outfit ❀ Elle ne devait pas se faire de films. Litanie qu’elle se répétait en boucle alors que son cœur n’écoutait décemment plus sa raison, tambourinant solitaire comme un traître tandis que les mots couchés sur les papiers, promesse de rendez-vous, flottaient dans ses iris et embaumaient l’air de printemps. Il n’avait pourtant pas dit grand chose, seulement un lieu, une heure… et une fleur, qu’elle s’était empressée de faire sécher entre deux pages d’un ouvrage, la fertilité d’un esprit qu’elle ne se connaissait guère les imaginant déjà se balader à deux sous l’allée d’épais cerisiers. Elle n’avait pourtant jusqu’alors jamais vraiment versé dans le romantisme. Encore moins attendu un homme ou rendez-vous avec quelconque impatience, ces derniers les lassant plus sûrement que toute autre chose. Sauf Woobin Oppa, évidemment, mais lui… lui était dans une case à part, le sourire fleurissant sur ses lèvres pulpeuses alors que sa silhouette dansait derrière ses paupières closes. Un bref instant avant qu’elle ne soupire à s’en fendre l’âme, le principal intéressé revenant au galop. Mais à quoi devait-elle s’attendre, au juste ?

La tenue choisie avec minutie pour qu’elle ne fasse ni trop débraillée ni trop féminine, gardant tout de même la jupe et cette touche de rose qui ravissait son teint tel un bourgeon de qualité, elle repassait en boucle ces dernières semaines en quête d’un indice. Répondait-il à son ultimatum par l’affirmative ? Était-ce que signifiait tous ces cafés offerts et gentillesses peu coutumières entre eux ? Ou était-ce au contraire sa façon de s’excuser de l’avoir insultée, et plus encore de l’avoir embrassée ? Une casse-tête qu’elle n’aimait trop ressasser inlassablement, le myocarde hurlant le premier quand l’esprit rationalisait le second. Ne sachant où se positionner et qu’attendre de lui, lèvre mordillée sur le trajet tandis qu’elle se forçait à sembler confiante. Ne pas laisser transparaître ses fissures, un art dans lequel elle avait toujours excellé, comme celui de toujours garder la tête froide et réfléchir avec cette dernière, non le cœur. Comme quoi certains toujours avaient des fins, ou du moins des coupures, qui en cassaient purement le sens. Peu importait. Aujourd’hui, elle tirerait au clair toute cette histoire.

Arrivant enfin à ladite fontaine se tenant au centre de cette fête foraine de fortune installée pour l’occasion, n’en ayant nullement eu vent. Une ambiance pour le moins festive qui lui met du baume au cœur et de la joie aux papilles, les effluves dessinant ses charnues en croissant de lune tandis que ses orbes fauves cherchaient vivement le coupable de tous ses maux. Serait-il en retard après l’avoir ainsi invitée ? Elle espérait que non, ses sourcils se fronçant brièvement avant de le capter au stand d’à côté. Du tir ? Il semblait… horriblement peu doué, loupant toutes les cibles et s’énervant de concert, un pouffement s’échappant de la barrière de ses lèvres, mordues aussitôt. Que tentait-il de faire, au juste ? S’était-il laissé happer par le jeu en l’attendant, au point de ne plus vouloir perdre ? Elle n’avait pourtant que dix petites minutes de retard, tendant à tester sa patience… s’avançant finalement à sa rencontre et demandant une carabine le plus doucement possible, espérant là passer inaperçue face à la concentration dérisoire qu’il y mettait. Un manège qui fonctionne puisqu’il ne tourne nullement la tête, mettant alors l’arme en joue et tirant sur la cible qu’il venait encore de rater, faisant directement mouche. Le jouet est baissé, le minois tourné à son encontre, sourcil haussé, tandis que la moue narquoise conquiert son visage, sa fossette se relevant insolemment. « Tu m’as fait venir pour que je te donne des cours… oppa ? » Appuyant délibérément sur les dernières syllabes, réminiscences de cette conversation où il avait laissé entrapercevoir vouloir pareil sobriquet. Qu’il ne se leurre toutefois pas ici, elle le narguait, se rapprochant de lui d’un pas avant de papillonner des cils en un mouvement de charme calculé. « Tu veux peut-être que je t’en abatte une autre ? Dis moi laquelle et je t’aiderai. » Les mots devenant au fur et à mesure murmure, secret partagé avec candeur, le jeu reprenant le pas en une habitude ancrée pour faire taire les maux du cœur.

outfit ❀ L’anxiété l’habite tout entier. Et son pied, en rythme avec les musiques qui s’échappent d’un manège au loin, ne cesse de taper violemment le sol.

Il ne ferait aucun doute à n’importe qui poserait plus d’une seconde son regard sur lui, qu’Hansoo est nerveux. Plus nerveux qu’il n’oserait l’avouer à n’importe qui, et surtout pas à sa sœur s'il l'avait croisée, elle qui aurait vu dans son regard fuyant un aveu qu’il n’était pas prêt à faire.

Où est-ce que tu vas habillé comme ça?... Qui est l’heureuse élue?, si ce n’était pas Nabi ça aurait été le reste de sa famille qui l’aurait harcelé, d’autant de questions auxquelles il n’aurait su répondre. Sachant avec amertume l’image qu’il peut avoir auprès d’eux, qui ont vu défiler tant de copines aux penchants étranges, et se refusant à ce qu’ils mettent Mirae dans le même panier.

Il aurait bien pu nier en disant qu’il n’y avait aucun rapport. Mirae était sa collègue, peut-être son amie, bien que leurs chamailleries incessantes aient pu prouver le contraire. Mais elle le lui avait demandé: le désir de sincérité aurait soigneusement scellé ses lèvres, là où les sentiments, sans qu’ils ne puisse les empêcher, enserraient son cœur d’une toute autre mélodie.

Un long et douloureux soupir lui échappe. Ses doigts, à force de serrer le papier qui entoure les tiges des fleurs qu’il a achetées sur le chemin, commencent à lui faire mal. Et il est venu en avance: bien trop en avance. Ayant scellé sa torture alors qu’il aurait pu jouer aux jeux vidéos ou parler avec un de ses amis, sans parvenir réellement à se concentrer. Alors que les minutes s’égrènent, son regard s’égare, et lorsqu’il se pose sur une énorme peluche de chien au stand juste à côté de la fontaine dont le son, il doit l’avouer, commence à lui taper sur les nerfs…

Il ne peut que craquer entièrement.

Un nouveau soupir lui échappe avant qu’il ne s’éloigne en direction du stand. Mains posées si fermement sur le comptoir qu’il en fait sursauter les gens à côté de lui, Hansoo tend le bouquet au gérant sans aucune hésitation. “Gardez ça pour moi, s’il vous plaît.” lance-t-il avec un regard qui laisse tout à deviner de sa détermination. Il ne vient pas acheter une simple peluche, non. Il vient se mettre en guerre.

Quelque peu décontenancé, le vieil homme acquiesce et pose le bouquet, “non, pas là, il va s'abîmer…”, alors dans une autre boîte, “mais vous êtes fou, elle est pleine de poussière…” avant que Hansoo se satisfasse d’une place de choix au fond, là où rien ne pourra les blesser. “Parfait.” souffle-t-il avec un sourire suffisant, avant de se concentrer sur la tâche devant lui. “Une arme, s’il vous plaît.” Il n’aurait pas pu dire ça de manière plus sérieuse.

Son œil se plante dans le viseur. Ce n’est pas une peluche qu’il veut, c’est celle-là. Et bien évidemment, il se trouve qu’elle est de celles les plus difficiles à gagner, aux cibles inatteignables. Qu’à cela ne tienne: il est un pro.

Boum.

“héééé, c’est pas grave, c’est la première fois, ça arrive à tout…” Le gérant se reçoit le regard le plus noir qu’il a jamais pu recevoir de sa vie.

Hansoo se concentre à nouveau.

Boum.

Le ricanement du gérant l’agace. “C’est vous qui me déconcentrez.” ne peut-il s’empêcher de lui lancer sans gêne, laissant l’inconnu pincer les lèvres avec acharnement. Cette fois, rien ne l’empêchera de rater.

C’est ce qu’il se répète au bout de son 43è tir, son porte monnaie presque vide. “Vous devriez abandonner…” “Jamais!” répond-il en se penchant une nouvelle fois, percevant le doux parfum qui vient s’imposer à ses côtés et qui vient serrer ses entrailles, sans qu’il ne se l’explique. Concentration, il souffle, et…

ça touche. Parfaitement. “Je le sa-” commence-t-il pour s’exclamer de joie, avant de comprendre.

Ce n’est pas son tir qui a touché. Pas du tout.

Ses paupières papillonnent alors que son visage se tourne en sa direction. Vision qui lui fait perdre ses moyens un instant, obligé de secouer légèrement la tête pour se reprendre. “Mirae?...” vient-il souffler comme un idiot, soudainement conscient de sa tenue, de sa position, de son… tout.

Il était censé l’attendre devant la fontaine, comme un prince charmant, son regard s’emplissant de milles étoiles lorsqu’elle se serait avancée vers lui. Il n’était pas censé faire…. ça!!

La panique le prend tout entier.

“Mirae!” et il se redresse pour la regarder sans détours. Hansoo fait de son mieux pour éteindre la panique qui semble vouloir prendre part de chacun de ses traits, mais ne parvient pas à arrêter ses clignements de yeux compulsifs lorsque le mot oppa s’échappe jusqu’à ses oreilles. “Op…” commence-t-il en balbutiant, se demandant s’il ne s’est pas évanoui à cause de l’effort et si tout cela n’est pas un simple rêve.

Si elle doit en abattre une autre? Le regard de Hansoo, péniblement, se tourne en direction des peluches. Alors que le gérant pousse l’énorme chien en direction de Mirae, une moue penaude vient maquiller ses traits. “En fait… C’était…” celle là que j’essaie d’avoir depuis trente minutes, celle là que je voulais gagner pour toi, et maintenant tout est… “Les fleurs!” s’exclame-t-il en se tournant d’un coup en direction du gérant. “Les fleurs.” répète-t-il en hochant de la tête, main tendue en direction du vieil homme pour qu’il puisse s’en emparer et les lui rendre. Bientôt, cet affreux papier chiffonné retrouve sa paume, mais cette fois-ci, il en ressent du soulagement.

Même sa tenue doit être défaite. Hansoo tente de remettre son col en place, avant de se mettre face à Mirae. “Tes fleurs…” souffle-t-il en les tendant en sa direction. Son regard, inévitablement, se perd en direction du chien. Sans honte, il s’en empare et le tend tout autant vers elle, comme s’il ne lui appartenait pas déjà. “... Ton chien.” C’est que si on part sur la quantité d’efforts, c’est lui qui l’a gagné, non? Ce n’est pas celui qui donne le dernier coup au bouchon de la confiture qui récolte les lauriers !!

Il finit par s’éclaircir la gorge, gêné. Quel était son discours? N’avait-il pas préparé ses mots?... Un long silence, gênant, s’étire. Puis, il se rappelle ce qu’il convient de faire, au début de chaque rendez-vous.

Hansoo fait un grand pas en arrière, si étiré qu’il en est comique. Puis, son regard descend le long de la tenue de Mirae, avant de remonter. Bien. “Tu es…” L'envie de lui signifier que sa vision accélère son coeur et chauffe inconfortablement ses joues. Mais le Hansoo revient inévitablement à l’appel, petit claquement de langue pour signifier à quel point elle est jolie, et un pouce en l’air pour le lui signifier. Il n’y a rien de classe à ça, et même lui s’en rend compte, relevant la main qui a servi au pouce pour venir se gratter la nuque avec gêne. “Et moi?...” finit-il par demander avec le moins de gêne possible au monde, écartant les bras et faisant un tour sur lui-même pour qu’elle puisse juger de ses efforts.

outfit ❀ Elle doit l’avouer, face à sa mine déconfite et son incompréhension totale de la situation, la nymphe se sent monarque et conquérante, s’amusant un peu trop de son prénom soufflé une, puis deux fois, comme s’il avait aperçu quelconque fantôme. Le sourire vient ourler ses croissants de lune, amusement distillé jusque dans la flamme de ses iris qui danse agréablement tandis que la panique l’assaille, ne l’aidant nullement à se ressaisir, bien au contraire. Car elle l’aime ainsi, totalement pris au dépourvu par elle, le mot oppa sonnant comme un interdit et semblant créer une onde qui les fait frissonner tous deux quand bien même il ne s’agit que de taquinerie. Testant encore et toujours ses remparts, essayant de jauger l’effet qu’elle a sur lui. Enfant capricieuse cherchant à capter l’attention de celui qui avait fauté, se demandant encore aujourd’hui à quoi tout cela rimait. Quel était le but de cette virée.

Elle tente d’ailleurs de le recentrer un peu, lui qui s’éparpille sans plus faire de sens de rien, l’ayant visiblement un peu trop secoué. Pas qu’elle compte réellement lui gagner une autre peluche, le coup relevant surement de la chance et ne voulant ternir son mérite mais… la curiosité était à son comble quant à son acharnement certain pour cette peluche de chien, se demandant pourquoi fallait-il que ce soit elle. Son talent en termes de tir était sans conteste déplorable, alors… pourquoi ne s’était-il pas contenté d’une autre ? S’apprêtant à réceptionner son bien quand il se remet à parler - ou le terme plus exact serait bégayer -, s’arrêtant dans son mouvement. « C’était ? » Phrase qu’il ne termine jamais, papillonnant des cils de perplexité alors qu’il tend les bras en direction du stand tout en clamant… « Les fleurs ? » A son tour d’être perdue, sourcils légèrement froncés et incertitude fichée sur ses traits poupons, un bouquet apparaissant comme par magie de derrière le stand et la laissant tout bonnement pantoise, ses orbes en venant à se perdre sur ce col qu’il remet plus ou moins en place - le moins étant de mise -. Était-ce une astuce pour qu’elle louche sur sa pomme d’Adam ? Parce qu’en toute honnêteté, le plan fonctionnait plutôt bien, sursautant presque lorsque les fleurs font irruption dans son champ de vision, ses lèvres rosées s’entrouvrant de stupeur avant que le coup de grâce ne soit donné par la peluche raflée et tendue à son attention.

Et elle rit, de ce rire léger et cristallin qui vient chatouiller sa poitrine et gonfler son myocarde de milles et une saveurs printanières. Si interdite qu’elle n’arrive à parler de prime abord, toute entière secouée par la vision qu’il lui offre et l’hilarité continue, incapable de s’arrêter. Elle se force toutefois à reprendre son souffle devant son raclement de gorge, sa gêne si palpable qu’elle ne voudrait le vexer, lui qui pourtant s’avérait si mignon en cet instant. Un calme qui lui est difficile à trouver, d’autant plus lorsqu’elle le regarde ébahie faire un pas de géant pour s'éloigner d’elle, la détaillant comme on examinerait un objet avant l’achat, sourcils froncés de perplexité. Le coup de grâce est donné par ce claquement de langue et pouce levé écarquillant ses prunelles de surprise, se demandant si elle ne venait pas de rêver avant de le voir faire marche arrière rougissant. Ses lippes tremblotant d’ors et déjà d’un nouvel éclat rugissant, le contenant à grande peine tout en essayant de se focaliser sur… lui, qui tourne sur lui-même, bras levés. Qu’est-ce qu’il… pouffant involontairement avant de masquer son méfait de sa main - ou plutôt, de la grosse peluche qui trône dans l’une de ses mains, l’autre accaparée par les fleurs -, elle se racle à son tour la gorge pour reprendre son sérieux. « Tu es… » Une impression de déjà vu l’étreignant, se remémorant ce qu’il venait de faire tantôt et mobilisant tout son self control pour ne pas rire encore ou pire l’imiter, ses prunelles pétillant de malice tandis que ses lèvres se maquillent d’une esquisse sincère, la voix toutefois empreinte de quelques notes rieuses. « Très élégant. » Ce fait la heurtant finalement, comprenant qu’il était en costume et les théories affluant à son esprit sans pourtant qu’elle n’en dise rien. Pour l’instant.

Préférant humer les fleurs qui elles, ne seront pas enclines à faire le pitre, la joie étirant un peu plus ses traits face au parfum sublime. « Elles sentent bon. » qu’elle commente, ses orbes revenant sur lui pour s'ancrer dans les siennes et ajouter un « merci » timide. Coup d'œil ensuite jeté à la peluche géante qui la cache à moitié, embrassant la joue molletonnée sur une impulsion. « Elle aussi, je l’aime. » Et peu importait à vrai dire qui l’avait gagnée, revenant sur le principal intéressé pour poser la question qui lui brûlait les lèvres. « Pourquoi ce costume ? Serait-ce un rendez-vous ? » Sachant pertinemment qu’elle allait de nouveau le perdre au tournant et choisissant de ce fait pour l’occuper de lui refourguer la peluche dans son bras gauche. « C’est lourd, porte la pour moi. » L’excuse à peine formulée qu’elle se pend à son bras droit avec légèreté, l’impulsion donnée pour les faire avancer. « Il y a quelque chose que tu voulais faire ici ? J’avoue avoir un petit creux… » Tentant habilement de lui donner des pistes sans même imaginer que la moitié de son argent était passé dans la peluche.

outfit ❀ S’il ne se méprend pas, ce n’est pas la première fois, depuis l’arrivée de Mirae, qu’il entend ce doux rire s’échapper de ses lèvres.

N’est-ce pas quelque chose de positif, que de faire s’esclaffer une femme? Peut-il s’égarer jusqu’à penser qu’elle est déjà heureuse de leur rendez-vous, et qu’il marque des points, sans même le faire exprès?

S’arrêtant après son tour, il vient enfoncer son regard dans le sien pour attendre ses mots. S’accrochant plus qu’il ne le voudrait à la teneur des compliments qu’elle pourrait adresser en direction de sa tenue, son cœur bat avec intérêt dans sa poitrine, accroché aux mouvements de ses lèvres qui lui semblent à ce moment précis effroyablement lents.

Elegant, le mot le gêne et le pousse à tirer sur son col, dos de ses mains qui viennent se poser sur ses joues comme pour s’assurer de leur température. “Hm?... Hm?” et il tente de s’éclaircir la gorge, rouge qui colore subtilement le haut de ses pommettes, avant d’arrêter de gigoter. La honte le prend tout entier de ne pas être parvenu à lui faire un compliment similaire, observant un instant avec intensité son visage avec un désir brûlant d’y voir apparaître du rose.

“Désolé.” finit-il par susurrer, regard accroché à ses traits. Hansoo laisse ses yeux descendre à nouveau sur sa tenue, avant de remonter doucement, sourire accroché au coin des lèvres. “Tu es très jolie.” avoue-t-il finalement avec un peu plus de confiance, gêne encore présente qui le pousse à toussoter et à arrêter de la fixer avec autant d’insistance.

L’ambiance est différente. Jamais il ne lui semble ont-ils été timides l’un avec l’autre, et Hansoo ne sait guère quoi dire ou quoi faire pour laisser cette gêne s’échapper. Le veut-il même? Il y a quelque chose d’agréable à cette tension qui toute entière serre son ventre lorsqu’il la regarde, et l’anticipation qui hante son cœur à l’idée que les choses, contrairement au status quo dans lequel ils sont coincés depuis leur première rencontre, puissent changer.

“Un rendez-...” ne peut-il s’empêcher de répéter en clignant des yeux, gêné qu’elle mette si directement le doigt dessus. Un rire tout aussi embarrassé lui échappe, et il laisse une main remonter pour se frotter la nuque. “Un rendez-vous… Un rendez-vous?...” répète-t-il en l’observant du coin de l'œil, comme si son expression pouvait lui apprendre la vérité. A-t-il même le droit d’appeler ça en rendez-vous? Ou ne dit-elle ça que pour le taquiner et l’embêter? “... Tu as envie que ça en soit un?” finit-il par demander en laissant sa main retomber, enfonçant son regard dans le sien avec un air qui, il l’espère, est au moins à demi confiant. “Moi je…” commence-t-il avant de pincer les lèvres de gêne, regard qui s’égare finalement sur le côté. “Moi ça me va. Je veux dire. L’appellation rendez-vous. C’est… c'est un mot, bien, non? Tu…” marmonne-t-il nerveux avant de revenir la regarder. “C’est un rendez-vous.” finit-il par affirmer en hochant la tête, imaginant bien que si il lui dit aussi fermement, elle ne pourra pas le réfuter. Et il n’a pas le temps de plus y réfléchir qu’il se retrouve avec une peluche dans un bras, et une femme accrochée à l’autre. A-t-il oublié de mettre son réveil ce matin?

Alors qu’ils commencent à marcher, bras liés, Hansoo prend la teneur entière de ce que ça veut dire, d’être en rendez-vous. Peut-être peut-il reprendre ses mots. La gêne toute entière le prend et le paralyse, incapable de savoir comment se comporter avec Mirae lorsqu’elle agit de façon aussi adorable, contrairement aux piques et taquineries incessantes qu’ils ont l’habitude de se renvoyer. “Je t’achèterai….” commence-t-il avant de tendre le bras pour le signifier, gêné dans son mouvement par la grosse peluche qu’il doit tenir, “... tout ce qui est possible d’acheter dans cet endroit!... C’est bien ça qu’on fait lors d’un rendez-vous, non?...” Sauf qu’il n’est pas un héros de kdrama avec un porte monnaie sans fond, capable de réserver tout un parc d’attraction pour une seule fille et plus que ça, sa bourse est… “Enfin…” se reprend-il avec gêne, osant un regard en direction de Mirae tandis qu’ils se fraient un chemin dans la foule, “... peut-être pas tout, mais…” Il lui faut absolument trouver un stand de nourriture, alors, qui coûte le moins cher possible. La honte le prend tout entier d’être réduit à un si petit budget pour leur premier rendez-vous officiel, mais maintenant qu’il y est, il ne peut plus faire marche arrière. “Ah, ça! C’est parfait, non?...” Et ça ne coûte que 1500 wons, regard accroché aux pommes d’amour qui sont en train d’être caramélisées. Hansoo tire Mirae en direction du stand, “tu aimes?” demande-t-il avant de se rendre compte qu’à choisir quelque chose à manger, son attention a été directement attirée par la nourriture avec le nom le plus niais. “Pourquoi ça s’appelle comme ça, même?... ça ne fait aucun sens…” marmonne-t-il en attendant que la jeune femme se décide.

outfit ❀ Le compliment finit par fuser d’entre ses lippes quand elle ne l’attendait plus guère, papillonnant des cils en un mélange de surprise et de gêne, les papillons remuant dans son estomac jusqu’à venir colorer ses pommettes. Sourire candide aux lippes, femme conquise de trois petits mots, reportant ses effusions sur les deux cadeaux qu’elle obtient d’emblée. Incapable de s’empêcher de le taquiner un peu plus, de voir jusqu’où iraient ses surprises du jour, invoquant le rendez-vous dans la mêlée et ayant le délice de le voir s’emmêler. Et il bégaye de nouveau, comme un petit garçon face à la fille qui lui plait, cherchant sans doute à savoir ce qu’il en conviendrait de dire. Muette face à sa demande, ne voulant lui donner trop vite les clés de son cœur, curieuse de voir ce qu’il choisirait de montrer. Si cette fois-ci, il validerait son envie d’être avec elle ou fuirait à nouveau en lâche. Orbes captant sa nuque ainsi massée, ses hésitations multiples et ce regard qui sans cesse fuit et s’accroche à elle un peu plus vaillamment, confirmant qu’il s’agit bel et bien d’une virée romantique et un léger rire lui échappant avant qu’elle ne s’autorise à s’accrocher à lui.

Puisqu’il avait fait le premier pas aujourd’hui, elle lui pardonnait le faux de l’autre fois, doigts fermement accrochés à sa veste de costume laissant à penser qu’il était plutôt musclé. Elle n’en laisse toutefois rien voir, visage toujours aussi mutin détaillant les divers stands avec envie tandis qu’elle laisse flotter angéliquement sa faim. Une réponse qui, pour son plus grand plaisir, ne vient pas à moitié, s’esclaffant en le regardant pointer l’intégralité des stands comme s’il était riche homme capable de tout lui offrir. Et sans doute était-ce ce que la plupart des hommes qu’elle avait fréquenté pourraient effectivement lui donner, que ce soit Woobin ou ses divers rendez-vous arrangés avortés, elle doutait toutefois qu’il fut de ce milieu. Sa mère aurait sans aucun doute tenté de les caser. Mieux, il saurait à coup sûr qu’elle n’était pas une simple interne. La question qu’il laisse en suspens sur ce qui se fait à un rendez-vous la fait toutefois se questionner, ne pouvant s’empêcher de lui demander avec une innocence teintée : « Tu n’as jamais eu de rendez-vous ? » Question traître, puisqu’elle sait qu’elle n’aimera sans doute pas la réponse, tenaillée par une curiosité pernicieuse. Heureusement le voir revenir sur ses mots lui fait quelque peu oublier cette histoire, haussant un sourcil amusé à son encontre en le sentant se raidir avec son porte feuille.

A son exclamation, ses iris captent les pommes d’amour, se demandant honnêtement s’il l’avait fait exprès et tentait ainsi de la séduire ou s’il avait choisi la première chose qu’il trouvait de raisonnable. La deuxième solution semble toutefois être la bonne, riant à son marmonnement audible avec l’envie forte de le taquiner, l’habitude reprenant le dessus. « Pourquoi, tu n’aimes pas l’amour, o-p-p-a ? » Chaque syllabe décortiquée, jouant avec le mot autant que la double signification qu’avait la question, regardant les diverses pommes et leur toppings avant d’opter pour la basique. « Je veux celle-là. Je n’y ai jamais goûté mais ça doit ressembler à de la tarte tatin. » La pomme et le caramel ne pouvaient pas la trahir, pas vrai ? Ne voulant pas l’acculer avec une autre option plus onéreuse ou lui proposer de payer, lui qui semblait vouloir lui offrir. Son bras est lâché pour accueillir le bâtonnet, se tournant alors vers lui pour s’enquérir de sa joue, levant ses pieds en pointes jusqu’à effleurer le grain de peau de sa bouche. « Merci. » Une tendre naïveté en guise de sourire, se mettant à trottiner au devant. « On se cherche un banc ? » Parce qu’ils étaient un peu encombrés. « Là-bas, sous les cerisiers. » Ne pouvant s’empêcher de se demander s’il avait choisi ce cadre parce qu’il était dans le top 3 des rendez-vous à cette période de l’année ou s’il était juste féru de ce jeu à la carabine. S’installant en lissant sa jupe, les fleurs posées avec précaution à sa droite tandis qu’il s’installe à sa gauche, se rapprochant alors doucement de lui jusqu’à frôler sa main de la sienne sur le banc d’une fausse innocence.

outfit ❀ La gêne est perceptible sur chacun de ses traits. Alors que le regard de Hansoo ne cesse de se poser sur les pommes d’amour érigées devant le stand, et n’importe où sauf en direction de Mirae, il ne peut empêcher cette chaleur caractéristique de prendre part de son corps. Son cœur bat à une vitesse trop anormale pour qu’il ne puisse le remarquer: pas alors qu’il fait partie de la description de son job d’y détecter toutes les anomalies. Et il espère vivement que sa compagnie de l'après-midi aura l’aimable gentillesse de le sortir de son desarroi: avant de se rappeler que sa compagnonne est Mirae.

Le pire démon qu’il ait eu la chance de rencontrer.

Semblant parfaitement programmé pour le rendre fou.

Alors que ses lèvres pulpeuses s’arrondissent pour former chacune des lettres du mot oppa, les entrailles de Hansoo s’emmêlent de plus en plus. Hansoo ignore sans gêne sa question, faisant mine d’être absolument fasciné par ce que les cuisiniers font un peu plus loin dans l’échoppe, et ce n’est qu’au moment où Mirae passe sa commande qu’il semble revenir sur terre.

“Moi aussi!” s’empresse-t-il de dire avant de cligner des yeux, l’air bête d’un enfant qui copie tout ce que la personne à côté de lui est en train de faire, pour ne pas avoir à réfléchir. Mais il n’est pas un enfant. Et il n’est définitivement pas bête. Encore moins nia…

“M-merci” répète-t-il tout aussi bêtement lorsque les lèvres de Mirae se posent sur sa joue. Ses doigts viennent effleurer l’endroit, comme pour s’assurer qu’il ne vient pas de rêver. Hansoo vient s’éclaircir la gorge avec attention, et agite la tête pour se remettre les idées en place. “Je veux dire, c’est normal! Quoi de plus normal, c’est moi qui… ah oui, je dois payer…” marmonne-t-il en cherchant un petit billet dans son porte monnaie qu’il tend, évitant de grimacer à voir le fond de ce qu’il lui reste pour le budget du jour. Un long soupir peiné s’échappe de ses lèvres, avant que le monsieur du jour ne se donne une légère claque pour revenir sur terre. Il remarque que Mirae s’est déjà éloignée: et il la rattrape en trottinant, sa pomme d’amour à la main.

“Parfait.” marmonne-t-il simplement face à la décision de Mirae de s’asseoir sous les cerisiers, arrêtant son cerveau avant qu’il ne s’emballe à essayer de trouver une raison à une telle proposition, et bientôt, ses fesses sont assises, son corps à côté du sien.

Il se trouve bien bête, tout d’un coup.

C’est au moment où, tel une bête sauvage, il s’avance en direction de sa pomme pour en prendre la bouchée la moins soignée et élégante au monde, que sa main posée innocemment sur le banc est frôlée, lui occasionnant un sursaut.

Le morceau de pomme descend au fond de sa bouche et s’y coince. Un bruit étranglé remonte depuis le fond de sa gorge, et commence alors une quinte de toux qui heureusement finit par faire disparaître le bout de fruit, jusqu’à ce que son regard, bordé de larmes, ne se tourne en direction de Mirae.

“Que fais-tu?” Une question bête, et qu’il veut ravaler à peine est-elle sortie. C’est ce qu’il signifie par ses lèvres qui s’ouvrent et se referment avec un air idiot de poisson, avant qu’il ne secoue fermement la tête. “Je pensais pas que le caramel serait aussi… hm…” Et il s’éclaircit encore un peu la gorge, tire sur son col et se remet dans sa position de départ

Là où ses doigts libres sur le banc sont tout près de ceux de Mirae.

Il a raté son opportunité et pour ça il s’en maudira toute sa vie. Fermant un instant les paupières, il prend un temps pour se remettre avant de tourner à nouveau le visage en sa direction. Après une tentative qu’il espère fructueuse de lui signifier par des hmmm, des aaaah, et de ooooh combien la pomme d’amour est le mets le plus divin qui a jamais touché le bout de sa langue… il tente de se concentrer, à nouveau.

Et doucement… les doigts font leur chemin sur le bois qui a vu avant eux beaucoup de couples (pas qu’ils en soient un, bien entendu), et viennent frôler les siens.

Là, il l’a eue, sa revanche. Un sourire fier vient étirer ses lèvres, un espoir que peut-être, Mirae se mette à s’étouffer avec sa pomme d’amour, comme il vient de le faire.

Peut-être aura-t-il même l’opportunité d’être le médecin de service, celui qui est prêt à ranimer sa belle d’un bouche à bouche.

“Non, Hansoo.” se chuchote-t-il doucement, secouant la tête, avant d’oser un nouveau regard en sa direction. A première vue, elle ne semble pas s’étouffer. Lui fait-il aussi peu d’effet?...

outfit ❀ Aussi inattendu qu’appréciable, Mirae découvrait en ce jour un nouveau visage, loin du médecin froid et grognon qu’il se bornait à être en sa présence, victime de sa fierté. Goûtant à sa galanterie, à ses attentions aussi, le décelant timide et peut-être aussi un peu niais, particulièrement surprise de sa réaction pour un simple baiser sur la joue quand il y a quelques semaines il l’avait forcée à entrelacer leurs lèvres. Se demandant quel était le vrai lui et si aujourd’hui elle avait réussi, le mur dressé entre eux semblant s’être effrité jusqu’à y voir percer de doux rayons à travers. Étouffant un début de rire derrière sa main, l’abandonnant tandis qu’il payait afin de leur trouver un endroit convenable où se poser, elle se demande sincèrement quelles nouvelles surprises l’attendaient. A quel point il se dévoilerait.

Elle ne s’attendait toutefois pas à ce qu’il s’étouffe ainsi pour de simples mains frôlées, ses prunelles s’écarquillant de surprise tandis que sa main se retirait, prête à lui tapoter le dos s’il nécessitait. Grimaçant quelque peu quand il se met à tousser, s’en voulant de l’avoir ainsi choqué et restant muette de stupeur quand il lui demande ce qu’elle faisait, les orbes bordées d’un océan sur le point de se déverser. Pourquoi son geste semblait-il répréhensible dit comme ça ? Le détaillant par la suite imiter un poisson ou tout animal s’en rapprochant, sourcils légèrement froncés à faire sens de cet enchaînement qui se termine par une apogée sur la pomme d’amour. Et elle en perd le fil, soupirant résignée, reprenant elle aussi sa position tout en veillant à ne pas empiéter sur son territoire, mangeant son fruit avec un appétit d’oiseau. S’était-elle trop précipitée ? Ou avait-elle mal interprété les signaux ?

Retranchée dans ses pensées, loin des bruits de mastication et autres contentement du médecin lorsque de nouveau leurs doigts se frôlent. S'apprêtant à les retirer vivement pour ne pas finir prématurément ce rendez-vous par un aller simple à l'hôpital quand elle croise son regard et y comprend l’intention. Il avait de lui-même placé sa main là, un sourire mutin éclairant de nouveau ses traits tandis que ses doigts lentement tâtonnaient sur la main inconnue, la caressant avec lenteur jusqu’à les entrelacer aux siens. « Tu as de grandes mains… » qu’elle lance anodinement, faisant mine de comparer leurs tailles tout en continuant ses caresses nonchalantes. Ses iris pétillant d’un amusement teinté de romance tandis qu’elle le détaille, à l'affût de la moindre de ses réactions. « Tu pourrais y tenir deux des miennes. » S’esclaffant légèrement sans mettre fin à son manège, appréciant sans doute un peu trop le titiller mais plus encore cette partie du corps qu’elle a toujours chérit et soigné. Après tout, les mains d’un chirurgien n’étaient-elles pas ce qu’il avait de plus précieux ? Avisant finalement d’un morceau de caramel à l’orée de sa bouche et ne pouvant s’empêcher de lui venir à la rescousse, la malice pétillant sur chacun de ses traits. « Tu as du caramel… » qu’elle susurre tout en se rapprochant de lui, ne se servant nullement de sa main mais bien de son muscle humide pour venir le cueillir sans jamais le quitter des yeux. « Juste là. » Petit manège qui lui tire un sourire victorieux et un bruit de contentement poli. « C’est vrai que c’est bon. » continue-t-elle enveloppée d’innocence tout en se léchant outrageusement les babines, un léger rire fusant. Il n’y avait pas à dire, elle adorait beaucoup trop se repaître des expressions de ce pauvre Hansoo.

outfit ❀ Hansoo patiente, le cœur remonté jusqu’au milieu de la gorge. N’importe quel médecin, dont lui, serait capable de lui dire que c’est absolument impossible, mais il ne peut expliquer autrement ce serrement et ces battements qui tout entiers lui ont enlevé, apparemment la capacité de déglutir correctement.

D’agir normalement.

Depuis quand est-il si timide et si balourd devant une fille ? Il l’a toujours été, bien entendu, mais s’était juré depuis sa dernière relation de ne plus jamais retomber dans un comportement aussi idiot et niais que celui qu’il donne à montrer à Mirae à l’instant. Sa mâchoire se serre, et il s’apprête à retirer ses doigts, imaginant qu’elle trouvera tout aussi déplacé qu’il s’invite à cette place, lorsque le mouvement se fait sentir.

Hansoo cesse de mastiquer. Cesse de respirer, même, et baisse rapidement le regard en direction de leurs mains, histoire de s’assurer qu’il n’est pas en train de fantasmer. Et il les voit. Les doigts qui remontent le long des siens, qui s’y entrelacent. Un frisson de plaisir s’échappe dans l’intégralité de son corps et il se mord la langue sans faire exprès, heureusement pas assez fort pour laisser échapper un bruit de douleur. Pas besoin de se mettre la honte totale deux fois d’affilée.

“A-ah?” C’est tout ce qu’il trouve à répondre lorsque Mirae complimente la taille de ses mains, s’éclaircissant immédiatement la gorge comme pour prétendre que ses balbutiements sont juste nés d’un petit bout de pomme qui s’est coincé à nouveau, et rien d’autre. Il ne devrait pas être émoustillé parce qu’une femme lui caresse les mains. Mais aussi avait-il toujours été sensible: plus encore il le semble face à Mirae, lui qui a du mal à se rappeler un moment où une femme l’a mis en autant d’émois. Une envie sciante de s’emparer entièrement d’elle le prend tout en entier, souvenir honteux du baiser qu’il lui a donné la dernière fois venant colorer ses joues. Non. Il doit se tenir sage. Il doit lui donner le rendez-vous de ses rêves, même si tout a déjà mal commencé. Hansoo secoue la tête, et tente de se remettre dans le droit chemin.

“Deux… Deux, tu crois?” Et il utilise cette excuse pour baisser le regard en direction des mains de Mirae, faisant mine de vérifier. Bougeant lui aussi ses mains et ses doigts pour comparer leurs tailles, imaginant ce que cela ferait de les protéger du froid environnant un jour d’hiver, où seules ses mains feraient office de gants. Peut-être pourrait-il même l’enfoncer dans une poche de son manteau, lorsqu’il la percevrait trembloter… Stop la niaiserie Hansoo, on a mis ça à la porte il y a des années !!

“Ah?” s’exclame Hansoo lorsque Mirae lui fait remarquer le caramel. Il lui est bien pénible d’imaginer retirer sa main de la sienne pour venir s’essuyer les lèvres et c’est là l’erreur qu’il fait: donnant la porte de temps idéale à la jeune femme pour se rapprocher de lui. “Qu’est-ce que, tu…” a-t-il juste le temps de balbutier avant que la sensation humide de sa langue se fasse sentir au coin de ses lèvres.

Un désir fulgurant s’empare de son corps. Hansoo plisse les paupières un instant et tente d’invoquer l’image la moins excitante au monde pour tenter de se calmer, et se retenir d’accuser ouvertement Mirae de le saboter depuis le début. “Tu…” commence-t-il avant de se mordre l’intérieur de la lèvre. Incapable de s’empêcher de rouvrir les yeux pour l’observer, une irritation claire dans son regard. Tout aussi claire en est la raison, lorsque dans ses orbes sombres brûle l’envie qui tout entier lui donne envie de se projeter envers elle.

“T’es sûre que t’en a pas?... Aussi…” lance-t-il, histoire de prendre le contrôle de la situation. Abandonnant finalement ses doigts pour tendre sa main libre en direction de son visage, posant sa paume contre sa joue, là où elle semble s’emboite parfaitement, comme leurs doigts l’un dans l’autre. La pensée le prend tant par surprise que la couleur sur ses pommettes empire, et Hansoo s’éclaircit la voix à nouveau pour feindre la nonchalance. “Ah.. Non, tu manges très proprement, y a pas à dire…” marmonne-t-il en faisant mine de chercher du caramel sur son visage, incapable de se résoudre à laisser sa main retomber. Pas là où sa chaleur est si agréable, pas là où il lui suffirait juste de se pencher, pour…

“Tu es injuste, voilà tout.” finit-il par déclarer, tel un enfant boudeur. Laissant retomber sa main, il vient s’emparer à nouveau de celle de Mirae et l’enferme dans la sienne. “Hm? D’habitude j’ai tout ce qu’il faut pour me venger, je me venge très bien, non? Mais là…” marmonne-t-il en monologue audible, trop conscient que kidnapper la main de Mirae n’est en aucun cas une vengeance. De toute évidence, rien de ce qu’il fait ne la met en émoi, contrairement à lui. “Ta main est à moi. Une objection?” lance-t-il en lui adressant un regard appuyé, l’air de dire qu’elle n’a pas intérêt à se plaindre, si elle ne veut pas avoir d’ennuis. “Et puis après…” Il vient se mordre la lèvre inférieure avec attention, portant attention sur le parc qui les entoure. “J’aurai le reste… petit à petit…” murmure-t-il, gêné.

outfit ❀ Avait-elle été trop loin ? Question ricochant dans son esprit alors que le bégaiement se fait plus prononcé, les onomatopées se répètent et finalement la phrase est coupée en plein vol, électricité venant chatouiller chacune de ses cellules d’un contentement divin. Sans doute ne devrait-elle trop le chercher, encore moins se repaisser de cet état dans lequel elle le plongeait, semblable à une douce torture. Seulement ne pouvait-elle s’en empêcher, comme une sirène se jetterait dans la mer, son cœur cognant douloureusement à essayer de se rapprocher du sien. En effleurer les contours pour le sentir tressauter de son fait, et uniquement du sien. Une drogue aussi douce que puissante, son nom devenu litanie dans ses nuits sans sommeil. Il avait été médicament quand la vie n’avait plus eu aucune saveur que le goût ferreux du sang, et inconsciemment l’avait-elle toujours cherché.

Aujourd’hui, il avait le goût de caramel mêlé à l’acidité de la pomme, aphrodisiaque pulsant dans ses veines alors qu’elle l’avait cueilli de si près, la flamme dans son regard la renseignant assez sur ce qui courait dans les siennes. Un désir brut, à couper au couteau, comme cette lèvre qu’il mord et dont elle aimerait remplacer l’entaille des siennes. Redessinant leurs rondeurs de ses orbes fauves lorsque sa demande la ramène au présent. La fait partir dans un rire impromptu, douce moquerie d’un cœur épris, laissant sans résistance aucune son visage être tourné et retourné de ses doigts. « J’aurais dû manger salement ? » qu’elle demande, feignant l’innocence, sa voix douceur mais son sourire moqueur. « Je peux toujours me salir, tu sais… » Proposition sincère malgré le ton blagueur, ne pouvant s’empêcher de s’amuser de cette injustice qu’il proclamait. C’est qu’il devait vraiment vouloir utiliser sa langue sur elle… la simple pensée la parcourant de frissons, peinant à s’ancrer de nouveau dans la réalité. « Je ne suis pas sûre de pouvoir affirmer ce que tu dis. » rit-elle en écho à ses vengeances terribles, ne se souvenant pas vraiment en avoir subi une seule. Mais peut-être n’était-elle pas encore au fait des terribles répercussions de toutes ses actions passées ?

« Aucune. » qu’elle clame dans un calme qui semble olympien. Pourtant tout en elle bouillonne de cette simple affirmation, l’impression de lui appartenir rien qu’un peu l’émoustillant. C’est à peine si elle calcule la menace dans son regard, ne désirant nullement le contredire, une moue contentée venant peindre ses traits. « Le reste ? » qu’elle répète d’une voix un peu plus grave. Un peu plus rauque. « Quand vient cet après ? » Comme pour lui intimer de lui donner une date et heure précise, qu’elle cesse enfin de se lamenter. Se décidant à être bourreau et lui asséner sa flèche, espérant qu’elle viserait juste. « Tu veux m’embrasser ? » Se fichant bien d’être directe, l’impatience pulsant avec insolence dans son regard ô combien mature alors que ses prunelles flambaient, venant lécher la pomme sans le quitter des yeux. Un morceau de caramel dur éclaté à la morsure précédente est prélevé en son creux, et elle l’apporte d’elle-même sur la plénitude de ses lèvres en offrande, le jaugeant, tentatrice. « Le jeu est-il assez juste, désormais ? » qu’elle susurre, vibrant d’un désir à peine contenu quand pourtant l’incertitude est de mise. L’embrassera-t-il une seconde fois ? Lui offrira-t-il un baiser capable d’effacer le fiasco du premier ? Ou se dérobera-t-il à elle encore une fois, sans s’y être osé ou après l’avoir goûtée ? Elle ne pouvait qu’espérer.

outfit ❀ La gêne de ses aveux se répercute encore dans sa poitrine. Pensées qui virevoltent et qu’il tente d’esquiver, regard qu’il sent tourné en sa direction et qu’il ne veut pas croiser, Hansoo craint plus que tout la réjection qui, inévitable, semble arriver en sa direction.

Il craint sa réaction.

Craint les pensées qui elles aussi doivent se batailler au creux de sa tête, esprit qui lui semble plus inaccessible et mystérieux que jamais, et dont il n’est pas sûr de vouloir connaître les tréfonds. Lui qui ne sait s’il serait soulagé de savoir l’intégralité des sentiments qui semblent habiter son cœur, ou s’il ne prendrait qu’un peu plus peur, d’une envie irrémédiable de s’échapper à elle avant de se brûler.

Comme on lui a déjà fait subir tant de fois auparavant.

Un frisson tout entier le parcourt alors que son esprit s’évade, ramené sur terre par une simple question qui fait papillonner ses paupières. Quand? Il lui adresse un regard hésitant, peinant à savoir si elle se joue de lui ou si elle attend une sérieuse réponse, incapable de comprendre si elle aime le frisson du jeu, ou si des sentiments plus sincères battent en son sein. Elle qui est venue à ce rendez-vous alors qu’elle aurait bien pu l’ignorer, elle qui ne cesse de flirter avec lui dès le premier instant, elle qui ne cesse de profiter de chacune de ses faiblesses pour le pousser à avouer plus, à faire plus.

Si elle pousse trop loin, il risque de s’égarer entièrement.

Et c’est ce qu’il lui supplie silencieusement de ne pas faire. Si elle ne veut pas que le moment se termine comme celui de la dernière fois, à perdre contrôle de ses actions, à perdre contrôle de son esprit, à perdre contrôle de lui.

A se laisser engloutir tout entier par les sentiments indistincts qui battent à son égard, ce corps brûlant qui ne cesse de lui supplier d’aller en sa direction. Celui-ci bat d’une tension un peu plus intense lorsque son regard se pose sur sa langue, long soupir qu’il ne peut retenir au bout de ses lèvres, et paupières qui se ferment à demi.

Il la veut. Pas seulement pour son corps, pas seulement pour sa beauté, mais il y a un feu qui brûle dans sa poitrine et qui veut ardemment la faire sienne. En est-elle consciente? Est-ce pour ça qu’elle continue à jouer, à le provoquer, espérant de toute évidence le voir craquer entièrement? Un mélange de supplication et d’envie possessive se bat au creux de ses prunelles, là où il ne peut s’empêcher de la fixer un peu plus frissonnant, corps qui se penche inconsciemment en sa direction, comme pour réclamer son dû.

Il ne lui semble sortir de cette transe qu’en apercevant le bout de caramel au bout de ses lèvres. Paroles qu’il a écartées de son conscient et qui viennent avec fureur rougir le haut de ses oreilles.

Tu veux m’embrasser?

C’est bien ce qu’elle a demandé il y a peu. Déglutissement audible alors que son regard se plonge un peu plus en direction de ses croissants, ceux qu’il aimerait butiner sans même prendre le temps d’y réfléchir. Un nouveau soupir qui lui échappe et qui à lui seul semble lui donner la réponse, lui qui aimerait lui intimer de ne plus parler, de le laisser faire ce qu’il veut et de ne pas le provoquer à ce sujet. Pour qu’il ne fuie pas, pour qu’il ne tente pas de nier, pour que tout entiers ils puissent se laisser aller à exprimer des sentiments qu’il n’aimerait pas mettre en mots, et qui tout entiers l’effraient encore.

Il entend à peine la dernière question mais hoche la tête. Les mots dansent encore au creux de son esprit. Il ne veut pas laisser cette émotion qui l’embaume se brise, lui dont l’expression toute entière semble déformée d’une douceur inhabituelle, celle avec laquelle il la couverait du regard lorsqu’elle ne le voit pas, et qu’il n’afficherait jamais sans gêne là où elle pourrait l’admirer.

Il ne veut pas parler. Pas balbutier, pas s’étouffer, pas faire l’idiot…

Simplement… Se pencher en sa direction. Jusqu’à ce que son odeur sucrée remonte jusqu’à ses narines, jusqu’à ce qu’il puisse compter ses cils s’il s’en donne la tâche. Jusqu’à ce que ses lèvres lui soient invisibles, si proches des siennes, et jusqu’à ce que son souffle chaud n’ait d’autre choix que de s’échouer en direction de sa peau.

Ils sont en public. L’idée pourtant ne lui traverse même pas l’esprit. Là où le bout de son nez vient effleurer le sien avec douceur, là où ses lèvres épaisses fondent un peu plus en sa direction, jusqu’à sentir le bord du caramel qui, en toute impunité, a volé les lèvres de Mirae avant lui.

Le bout de sa langue vient lentement s’emparer du morceau sucré qui bientôt vient fondre dans sa bouche. Là où il s’est donné le droit d’une seule empreinte humide contre ses lèvres, là où son cœur bat à tout rompre, là où sa respiration se fait désordonnée, enivrée.

Il acquiesce à nouveau.

Caresse douce du bout de leurs nez qui signifie ce qu’il a pourtant déjà exprimé, un oui silencieux. Il a envie de l’embrasser. Il sait qu’il n’en a pas le droit ni le mérite, mais il le désire tout de même. Une envie déchirante qui le pousse à poser sa main contre son cou, faire remonter les doigts en direction de sa nuque pour s’en emparer doucement, empreintes enfouies dans sa chevelure brune. Là où il vient poser le bout de ses lèvres contre les siennes, pression délicate là où il n’y avait la dernière fois qu’empressement, une envie de savourer chacune des secondes de cette étreinte, si elle l’y a invité sciemment.

Ses lèvres se meuvent avec langueur. Baisers déposés au bout de ses lèvres, là où il appose une petite succion pour les laisser un instant entre les siennes, bruits érotiques et humides de leur baiser qui l'enivre un peu plus. Là où il laisse tomber sa pomme d’amour dans l’herbe pour venir entourer sa taille de son bras nouvellement libre, pressant son corps contre le sien, et usant de ses lèvres pour recueillir tout le sucre qu’il fait mine de suçoter, lui qui a fait disparaître le caramel depuis un moment. Son corps tout entier frémit, tension et chaleur qui s’emparent avec violence de l’intégralité de son corps, et il se dit bien que si elle veut mettre fin au baiser elle le fera, se laissant aller à butiner ses lèvres sans cesse et sans retenue, là où il n’est pas sûr d’avoir un jour une autre opportunité d’y goûter.

outfit ❀ Aussi assurée semble-t-elle être, joueuse éhontée tirant des fils invisibles au vu de le faire céder, Mirae reste pourtant profondément innocente. N’ayant encore jamais offert ses lèvres à un homme, si on oubliait la glissade impromptue de la dernière fois qu’elle refusait de reconnaître comme son premier, jeune femme à la beauté renversante n’ayant toutefois jamais trouvé chaussure à son pied. Trop fades, sans intérêt, pas assez beaux, vulgaires ou complètement idiots… les prétendants se sont accumulés à ses pieds sans jamais qu’elle leur accorde quelconque faveur, hermétique à leurs sérénades pleines de lourdeur. Incapable de trouver sa place dans un monde où on la qualifiait d’anomalie, trop belle, trop intelligente et en plus bon parti. Et puis elle l’a rencontré lui, et il a irrémédiablement chassé l’ennui. Donné un sens à sa vie. Décidée à devenir chat et faire de lui sa souris.

Pourtant lorsqu’enfin il fond vers elle et semble accéder à sa demande, elle ne peut qu’accuser des rôles inversés, devenant proie entre ses doigts, le cœur manquant un battement tandis que le souffle est coupé. Frissonnant d’impatience et de crainte mêlées à la caresse de leurs nez, le regardant comme si elle le voyait pour la toute première fois, l’estomac contorsionné. Le monde ne tourne plus rond, ou peut-être a-t-elle tout simplement changé d’univers pour devenir le satellite gravitant autour de la planète nommée Hansoo tant elle semble manquer d’air, certaine que si elle se tenait debout, ses pieds se seraient dérobés. Ses paupières se fermant avant même que son muscle humide ne vienne frôler ses croissants, donnant ainsi son consentement, l’organe cognant douloureusement. Comment était-ce possible d’être ainsi retournée par sa proximité ? Elle aurait sûrement accusé quelconque maladie si cette dernière n’avait été aussi plaisante, rouvrant ses orbes à demi pour le voir enfin céder, attirée avec ferveur contre lui et lâchant elle aussi la réplique du fruit défendu pour s’attaquer à celui qu’elle avait toujours désiré. Mains se plaquant automatiquement sur son torse, doigts se crispant jusqu’à en froisser le col avant de lentement remonter et venir se ficher à l’arrière de sa nuque, s’y accrochant comme à une bouée dans cette tempête impromptue.

Elle se sent fiévreuse alors que sa bouche est explorée, lèvres gonflées par les succions répétées, d’abord timide dans l’échange comme lâchée dans le grand bain sans ses bouées, se devant d’apprendre à nager. Alors elle le suit, assidûment, tentant de se calquer à son rythme, de laisser son corps parler, fébrile. Tout autour d’elle est assourdi par les battements de son palpitant et elle se sent prise d’une fièvre indicible, loin pourtant de la craindre, désirant plutôt y succomber sans compter. Épousant ses charnues comme venant y quémander l’air qu’il lui faut pour respirer, capturant sa lèvre inférieure entre ses dents avec l’envie indélébile de le marquer. Possessivité qui course dans ses veines, lui donne envie de l’enfermer, son corps tremblant d’impatience alors qu’il se colle un peu plus au sien et s’imprègne de son parfum.

C’est presque à contre cœur qu’elle remet pied dans la réalité, se souvenant qu’ils n’étaient guère seuls et se retrouvant essoufflée, la tête embuée. Papillonnant des cils avec une touche de timidité, la pointe de ses pommettes se colorant légèrement, sa propre lippe mordue à défaut de trouver réplique appropriée. Pour une fois se trouve-t-elle muette et bête, voulant simplement s’imprégner de l’instant et espérant peut-être qu’il viendrait clarifier leur situation. Mais le silence s’étire, et elle finit par se racler la gorge quelque peu gênée, une mèche capturée entre ses doigts en quête d’une occupation futile. « Tu ne sembles pas tant me détester aujourd’hui. » Comparé à la dernière fois, bien loin de renvoyer l’image d’un homme qui, comme il l’avait si bien dit, ne pourrait jamais l’aimer.