentative passa ses bras autour de mon cou. À nouveau, je la repoussais, plus brutalement que je ne l’aurais voulu. « Tu es dingue ?! » La colère ronfla subitement au creux de mon estomac, et je perdais alors mon calme légendaire. « Toi, et moi, nous ne sommes pas ensemble, je pensais avoir été clair. Quand tu as débarqué chez moi l’autre soir, que tu t’es imposée et que tu as… » Je m’interrompais, je ne voulais pas admettre cette partie, quand bien même rien ne s’était passé entre nous, je redoutais le regard de Sae Yeon si elle l’apprenait. « L’autre soir… quand on a couché ensemble tu veux dire ! » J’échappais un hoquet de surprise, et les autres membres choisissaient de déserter. « PARDON ?! Toi… et moi ? Rentes chez toi Minji. Tu es complètement folle. » Je savais qu’elle mentait, mais Sae Yeon était encore dans la pièce et je refusais qu’elle soit la victime de cet odieux chantage. « Tu comptes raconter tes bobards à d’autres ? » Ma voix éclatait avec bien plus de force que prévue. « Non seulement tu veux ruiner ma carrière, mais la tienne en prime ? Est-ce que tu as un cerveau pour réfléchir ou tu es trop stupide pour comprendre le scandale que tu pourrais provoquer ! » J’explosais, j’avais supporté son comportement bêtement, je m’étais laissé croire qu’elle pourrait être plus qu’une amie… et aujourd’hui elle était bien moins que ça. La haine traversa ses pupilles en un reflet écarlate, elle fit voguer ses perles vers Sae Yeon avant de les darder à nouveau sur moi. Incrédule, je ne comprenais pas ce qui se passait entre elle et me contentais seulement de mettre toute mon énergie à la faire partir. « Jun, sois raisonnable… » Se rendait-elle compte qu’elle signait ainsi la fin de toute entente cordiale entre nous ? « Raisonnable ? Tu l’étais quand tu t’es pointée chez moi ? Tu l’étais quand tu as manqué de respect à ma grand-mère ? Tu l’étais quand tu t’es jetée sur moi dans l’espoir que l’on couche ensemble ? » D’un index pointé vers la porte, je lui intimais de partir. « Parce qu’il ne s’est rien passé ce soir-là donc ? Cesses de te voiler la face Jun, il y a eu quelque chose… » Avant même qu’elle ne puisse achever sa phrase, j’empoignais son bras et la fis sortir de force.

Je pris un instant pour m’adosser à la porte et réaliser l’ampleur de mon altercation avec Minji. Et soudain, je réalisais. La colère céda place à la panique. « Merde… » Alors que Sae Yeon s’approchait, je fus pris d’une crise d’angoisse si violente que j’en perdais mes repères. « Il faut que je m’excuse… il faut que je la rattrape… les lettres… » Je sentis une larme rouler sur ma pommette et tentais un regard vers Sae Yeon. « Si elle peut mentir sans honte, elle va donner mes lettres… si la presse tombe dessus… je suis fini… »

 

ootd - Pendant les heures qui avaient défilé, j'essayais de me concentrer sur le travail, sans laisser mon esprit vaguer à des idées trop précises sur ce qui se passerait lorsque je pourrais à nouveau être seule avec Jun, sans que le temps ne soit un obstacle à notre rencontre. C'était tellement rare... Je savais que je n'avais pas le choix que de m'en accommoder, mais plus je passais de temps avec lui, plus j'en avais envie, plus j'en avais besoin. C'était devenu une drogue, une nécessité comme l'air que je respirais... Et parfois, cela me faisait peur de devenir si dépendante de lui en si peu de temps. Je ne pensais pas que mes sentiments pour lui auraient un tel impact. C'était quelque chose que je ne parvenais pas à maîtriser... Mais je n'étais pas vraiment sûre d'avoir envie de le faire non plus.

Un à un, je venais délester les membres qui étaient avec moi de la couche de maquillage qu'ils avaient sur le visage. Il était temps qu'ils redeviennent eux-mêmes après cette longue journée de tournage. Après s'être rhabillés, les garçons se posèrent dans un coin pour papoter, attendant que les autres membres du groupe ne viennent les rejoindre. Et c'est précisément à ce moment-là que les fameux derniers arrivants firent leur apparition. Un sourire prit instantanément place sur mon visage qui avait dû s'illuminer malgré moi à l'instant même où Jun avait franchi la porte. Décidément... J'espérais que ce changement d'attitude passerait inaperçu. Je crois que lorsqu'il était dans les parages, il était bien difficile pour moi de cacher mes sentiments depuis que nous avions commencé à nous fréquenter... La bonne humeur semblait au rendez-vous de cette fin de journée. Les garçons riaient, Jun semblait dans un mood complètement euphorique et incontrôlable. Je ne pouvais m'empêcher de rire, même si je faisais une petite moue d'exaspération alors que monsieur s'amusait à se promener en caleçon dans la pièce pendant que je terminais de démaquiller ses bandmates. Et si tout semblait si bien se passer, c'est pourtant pile à ce moment-là que les choses basculèrent... Et que l'atmosphère changea du tout au tout en un claquement de doigts.

Je me décomposai totalement lorsque Minji pénétra soudainement dans la loge. Si avant elle avait souvent la décence d'attendre que les autres membres ne soient plus là pour faire son apparition, cette fois, elle n'hésita pas à faire irruption alors que tout le monde était encore là. À peine était-elle entrée qu'elle vint poser ses mains sur le corps dénudé de Jun, et je sentis une rage monter en moi instantanément. Inconsciemment, je fis un pas en avant vers eux, mais la réaction instantanée de Jun me stoppa avant que je ne m'interpose. Mon estomac se tordait sous l'environnement qui me submergeait littéralement. Je serrai le poing si fort que s'il tenait le moindre pinceau à ce moment-là, il se serait sans aucun problème retrouvé brisé en deux. Mes yeux ne pouvaient quitter cette scène surréaliste. Et je dus faire un effort surhumain pour ne pas balancer sur Minji la lotion démaquillante lorsqu'elle tentait d'embrasser Jun. Je me sentis figée face à cette scène complètement folle. Que venait faire Minji ici après tant de temps ?... Je maudissais cette partie de relation avec Jun qui me forçait à ne pas pouvoir intervenir sous peine de faire tomber le secret sur notre couple. Heureusement que je venais de terminer de m'occuper des derniers membres, je pense que là, actuellement, je serais incapable de faire quoi que ce soit correctement. Une rage folle grondait en moi alors qu'elle voulait faire croire à tout le monde que Jun et elle avaient couché ensemble cette fameuse nuit. Je fermai les yeux quelques secondes, afin de contrôler ma respiration et de ne pas faire quelque chose que je pourrais regretter par la suite. Pendant un instant, je croisai le regard de Minji qui semblait furieuse. Qu'attendait-elle au juste ? Que j'intervienne en sa faveur comme je l'avais fait chez Jun ? Si j'intervenais, je serais tellement méchante que je ne pouvais me permettre de dire la moindre chose pour le moment.

Les choses commencèrent à dégénérer, les autres membres du groupe avaient déserté la pièce, et j'aurais dû faire de même... Dans la logique des autres, j'aurais dû partir aussi. Mais impossible, mes pieds refusaient de bouger, je ne pourrais pas quitter cette pièce en laissant cette folle avec Jun. Je pouvais parfois sentir le regard du jeune homme sur moi... Peut-être s'inquiétait-il que je puisse croire aux affirmations de Minji... Mais non, jamais. J'avais confiance en lui, je savais très bien qu'il ne s'était jamais rien passé entre eux. Par contre, je comprenais qu'elle avait tenté... Et si cela ne me surprenait pas... L'apprendre ne fit que me mettre un peu plus hors de moi. Heureusement, l'altercation ne dura pas beaucoup plus longtemps. Et après avoir intimé une première fois à la jeune femme de s'en aller, c'est finalement par la force que Jun la força à quitter la loge. Je fus néanmoins surprise de l'avoir vu à ce point perdre son sang-froid. J'étais tellement prise par ma propre colère sur le moment que je n'avais pas mesuré l'ampleur de la sienne. Jun était quelqu'un de calme, il n'était pas du genre à perdre son sang-froid facilement, et j'avais largement pu le constater le long de ces quatre dernières années. Mais Minji avait poussé les choses beaucoup trop loin... Je compris donc qu'il ait pu s'énerver à ce point-là.

Lorsque nous nous retrouvions seuls, je sentais mes muscles lentement se décrisper de l'énervement qui les avait complètement tétanisés. Mais la colère fut rapidement remplacée par l'inquiétude. Jun se mit soudain à paniquer. Et si sur le moment je ne comprenais pas, c'est lorsqu'il mentionnait les lettres que je finis par tout comprendre. Je m'avançai vers lui alors qu'il semblait pris par une crise d'angoisse incontrôlable. Il avait peur... Peur que Minji dévoile les fameuses lettres, qu'elle ruine sa carrière. Il était prêt à lui courir après pour aller s'excuser... Mais... Non... Je m'en voulais instantanément de ne pas avoir réussi à lui dire la vérité plus tôt, on aurait pu éviter cette situation qui le mettait dans un état pas possible. Rapidement, je comblai l'espace qui nous séparait. "Jun... Jun, regarde-moi !" Lui dis-je en prenant son visage entre mes mains pour forcer son regard à s'ancrer dans le mien. "Calme-toi... Respire !" Il commençait à me faire peur, je ne pensais pas qu'il aurait pu perdre pied de cette manière. Mais je pouvais le comprendre. Si Minji avait bel et bien eu les lettres entre les mains, elle aurait pu fortement lui nuire, au point où elle aurait pu certainement ruiner sa carrière. Mais par chance, ce n'était pas le cas. "Il ne va rien se passer... Tu ne risques rien. Minji t'a menti depuis le début ! Ta correspondante... Ça n'a jamais été elle !" Je pouvais voir son regard surpris et perdu face à cette affirmation. Je soupirai... Ce n'était pas comme ça que je voulais lui apprendre... Je voulais que ça se passe dans un moment calme, d'intimité, propice à une compréhension mutuelle... Là je devais lui avouer alors qu'il était dans un état complexe, complètement apeuré et paniqué... Je savais que ce n'était absolument pas le bon moment pour qu'il accepte mieux la nouvelle, mais je n'avais pas le choix... Pour sa tranquillité d'esprit, je devais le faire, et maintenant. "C'était moi." C'était direct, mais il n'y avait pas trente-six façons de dire les choses. Je relâchai ma prise sur Jun et m'éloignai de lui. Je voyais bien qu'il était complètement incrédule, perdu. J'allai jusqu'à mon sac où j'avais rangé ma pochette contenant les lettres. Je la pris et revins vers Jun. Je lui donnai, ou plutôt rendis les lettres qu'il m'avait écrites pendant une année entière. "Elles sont là... Les lettres. Elles sont toutes là." Je sentis comme un poids se délester de mes épaules alors que je venais enfin de lui avouer une vérité que je retenais depuis trop longtemps... Mais maintenant, je pouvais sentir mon estomac se nouer d'une anxiété nouvelle. "Un jour, Minji a fouillé dans mes affaires, et elle a trouvé une de tes lettres. J'ai dû lui dire la vérité... Nous étions amies, je ne pensais pas qu'elle s'emparerait de cette histoire... pour t'approcher... Je suis désolée." Je m'étais légèrement éloignée de lui, voulant lui laisser l'espace nécessaire pour qu'il digère les choses... Évidemment, j'appréhendais beaucoup sa réaction. Le poids de la culpabilité n'avait jamais été plus lourd qu'actuellement. Je regrettais tellement de ne pas lui avoir dit plutôt... Je regrettais d'avoir cru que Minji était mon amie... Je regrettais tellement de choses. Mais je ne pouvais pas revenir en arrière. Actuellement, la seule chose que je pouvais faire, c'était le rassurer sur ce qui lui faisait peur, et qui ne pouvait pas arriver.

 

ootd - Tout s’était déroulé à une vitesse phénoménale… un accident que Minji provoqua et qui fit éclater ma voix comme un coup de tonnerre. J’ignorais ce qu’elle avait derrière la tête alors qu’elle me balançait les mensonges comme si je les admettrais. Une réalité qu’elle semblait s’être inventée car même dans mes souvenirs les plus flous, jamais je n’avais posé la main sur elle. Pris d’un torrent de colère dont je la gratifiais, sans pour autant comprendre comment nous avions pu passer d’une ambiance détendue et joyeuse à ce foutoir sans nom, j’avais l’impression de perdre la tête. Elle avait fait fuir ma grand-mère chez moi, et elle faisait désormais fuir le groupe dans notre loge. Je lui en voulais, à un point que je ne pensais jamais atteindre. Peu adepte de la haine et de la rage, elle faisait naître ces deux extrêmes dans une tempête que même ma patience ne savait dompter. La sensation de ses mains sur mes côtes, de ses bras autour de mon cou, de ses lèvres prêtent à conquérir les miennes, tout me donnait la nausée. Je l’avais apprécié, j’avais ri avec elle, j’avais chanté à ses côtés, j’avais partagé une amitié professionnelle et sans doute plus… un lien qu’elle venait de détruire par son avidité. Qu’attendait-elle ? Mon esprit ? Ma carrière ? Mon corps ? Je l’exécrais pour tenter de m’isoler, de faire de moi sa chose, un pantin prêt à céder au moindre de ses caprices… mais ne lui avais-je pas déjà céder un morceau quelques semaines plus tôt ? Ne m’étais-je pas mis moi-même dans cette situation impossible ?

Aucune conversation ne pouvait nous aider à passer cet orage sans heurt. Les éclats de voix résonnaient en écho dans la pièce jusqu’à ce que je ne puisse plus tolérer ses mensonges et ses excuses. Des propos délirant dont elle m’affublait et dont j’espérais me tirer indemne. Je pris un instant pour souffler une fois mise à la porte. Mais alors que j’entrevoyais cette victoire, je la regrettais aussitôt amèrement. Je prenais conscience de l’ampleur de la merde dans laquelle je venais de me mettre. Je comprenais pourquoi, quelques semaines plus tôt j’avais cédé et laissé jouer avec moi. Les lettres. Sae Yeon avait pris une place si importante que j’en avais oublié ce qui m’avait poussé à accepter le comportement de Minji. Elle était ma correspondante, celle à qui j’avais confié mes doutes, mes peurs et mes instants de joie fugaces. J’avais couché sur papier tout ce qui me torturait, les démons d’une dépression dont je peinais à sortir. Je lui avais donné les pleins pouvoirs sur moi, ma vie, ma carrière et cette réalité me frappait de plein fouet. La panique se dilua comme un poison dans mes veines et je suffoquais à l’idée qu’elle puisse se servir de mes confessions contre moi. Je la connaissais sans savoir de quoi elle était capable, mais le petit aperçu dont elle m’avait donné un avant-goût me fit perdre pieds.

Saisi de tremblements, l’estomac noué, le cœur pincé, la respiration scabreuse, j’avais la sensation que mon corps entier me lâchait. Elle va mettre fin à ma carrière… pensais-je. J’en étais persuadé, elle ne laisserait jamais passer une telle occasion… qui le voudrait ? Les larmes m’échappèrent sans que je ne m’en rende compte. Devant mes yeux embués, je distinguais Sae Yeon et d’un souffle, j’énonçais la triste réalité qui m’attendait. Je devais m’excuser… mais à quel prix ? Me mettre à genoux ? À plat ventre ? Réclamerait-elle une nuit en échange de son silence ? Je fus pris d’une nouvelle nausée alors que dans mes pensées se dessinaient des scénarios tous plus sordide les uns que les autres. Etait-elle réellement capable d’un tel chantage ? Je l’ignorais, mais je ne pouvais écarter cette éventualité. Je paniquais, une crise d’angoisse puissante, destructrice, elle ravageait mes sens et ma conscience. « Il faut… il faut que je la rattrape… qu’est-ce que je lui dis ? Comment je répare ça ? Est-ce qu’elle va me pardonner ? Qu’est-ce que j’ai fait… »

Si j’avais cru que ma dépression était la pire période de ma vie, je comprenais qu’un avenir sombre se présentait désormais à moi. Je tentais de maîtriser ma respiration hachée alors que les mains de Sae Yeon vinrent encadrer mon visage. De sa voix douce, elle appelait au calme qu’elle savait faire naître en moi… en vain. Je ne pouvais me concentrer sur elle, pas alors que j’imaginais déjà la horde de journaliste me fusiller de leurs caméras, me condamner de leurs articles et détruire ce pour quoi je m’étais battu depuis dix ans. Si ses mots me parvenaient étouffés, certains de ses mots se répercutaient en écho dans mon esprit. « Que… quoi ? » parvins-je à articuler. Que voulait-elle dire ? Qui m’avait menti ? Quelle correspondante ? Je posais sur elle un regard empli d’une douleur abyssale. C’était moi… J’eus l’impression d’entendre cette phrase comme si elle avait été hurlée. Aussitôt, les tremblements cessèrent, et le monde était devenu silencieux. Je ne comprenais pas… Ses mains laissèrent mes joues orphelines et je l’observais aller jusqu’à son sac. Perdu, incrédule, complètement désorienté d’une annonce aussi brutale qu’étrange. Elle en tira une pochette qu’elle vint me tendre. Avec hésitation, je la saisissais sans pour autant l’ouvrir. Je ne comprenais toujours pas, ou était-ce mon intellect qui ne savait plus intégrer la moindre information ? Mes yeux voguèrent de son visage à la pochette qui gisait entre mes doigts, et d’un revers de manche, j’essuyais mes joues inondées. « Mes… lettres… ? » Mais l’aveu ne s’arrêtait pas à cette simple évidence. Elle confessait alors comment Minji avait pu se payer ma tête, comment elle s’était servi de moi et de Sae Yeon.

D’une simple curiosité, elle avait pris le pouvoir, elle m’avait aliéné sur une imposture dont je peinais à prendre la mesure. Dans des gestes hésitants je tirais sur les élastiques et découvrais la pile de lettres donc je reconnaissais l’écriture. Mon écriture. Mon cœur loupa un battement en saisissant enfin ce qu’elle venait de m’offrir : ma liberté. Je n’avais aucune raison de craindre Minji, et les pièces du puzzle se mettaient finalement en place. Je comprenais pourquoi Minji avait été si réticente à me répondre alors que je le lui demandais. Je comprenais pourquoi il m’avait semblé si étrange qu’elle vienne vers moi alors que je l’avais repoussé dans mes derniers écrits. Mes lèvres se fuyaient et j’étais incapable de contenir la surprise et le choc de cette nouvelle face à la brune. « C’est… toi…. ? » soufflais-je finalement. À la fois soulagé et interloqué, je plongeais dans ses iris voilés de culpabilité. « C’était toi… mais… pourquoi ? » Nerveusement, je feuilletais les pages que j’avais noircis, et je constatais qu’elles étaient toutes là. De nos premiers échanges, de courts paragraphes qui s’étaient vite mués en courriers à la longueur digne d’une nouvelle ou d’un roman. « Pourquoi tu n’as rien dit ? » La question filtra mes pulpeuses alors même que la réponse se fraya un chemin dans ma mémoire. Je l’avais repoussé. J’avais nié ses sentiments et lui avais répondu par la négative. J’avais refusé de lui accorder ce que je lui avais pourtant cédé.

Mes émotions se brouillaient, et j’étais désormais incapable de comprendre ce que j’éprouvais. La panique, l’angoisse, et le choc d’une révélation inattendue me rendaient amorphe. À nouveau, je posais sur elle mes yeux assombris par la douleur et j’esquissais quelques pas pour tenter de reprendre contenance. Je m’éloignais d’elle sans le vouloir et lui tournais le dos dans l’espoir de démêler le nœud de mes pensées. Elle était ma correspondante, celle qui m’avait permis de garder la tête hors de l’eau, de ne pas sombrer dans une dépression profonde. Elle m’avait guidé jusqu’à ce que je puisse reprendre un semblant de confiance. Elle avait été la première et la seule à me soutenir sans condition, mais je ne pouvais m’empêcher de voir qu’encore une fois, c’était par le mensonge. Fébrile, je faisais les cents pas dans la loge, comme pour calmer le flot de la peur irrationnelle. « Tu… » tentais-je. Mais aucun autre son ne filtrait mes pulpeuses. J’expirais quelques onomatopées en guise de conversation jusqu’à finalement interrompre ma course folle contre l’affliction de cette impression de trahison. Au fond de moi, je savais qu’il était impossible pour Sae Yeon d’avoir agi de pair avec Minji. Mais je découvrais aussi l’ampleur de ses sentiments, ceux qu’elle m’avait livré sur le papier, alors que je pensais simplement profiter des frémissements d’une idylle naissante, elle avait apporté avec elle une affection à la profondeur dont je ne pouvais faire écho. Pas encore. « Je… il faut que je rentre… » Ce n’était pas ce que je voulais dire, et pas non plus ce que je souhaitais, mais tout était si confus que c’était encore ma meilleure option. J’agrippais la pochette et la serrais contre moi comme si je redoutais qu’elle ne veuille la reprendre et passais devant elle. « À plus tard… » soufflais-je mollement. J’oubliais la promesse à laquelle je l’avais forcé. J’oubliais les ébats de ce midi. J’oubliais ma témérité et ce moment volé en sa compagnie. Pris de vertiges, je quittais la pièce sans réellement en avoir conscience et laissais derrière moi la moitié de mes affaires.


 

ootd - Malgré mes mots, mes encouragements, j'avais la sensation que c'était peine perdue, que Jun ne parvenait pas à se calmer, à respirer. Mais lorsque j'ai enfin prononcé les choses, quand j'ai avoué que sa correspondante, c'était moi et non Minji, je l'ai vu changer du tout au tout. Son visage inondé de larmes m'a broyé littéralement le cœur, et je l'ai enfin vu reprendre vie alors que l'information commençait à se frayer un chemin jusqu'à son cerveau. Pour appuyer mes dires, je suis directement allée chercher la pochette dans laquelle j'avais soigneusement conservé toutes ses lettres au fil des mois, absolument toutes, aucune ne manquait à l'appel de la première jusqu'à la dernière qu'il m'avait écrite. Même si je doutais qu'il remette en question mes dires, je pense qu'il était important que je lui apporte cette preuve... Et surtout que je remette entre ses mains ce qu'il craignait tant de voir ruiner son avenir. Je l'avoue, cela m'a fait un peu mal au cœur de les lui donner toutes. Ce n'était pas pour rien que je les avais gardées si précieusement, j'y tenais vraiment beaucoup. Je les relisais parfois... Mais pour son bien, même si cela avait été compliqué, je les lui avais rendues. Je ne savais pas ce qu'il en ferait... Peut-être les détruirait-il pour être rassuré? Cette simple pensée m'arrachait une douleur... Mais je devais me faire à l'idée que je ne reverrais certainement jamais ses lettres qui m'étaient destinées, et qu'elles ne subsisteraient maintenant que dans ma mémoire.

Mes yeux suivaient chacun de ses gestes alors qu'il ouvrait enfin ce que j'avais mis entre ses mains pour constater la réalité... Il était choqué, et c'était tout à fait légitime. Soulagé sûrement, mais la surprise était bien évidemment totale... Et la question... Cette question que je redoutais mais qui, bien sûr, je le savais, serait posée. Pourquoi?.. Pourquoi ne pas lui avoir dit plutôt pour la supercherie de Minji? "J'ai voulu... Mais... Minji était mon amie Jun... Je voulais comprendre pourquoi elle avait menti et lui laisser une chance de t'avouer les choses elle-même si elle tenait vraiment à toi... Mais il s'est avéré qu'elle avait juste fait ça pour te séduire et qu'elle s'était servie de moi pour y arriver... Vraiment, je suis désolée ..." Je pouvais encore sentir la douleur que j'avais éprouvée lorsque Minji avait été odieuse avec moi, et que j'avais compris que cette amitié que nous partagions n'avait absolument aucune importance pour elle... Si j'avais su, j'aurais parlé à Jun tout de suite... Mais je suis trop gentille, et j'ai voulu croire en une fausse amitié avec cette femme... Et aujourd'hui, même si elle n'était pas présente, elle parvenait à créer une distance entre lui et moi, je le sentais bien, je n'étais pas stupide.

Il se remit en mouvement, passant près de moi sans me regarder, pour finalement me tourner le dos. De mon côté, je ne le quittais pas des yeux, recherchant le moindre indice, guettant ses moindres réactions... Mais il semblait bien plus perdu que dans toutes les prévisions que j'avais pu faire de ce moment. Mon cœur se serrait de plus en plus à cause de l'anxiété de cet instant. Il retrouvait finalement l'usage de la parole... Pour me dire qu'il devait partir. "Mais Jun..." tentai-je alors qu'il prenait déjà le chemin de la sortie. "Jun, attends !" Je tentais dans un geste désespéré de le rattraper, mais me retenais au dernier moment. Et voilà, il était littéralement en train de me fuir. Il était simplement parti... Comme ça... Il m'avait laissée plantée là avec mes doutes, mes interrogations, et cette peur au creux de l'estomac... Est-ce que je venais de le perdre?... Mon cœur protestait à cette pensée, pas encore décidé à y croire totalement. Je sentais les larmes qui commençaient à monter, mais je les retenais... Je ne devais pas me laisser aller... Pas tout de suite... Il avait besoin de digérer, besoin d'encaisser...

Est-ce que j'avais follement cru que peut-être il reviendrait vite à la raison et qu'il honorerait sa propre demande en venant me voir un peu plus tard à l'atelier? Oui... J'étais naïve, n'est-ce pas? Ou alors je cherchais simplement à repousser l'échéance d'un cœur qui commençait petit à petit à se briser. J'avais récupéré les affaires que Jun avait oubliées et les avais proprement posées dans un coin de l'atelier après y être retournée. Nous étions en milieu de soirée, et après être sortie avec une collègue pour manger plus que rapidement, je m'étais précipitée jusqu'à mon lieu de travail... Qui était désespérément vide. J'avais presque couru pour y arriver, mais mes dernières lueurs d'espoir s'étaient envolées au moment où la porte s'était ouverte sur une pièce noire et vide de toute occupation... Il pouvait encore venir, n'est-ce pas? Je m'installai donc à mon poste de travail et entrepris de continuer un travail que j'avais entamé quelques jours plus tôt. Je devais absolument m'occuper l'esprit... Mais alors que mes yeux se posaient sur la pendule et que le temps défilait... Je commençais lentement à réaliser qu'il ne viendrait sûrement pas... Et que je l'avais très certainement perdu... Il ne l'avait pas dit clairement mais je l'avais bien senti...  Un dernier coup d'œil à mon téléphone me signifiait qu'il n'y avait rien, pas de message, pas de manifestation... Absolument rien. Les larmes se mirent à couler malgré moi. Je quittai ma place pour venir m'asseoir sur le futon. Rabattant les genoux vers mon buste, je vins enfouir mon visage entre mes bras alors que je laissais se déverser toute la tristesse et l'amertume qui m'animaient. Je sais que j'aurais dû lui dire les choses plus tôt... Mais méritais-je de le perdre pour ça? Je l'aimais tellement... Je pouvais entendre les morceaux de mon cœur se briser dans ma poitrine... Et ça faisait un mal de chien. Jun... Est-ce que tout est réellement terminé?

 

ootd - Peu importait les explications, je n’étais pas en capacité d’en saisir le sens. Je ne voyais que la pile de lettre devant mes yeux écarquillés. Ces feuilles que j’avais perçues comme de réelles armes lorsque je pensais encore que Minji les avait en sa possession. Si je comprenais la supercherie, je peinais à assimiler le plan qui avait nourrit ses envies. Me séduire… pour quelle raison ? Ça n’avait aucun sens… Et quand bien même elle voulait nouer plus qu’une simple amitié, n’était-ce pas plus facile d’avouer plutôt que de s’inventer une autre identité ? Je déglutissais avec peine alors que je tentais de digérer toutes ces informations, mais je me laissais submerger par un tsunami d’émotions en désordre. Assailli de toute part, ma conscience, mon intellect et toute rationalité paraissait avoir déserté. Je passais en mode automatique et finalement, je quittais la pièce sans même un regard en arrière. Je savais que je m’en voulais d’agir ainsi, mais j’ignorais comment faire remonter à la surface cette notion de conscience qui me tiraillait. Elle était semblable à une flamme vacillante en plein cœur d’une tempête.

Par réflexe, je me dirigeais jusqu’à chez moi. Je n’étais plus maître de mon corps et me laissais porter, déconnecté de la réalité. Sans force, je poussais le battant pour retrouver le reste du groupe qui m’attendait visiblement. « Jun… » « Qu’est-ce qu’il s’est passé ? » « C’est quoi cette histoire ? » « Pourquoi tu n’es pas démaquillé ? » Ils m’attaquaient de mille et une questions. Je ne comptais pas répondre, c’était au-dessus de mes forces. S’ils semblaient tous fébriles et inquiets, un seul gardait sa constance et se contentait de me regarder les bras croisés sur son buste. « Jun… » lâcha-t-il. Le calme de sa voix me fit frissonner et je redoutais la suite de son discours. « Tu as couché avec Minji ? » Pris au dépourvu pour la énième fois, et sans doute la fois de trop, je manquais de lâcher la pochette que je tenais fermement entre mes mains. « Non. » répondis-je sur un ton faussement calme. Mon cœur se tordait alors que j’observais mes amis et collègues, ceux en qui Minji avait distillé le poison du doute. « Elle est venue ici et tu veux nous faire croire que tu n’as rien fait avec elle… c’est… Minji ! » J’en avais assez. Assez d’entendre les avis et les besoins des autres, assez de devoir répondre d’un acte que je n’avais pas commis, assez de devoir faire face aux mensonges et aux suspicions infondées. « Elle est venue ici, elle a fait une scène devant ma grand-mère et je l’ai congédié, si tu veux contenter ton imagination, il va te falloir trouver quelqu’un d’autre, parce que je n’ai rien de plus à raconter. » Avant qu’il ne puisse répliquer de nouveau, je m’enfermais dans la salle de bain pour enfin me débarrasser de mon maquillage. J’en ressortais quelques minutes plus tard, toujours accroché à ma pochette. C’était idiot… personne ne voudrait me la prendre, personne ne s’y intéressait, mais une partie de moi redoutait qu’elle ne me soit subtilisée. « Je pense qu’il faut appeler Hyung… s’ils s’est passé quelque chose entre eux… » « LA FERME… » hurlais-je malgré moi. Devais-je vraiment supporter ces soupçons et accepter qu’on ne m’impose une vérité erronée ? « Pour la dernière fois, je n’ai pas touché Minji… Si vous êtes en manque d’histoire de ce genre, il va falloir vous adresser à Min Seok, c’est sans doute lui le mieux placé vu le nombre de femmes qui sont passées dans son lit… » J’attaquais sans vergogne le plus grand séducteur du groupe. Celui-là même qui me toisait du regard, celui qui avait eu les paroles de trop.

J’étouffais, et sans un mot, je quittais l’appartement. Je pressais contre moi la chemise en carton et bravait la fraîcheur de la nuit. Je m’autorisais à errer quelques heures, avant de m’installer sur une balançoire. Dans cet espace désert, je relisais chacune de mes lettres. J’avais dévoilé bien plus de moi dans ces échanges que je n’avais bien voulu l’admettre. J’y avais confessé mes doutes et mes peurs les plus douloureuses et je ne pus retenir la larme qui roulait sur ma joue. Je ne craignais plus que ces morceaux de papier ne tombent entre de mauvaises mains, et j’en saisissais une poignée, prêt à les déchirer, mais interrompais mon geste avant de commettre l’irréparable. Le soupire brûlant m’échappait alors que je comprenais combien ces lettres avaient été salvatrices. Grâce à elles et à Sae Yeon, je m’étais relevé d’une maladie qui m’avait rongé. Sae Yeon… J’eus la sensation d’être tiré de ma léthargie et me redressais finalement. Je rangeais les courriers et reprenais la direction de l’agence. M’attendait-elle ? Je me souvenais de la promesse et mon subconscient déroulait alors le film de ma journée. Ces moment de plénitude, de sérénité, de joie… comment en étions-nous arrivé là ? Mon cœur frappait contre mes tempes sur le rythme de mes pas, incertain de ce que je voulais. Si elle n’était pas venue… et si au contraire elle attendait déjà… ?

J’avançais dans la pénombre des couloirs de l’agence. Il n’y avait plus âme qui vive à cette heure-ci, et j’appréciais bien davantage le calme des lieux. En silence, j’empruntais le chemin qui me menait à son atelier, et je fus surpris de voir un filet de lumière filtrer le seuil de la porte. Mon muscle battant s’affolait déjà alors que je posais une main tremblante sur la poignée. Je restais figé ainsi quelques minutes durant lesquelles les questions du groupe tournaient en boucle dans mon subconscient. Ils avaient des doutes et je ne pouvais pas leur en vouloir. Minji avait lâché sa bombe et n’importe qui avait le loisir d’y croire… ou non. Derrière la porte, Sae Yeon attendait, et ce fut l’angoisse qui motiva mon geste. Je lâchais le métal et reculais d’un pas. Que fallait-il faire ? Quelle décision prendre ? Je l’ignorais. Mes yeux glissèrent vers la pochette et je décidais de me laisser le temps de faire face à cette histoire surréaliste. Dans un sursaut de conscience, je la laissais tomber bruyamment et fuyais pour me cacher derrière la première porte qui se trouvait sur mon chemin. Dans l’embrasure de la porte je m’assurais que la styliste récupère mes précieuses confessions, mais je sentis mon myocarde se fendre en la voyant, les yeux rougit alors qu’elle récupérait son bien en cherchant par où j’avais bien pu fuir de nouveau.

Mais que faisais-je ? Me cacher comme un voyou et surveiller celle qui m’avait sauvé de moi-même…



 

ootd - Je me flagellais mentalement pour tout ce qui s'était passé, même si c'était totalement inutile. Le visage enfoui, je laissais aller mes larmes à couler, déversant la tristesse que ressentait mon cœur après cette scène complètement surréaliste. Nous étions pourtant si bien aujourd'hui... Nous avions enfin pu passer quelques moments seuls tous les deux, on avait enfin du temps pour nous et... Minji est arrivée et a tout gâché... En soi, est-ce que cela me surprenait réellement? Dire oui serait le plus vilain des mensonges. C'est toujours ce qu'elle faisait, c'était presque devenu sa marque de fabrique. J'avais naïvement cru qu'elle avait compris quand Jun avait "rompu" avec elle. Qu'il n'y avait plus que lui et moi... Mais c'était sans compter sur la tête de mule imbu d'elle-même qu'était la jeune chanteuse. C'était trop facile... Qu'elle parte comme ça, on aurait dû se douter que quelque chose clochait. Je savais qu'elle était partie pour une mini tournée... Il faut croire que c'est la seule raison qui l'avait éloignée de Jun si longtemps...

Il fallait que j'arrête de penser à elle, ça ne faisait qu'ajouter de la colère à tout ce que je ressentais déjà, et ce n'était pas ce que je voulais... J'aimerais essayer de me calmer, de relativiser, de ne pas penser au pire qui puisse se passer... Le fait qu'il parte comme ça... Ça ne voulait pas forcément dire que notre relation était complètement terminée... Il avait juste besoin de temps... Pas vrai?... Alors pourquoi mon cœur ne pouvait-il s'empêcher de se serrer douloureusement dans ma poitrine. Si seulement il était venu... Oui, s'il était venu pour m'expliquer... Me dire les choses... Même si c'était juste pour me dire qu'il avait besoin de temps avant qu'on se revoie... Être ainsi laissée dans l'ignorance de la suite me rendait presque malade. Je détestais ce sentiment d'incompréhension et d'impuissance face à la situation actuelle. C'est sur cette pensée que, soudain, j'entendis un bruit sourd à l'extérieur, un bruit qui me fit légèrement sursauter sur le moment, me faisant relever la tête, cherchant à comprendre sa provenance. Lentement, je me levai et m'approchai de la porte... A cette heure-ci, les locaux étaient déserts. Est-ce que ça pourrait être... "Jun...?" J'essuyai mes larmes avant de rapidement ouvrir la porte de l'atelier... Pour me rendre compte avec désarroi que personne n'était derrière celle-ci. Qu'est-ce que j'ai cru?... Franchement... J'allais fermer... Lorsque quelque chose à terre m'interpela... Je me baissai pour me rendre compte que c'était... Ma pochette ?? Celle qui avait contenu les lettres de Jun. Je la récupérai avant de l'ouvrir... pour constater avec une immense surprise qu'elle contenait toujours les lettres... Mais si elle avait atterri ici, ça voudrait dire... Que Jun était venu ? Etait-il encore là ? Sans vraiment chercher à réfléchir, je courus dans le couloir pour voir si j'arrivais à l'apercevoir un peu plus loin, si je pouvais le rattraper... Mais alors que j'arrivais à l'angle, rien... Il n'était déjà plus là... Je serrai un instant la pochette contre moi... Jun... Pourquoi n'était-il pas entré ? Je revins avec beaucoup plus de lenteur sur mes pas, avant de refermer derrière moi la porte de l'atelier.

Reprenant place sur le futon, je regardais avec perplexité ce que Jun venait de me rendre... Pourquoi ? J'étais persuadée qu'il les aurait détruites pour se rassurer... Évidemment, je fus contente qu'il ne l'ait pas fait mais... J'avais l'impression de ne plus rien suivre, de ne plus rien comprendre. Je me doutais que ce qu'il venait de faire était la preuve d'une marque de confiance, il ne pouvait en être autrement... J'étais maintenant condamnée à attendre qu'il finisse par revenir vers moi... Même si ce n'était qu'un mot, un message, une manifestation... Je détestais ce genre de situation... Je détestais me sentir impuissante comme ça... Tout reposait maintenant entre les mains de Jun... Je ne le contacterais pas, je ne ferais rien de mon côté... Je savais que c'était à lui de revenir vers moi lorsqu'il le voudrait... Lorsqu'il se sentirait mieux... Mais j'avoue que je ne savais pas combien de temps ma patience tiendrait. Et c'est finalement le cœur empli de doutes, de questions et de tristesse que, sans m'en rendre compte, je finis par m'endormir sur le canapé, la pochette des lettres collée contre mon cœur... Demain serait un autre jour.