Hic. Hic. Hic. Ce son lui paraît plus qu’insupportable. Hic. Hic. Hic. Sueurs froides qui mettent à rude épreuve son palpitant qui ne demande qu’un peu de repos. Ses bras lui font un mal de chien à force de traîner sa vieille carcasse de gauche à droite de cette maison qui lui paraît devenue trop petite. Une cage dorée où l'on enferme les secrets les plus malaisants. Parce qu’il n’est plus qu’une source de questionnement pour les curieux. Parce que ses parents tiennent bien trop à leur image pour pouvoir le montrer aux yeux de leur entourage. Le fils dont ils étaient si fiers n’est plus. C’est le scandale qui laisse sa place à l’admiration. On chuchote derrière son dos comme s’il n’était plus en capacité de comprendre ce qu’il se passe. Pauvre Seul Woong. Que va-t-il devenir ? Et cette sensation d’oppression qui revient au galop. Fort heureusement pour lui, il retrouve aujourd’hui le confort de son appartement. Un vent d’indépendance qui lui a bien trop manqué ses dernières semaines. Hic. Hic. Hic. Ses dents grincent à présent sous l’énervement. Ce maudit fauteuil bien trop bruyant à son goût ne fait que l’insupporter. Un prêt de l'hôpital le temps de faire les adaptations nécessaires à son confort quotidien. Le retour chez ses parents ne s’est d’ailleurs pas fait de gaieté de cœur mais des travaux étaient nécessaires afin de lui garantir une certaine autonomie. Bien sûr, dès son réveil, et une fois la nouvelle de son accident passée, il avait entrepris de dessiner tous les ajustements de celui-ci avec pour projet, plus tard, de faire construire un lieu en adéquation avec son nouvel handicap.

Handicap. Le mot tombe comme un couperet sur sa nuque. Il avale avec difficulté sa salive et inspire un bon coup. Sa situation, il fait de son mieux pour l’accepter. La tête haute, le dos bien droit, il tente de montrer à tous que son moral d’acier est loin d’être mis à l’épreuve, et pourtant… Ce n’est qu’un mensonge. La vérité est une toute autre histoire. Celle d’un traumatisme qui vient hanter ses nuits. Celle d’un corps qui ne lui obéit plus. Celle d’un homme en détresse. Il pourrait en parler à Seul Bi ou même à un professionnel mais les mots peines à venir alors il panse tant bien que mal la plaie béante qui dévaste son coeur. Hic. Hic. Hic. Alors que son chauffeur le hisse dans un véhicule adapté, le jeune architecte laisse échapper un soupire avant de saluer ses parents d’une main. Un sourire plaqué sur ses lippes, il façonne son masque, imperturbable. La voiture démarre et le trajet semble passer à une vitesse grand V. Mails, textos et même un semblant de discussion viennent accompagner ces trente minutes de route. Une fois devant son immeuble, Seul Woong remercie le chauffeur et le congédie en assurant pouvoir se débrouiller seul. Hic. Hic. Hic. Sous ses phalanges blanchissantes, les roues du fauteuil entament une nouvelle mélodie. Vivement l’arrivée de mon nouveau fauteuil… soupire-t-il avant de se glisser dans l’ascenseur.

Quelques secondes plus tard, le voilà déjà dans son appartement. Une légère odeur de talc se dégage d’un diffuseur alors qu’il examine d’un œil expert l'œuvre des ouvriers. Un sourire aux lèvres, il s'approprie doucement les lieux, tente de se faire à l’idée que plus jamais il n’évoluera dans ses pièces comme avant et alors qu’une nouvelle vague de nostalgie lui remplit le cœur la sonnerie retentit. Sans difficulté, il s'approche de la porte de son appartement et l’ouvre sans se poser de question. Une seconde, puis deux passent alors qu’il observe l’homme qui se tient devant lui. Hyeon Min. Il cligne des yeux à plusieurs reprises et se décale pour le laisser entrer. Sa main vient se poser derrière sa nuque, lui remettant les idées en place. Bonjour…Je… Entre… dit-il légèrement mal à l’aise. C’est Seul Bi qui t’a prévenu que je rentrais aujourd’hui ? continue-t-il en se raclant la gorge. Evidemment, c’est toujours Seul Bi.

Si on demandait au Cha quelle était la meilleure invention au monde, sûrement dirait-il le GPS. Sans ce dernier, le coréen errait des heures et des heures sans jamais trouver sa destination, malgré des explications pouvant être très clair pour y parvenir. Celle de Kwon Seul Bi avait été clair pourtant si le jeune homme s’était basé dessus jamais il n’aurait réussit à se retrouver directement devant le bâtiment du grand-frère de cette dernière. Sûrement aurait-il tourner en rond dans la zone sans jamais trouver son point d’arrivé. Sourire aux lèvres, il rentra dans la bâtisse. À quelle étage lui avait déjà dit la demoiselle ? Il eut un moment de réflexion, préférant envoyé un sms à cette dernière pour être sûr de ne pas aller sonner chez quelqu’un d’autre. Une fois sa réponse obtenue, il entra dans l’ascenseur pour se rendre au tout dernier, l’appartement se trouvant en attique. Arriver devant la seule porte présente à ce niveau, il pressa son doigt sur la sonnette pour annoncer sa venue surprise. Non, il n’avait rien dit au frère de la demoiselle avec qui la communication restait difficile. Hyeon Min sentait que sa présence n’était pas forcément simple pour celui-ci. Néanmoins, le pompier avait besoin d’être tout de même-là pour lui, victime d’un accident s’étant déroulé devant ses yeux, un accident qui lui coûta ses jambes.

Lorsque la porte s’ouvrit, c’est avec un grand sourire que le Cha le salua. « Hey ! » dit-il tout en rentrant après que le plus vieux l’ait invité à rentrer, même si cela ne semblait pas être dit avec réel envie. En tout cas c’est ainsi qui le perçut, mais faire demi-tour serait impoli, non ? « Oui, c’est elle qui m’a prévenu. Du coup tiens, pour te féliciter de ton retour. » dit-il tout en tendant ce qu’il avait dans les bras depuis le début. Une plante verte avec des rubans de félicitations pour son retour chez lui. « Elle ne demande pas beaucoup d’entretien m’a dit la fleuriste. » Le pompier ne savait nullement si le plus âgé avait la main verte, mais une plante égayait toujours un lieu de vie. Ses yeux dérivèrent pour observer un peu plus le logement du jeune homme et de sa petite-sœur par la même occasion. « C’est très joli chez vous. »  En tout cas de ce qu’il voyait pour le moment même si ce n’était qu’une légère partie. Ses yeux s’égarèrent encore quelques secondes avant de se reposer sur le jeune homme assit dans son fauteuil roulant. Intérieurement, difficile de dire que la nouvelle condition du garçon ne l’attristait pas. Cet accident n’aurait jamais dû avoir lieu, un accident causé par un homme inconscient que son état était un danger pour autrui. Il avait été là au mauvais endroit et au mauvais moment. La vie était injuste d’autant que le jeune homme face à lui ne semblait pas être un homme à qui ce genre de malheur était mérité. C’était désolant, mais ce n’était pas la fin. En tout cas, c’est ainsi que voyait les choses Hyeon Min. La vie ne s’arrêtait pas pour autant et elle avait de belles choses à offrir encore. Depuis la mort de ses parents, c’est ainsi que le coréen avait décidé de mené sa vie, lui qui avait voulu se laisser mourir en les perdant, à finalement eu une prise de conscience que ses parents seraient triste de le voir ainsi. Il avait donc décidé de vivre, parce que la vie restait belle malgré toutes les épreuves vécues. « Heureusement que les gps existe. T’as petite-sœur m’avait expliqué comment me rendre jusqu’ici, mais…  J'ai un mauvais sens de l'orientation. » Dire comme ça, oui c’était affolant de savoir qu’il était pompier. Néanmoins hors prendre le volant pour aller sur une intervention, le pompier se débrouillait bien en situation d’urgence à retrouver ses pas. Peut-être parce que dans ses moments-là, il était beaucoup plus concentrer et faisait plus attention pour se repérer.  

Stoïque, il observe l'homme qui lui fait face avec attention. L'architecte réfléchit à toute vitesse, et aussi à l'aise qu'il puisse l'être en société, il ne sait pas du tout quelle posture il doit adopter envers Hyeon Min. Il se racle la gorge, se maudit intérieurement d'avoir à agir ainsi. Après tout, dans d'autres circonstances il aurait sûrement apprécié le pompier. Son air sympathique, sa gentillesse flagrante et sa bonne humeur contagieuse, tout chez lui, lui confirmait que le courant serait passé à la perfection entre eux. Tout. Seulement voilà, Seul Woong n'est pas dans son état normal. Non. Lui qui est d'un naturel plutôt sociable n'a qu'une envie... broyer du noir, seul, dans son coin. Oh bien sûr c'est le mot SEUL qui prime sur tout le reste. Loin de lui l'idée de montrer à quiconque la moindre faiblesse. Ses parents ne l'ont pas élever ainsi. Né pour être un leader, fleuron de sa génération, il porte sur ses épaules le poids du nom qu'il porte. Seulement à quoi bon vouloir garder sa tête haute alors que ses fondations ne sont plus qu'une fragile base qui ne soutien que les apparences qu'il s'autorise à montrer ?

La voix de Hyeon Min le tire de ses idées noires pour le ramener à la réalité. Il secoue la tête légèrement dérouté alors qu'il lui tend une plante verte ornée de petit rubans. L'architecte s'en saisi et s'écarte tant bien que mal pour laisser passer son invité. Merci pour l'attention.dit-il en lui adressant les prémices d'un sourire. D'un geste il ferme la porte, avant de se diriger vers un plan de travail pour y déposer son cadeau. Ne fait pas attention aux puzzles sur la table basse, Seul Bi est légèrement envahissante quand il s'agit de ses hobbies...continu-t-il en lui désignant la table où des pièces dispersées partout forment les début d'un paysage. J'espère pour tes collègues que tu n'es pas chauffeur lors des interventions...tente-t-il pour apaiser la tension qui émane de lui. Après tout une petite blague n'est pas de trop, si ? Je viens juste d'arriver, cinq minutes en avance et tu te retrouvait devant porte close...dit-il en s'approchant de sa valise dans un grincement de roues. Hic. Hic. Hic. Il s'arrête avec un long soupir. Désolé pour les oreilles, c'est un prêt... Le miens devrait arriver sous peu. il baisse la tête un instant. Honteux ? Il ne sait pas trop comment caractériser les sentiments qui le transcendent et faire semblant devant l'homme qui lui a sauver la vie est bien plus difficile qu'il ne l'aurait pensé.

Doucement ses poings se resserrent laissant blanchir ses phalanges en toute discrétion. Se reprendre. Il faut qu'il se reprenne et ce n'est pas mince affaire. La peur de faire une crise d'angoisse est bien présente et pourtant il ne cille pas. Inspirer. Expirer. Son regard croise celui de Hyeon Min, sans pour autant le fuir. Une seconde puis deux s'écoulent. Un silence de plomb s'installe. Bine joué Seul Woong, on repassera pour l'hospitalité.

Se rendre chez le Kwon était-il une bonne chose ? Hyeon Min s’était posé la question, remarquant parfaitement bien que malgré ses efforts d’approche être en sa présence ne semblait pas… facile ? Son humeur joviale était peut-être de trop et pour une fois n’était pas capable d’apaiser les âmes. À cette pensée, il aurait dû juste dire tant pis, laisser tomber et ne pas en quelque sorte forcer le grand-frère de Seul Bi à l’accepter. Oui, il devrait sûrement agir ainsi, mais le pompier n’était pas du genre à baisser les bras et sans raison particulière, il avait juste envie de devenir ami avec le jeune homme. Il avait envie de lui montrer que même si la vie lui avait retiré la mobilité de ses jambes, la vie n’était pas finie pour autant. Sûrement Seul Woong penserait que c’était simple pour Hyeon Min de dire cela puisqu’il était valide. Il n’aurait en soit pas tout à fait tort, mais depuis la mort de ses parents, le Cha avait compris que la vie humaine était imprévisible. Elle pouvait prendre fin sans prévenir. C’était pourquoi, le coréen avait décidé de vivre chaque jour avec cette philosophie de vie positive, que tant qu’il respirait, il vivrait.

La plante offerte, son regard se porta sur l’intérieur du jeune homme qui à chaque petite avancé semblait couiner, difficile de ne pas le remarquer. « Elle aime donc les puzzles. » Hyeon Min ne cherchait pas spécialement à valider sa phrase, il avait très bien compris que parmi ses hobbies, le puzzle en faisait partie. C’était amusant, il n’aurait pas penser que la jeune femme aimait cela. Il évoqua son mauvais sens de l’orientation, une petite tentative pour essayer de détendre un peu plus leur relation qu’il souhaitait beaucoup plus confortable. Il le souhaitait, mais le Cha ne se précipiter pas, si Seul Woong avait besoin de temps pour s’ouvrir et l’accepter, il prendrait ce temps. « Ils m’ont interdit de prendre le volant. » Et ce n’était pas du tout une blague, ses collègues avaient vite compris son mauvais sens de l’orientation et sa capacité à se perdre. Par chance, lors d’intervention de force majeure, ce problème ne semblait pas s’exprimer une fois sur le terrain. « Mes collègues me taquinent beaucoup pour cela. » Oui, beaucoup. Fort heureusement, il n’était pas homme à se froisser aisément dès qu’on le chambrait. « Finalement, c’est une bonne chose que j’ai pris du temps à venir. » Sinon, il serait resté cinq minutes devant la porte en se demandant réellement s’il était à la bonne adresse.

Ses yeux se reportèrent un instant sur le garçon qui émit un long soupir comme d’agacement. Hyeon Min n’eut pas le temps de lui demander si quelque chose n’allait pas qu’il lui donna déjà la réponse s’excusant pour quelque chose dont il n’y pouvait rien. Il resta silencieux, un instant face à cette image de l’homme qui baissait la tête comme s’il était en faute de quoi que ce soit. Oui, ça le peinait de voir ainsi ce garçon qu’il ne connaissait pourtant pas réellement, juste quelque petite chose que sa petite-soeur avait pu lui parler. « Tu n’y es pour rien. » Pour cette chaise roulante qu’on lui avait prêté et même pour cet accident qui oui lui avait pris beaucoup. Certes, Hyeon Min ne pouvait pas réellement comprendre l’ampleur de la souffrance que sûrement Seul Woong était en train de vivre, mais il arrivait à penser que oui ce n’était pas facile, loin de là. Le silence s’installa un instant, laissant Hyeon Min dans une situation un poil gênante, parce qu’il se sentait un peu bête. « Si j’avais su, j'aurais dû apporter un peu d’huile lubrifiante en plus de la plante. » Encore fallait-il le savoir en amont que le fauteuil de Seul Woong grinçait à cause d’un manque de graissage des rouages. Vraiment, ils auraient pu y penser avant de lui prêter ce fauteuil. « À moins que tu en possèdes ? Sinon je peux toujours regarder, pour voir si je peux t’aider. Je ne promets pas de réussir, mais si j’arrive à atténuer, il me faut juste des outils. » À défaut d’être mauvais en orientation, il était plutôt bon de ses dix doigts et le bricolage était un de ses talents.

Ce n’est pas dans ses habitudes, non. Cet air morose, ce regard fuyant, cette voix blasée. A vrai dire, il s’insupporte depuis l’accident. Son mental n’a plus rien à voir avec celui qu’il s’était forgé autrefois. Toujours montrer le meilleur de soi-même. Garder la tête haute et un sourire rayonnant en toute circonstance. Voilà l’image qu’il avait souhaité renvoyer dès le plus jeune âge. Bien loin de la platitude imposée par ses parents, il avait souhaité s'imposer de cette façon et transmettre sa joie de vivre à sa petite sœur. Il fallait bien avouer qu’avec des parents comme les Lee, il était facile de plonger dans un écran de morosité. Il avait donc toujours mis un point d’honneur à mettre à l'aise ses interlocuteurs. Et aujourd’hui ? Il n’était de toute évidence plus d'aussi bonne compagnie. Il n’y avait pas à chercher bien loin pour le constater, il suffisait de lever les yeux pour voir tous les signaux envoyés par son « invité » du jour. Peut-être était-ce aussi le fait qu’ils avaient fait connaissance dans une situation particulière…Après tout Seul Woong n’est pas à son aise non plus. Il a beau se concentrer du mieux qu’il le peut, à chaque fois que son regard se pose sur Hyeon Min, l’odeur aseptisée de l’hôpital ainsi que les bruits de la machine lui rappelant que son cœur bat encore, reviennent à lui.

Un soupir franchit la barrière de ses lèvres, encore une impolitesse dont il aurait pu se passer. Est-ce vraiment nécessaire ? Alors il tente un brin d’humour. Au moins le pompier semble réceptif. Sa langue vient humifier ses lippes tandis qu’il hoche la tête pour confirmer les propos du brun. C’est bien de voir le positif comme ça. C’est ce qu’il aurait fait lui aussi en temps normal. En temps normal. Mais plus rien n’est normal. Soudain l’idée de rester coincée dans cette spirale dépressive lui traverse l’esprit. Et ce bruit de grincement qui l’agace. Rien n’est fait pour qu’il puisse enfin se remettre, rien. Si le pompier le connaissait à travers les descriptions de Seul Bi, il devait à présent être bien déçu. Alors il s‘excuse. Pour le fauteuil. Peut-être même pour ce moment gênant qu’ils partagent tous les deux. La remarque sur l’huile lubrifiante le fait ciller. Il n’y avait pas pensé, trop occupé à haïr cet engin qui ne remplacerait jamais ses jambes. Pourtant en prendre soin aurait dû être la première chose à faire ; mais comment réparer lorsque l’on est soi-même brisé ?

La voix de Hyeon Min lui fait comme écho. La réponse il lui donne sans vraiment le vouloir. Avec de l’aide Seul Woong. On avance en se laissant aider lorsque l’on en a besoin. Et là, à ce moment précis, il a besoin d’un coup de main. Avec ce fauteuil et aussi avec le reste. Je… Je veux bien oui. De quoi as-tu besoin ? dit-il tout simplement. Un peu surpris par sa réponse. Un début de résilience ? Il l’espère. A dire vrai, même si je suis plutôt manuel je ne pense pas savoir comment réduire à néant ce bruit des enfers…continu-t-il en laissant un rire lui échapper. Alors d’avance, merci… Mais avant souhaite-tu quelque chose à boire ? A manger ? Seul Bi fait toujours trop de pâtisseries quand elle vint à la maison.

Depuis la mort de ses parents, Hyeon Min avait changé sa façon de penser. La vie était bien trop fragile pour laisser les aléas de la vie et les soucis venir la gâcher. Certes, la situation du Kwon n’était pas facile, car la perte de l’usage de ses jambes représentait un bouleversement significatif dans sa vie et rien ne pourrait remédier à cela, mais il était en vie. La mort avait choisi de le laisser retourner auprès de ses proches plutôt que de leur infliger un profond chagrin. L’accident restait frais, digérer la situation était encore compliqué et cela, Hyeon Min le comprenait parfaitement. C’était pourquoi, il ne souhaitait pas le brusquer et préférait agir en douceur tout en restant optimiste. La vie n’était pas finie, même dans un fauteuil roulant. Bien que peut-être cela aurait été plus confortable si le fauteuil roulant en question ne grinçait pas à chaque avancée. Un son désagréable pour lequel le grand-frère de Seul Bi s’excusa, même s’il n’y pouvait rien. Immédiatement, Hyeon Min proposa son aide pour résoudre ce problème en attendant que le nouveau fauteuil soit livré. Il lui suffisait simplement de quelques outils pour s’en charger. « Si tu n’as pas d’huile lubrifiante, juste une trousse à outils. Je me débrouillerai. » Le pompier ne savait pas encore exactement comment il allait procéder, car il n’avait pas encore étudié les rouages du fauteuil, mais pouvait-il faire pire que maintenant ?

Il s’accroupit pour jeter un œil, mais ses yeux se reportèrent sur le visage du jeune homme qui lui demanda s’il souhaitait quelque chose. Un sourire se dessina sur ses lippes, montrant que Seul Woong faisait un petit pas dans sa direction. « Je veux bien savourer une délicieuse pâtisserie de ta sœur avec un thé, merci. » Il se releva, laissant Seul Woong préparer et lui apporter également les outils dont il aurait besoin. Il attendit patiemment, laissant ses yeux gambader sur la décoration intérieure.  « Seul Bi m’a dit que tu étais architecte. Est-ce une vocation que tu as toujours eue, ou bien es-tu tombé dedans par hasard ? » Si pour certain leur métier était une évidence depuis leur enfance, pour d’autres, la découverte de leur passion professionnelle pouvait s’être révélée au fil du temps, souvent par des expériences et des opportunités inattendues. Pour Hyeon Min, devenir pompier avait toujours été une évidence, car depuis son plus jeune âge, il avait profondément admiré son père, lui-même pompier. Il ne cessait de déclarer qu’un jour, il serait aussi remarquable que lui.  « Tu travailles sur des projets de maisons où tu t’occupes plutôt…. Hmmm… Genre, des bâtiments publics ou dans ce genre ? » Le métier d’architecte était plus nuancé que ce que les gens imaginaient. Après tout, comme de nombreux métiers, il était probable que les architectes aient également des spécialités vers lesquelles ils s’étaient orientés.

Il n'était plus qu'une cicatrice encore bien fraiche. Ses points bien trop serrés lui coupant la respiration. Au moins il n'était plus une plaie béante mais l'air lui manquait cruellement. Peut-être était ce du au fait qu'il se sentait piéger depuis qu'il avait perdu l'usage de ses jambes lui qui était fut un temps si libre et indépendant. Oui... C'était sûrement cela. Un oiseau en cage. Observant son entourage avancer comme si de rien était. La frustration était devenue monnaie courante pour Seul Woong, l'entourant de ses bras dés le réveil et lui rappelant sans cesse que la vie ne sera jamais plus ce qu'elle avait été. Terrible réalité qui le transperce en plein cœur alors que sous ses yeux son sauveteur s'affaire à prendre en charge son cauchemar ambulant. Ses yeux se balade sur cet homme qui lui rappel étrangement sa positivité d'antan.


Il hoche la tête à ses mots alors que son cerveau cherche déjà l'emplacement de cette foutue trousse à outils. Voilà, qu'il perds la tête maintenant.  Il tente un sourire sincère avant de se déplacer en direction de la cuisine afin de préparer un assortiment de pâtisserie à son invité. Enfin un peu de courtoisie. Ressaisis toi Seul Woong. se gronde-t-il mentalement. Après tout le chagrin ne devrait rien enlever aux bonnes manières. N'est-ce pas ? Alors qu'il s'affère à préparer son thé, un sourire lui échappe à nouveau. Peut-être est-ce parce qu'on lui parle de son métier ? C'est sûrement ça. C'est l'effet que ça lui fait à chaque fois qu'on aborde ce sujet avec lui. Oui. Seul Bi est une vrai pipelette dis moi...dit-il en déposant le plateau sur ses genoux et en se dirigeant vers le pompier. Et bien c'est une réelle vocation. J'ai toujours était fasciné par l'architecture des bâtiments et la complexité qui peut s'en dégager. il dépose le plateau sur la table basse ainsi que les pâtisseries concoctées par sa soeur. Mais je suppose que Seul Bi t'as déjà parlé de nos prents ? Et bien eux n'ont pas vu cette vocation d'un bon oeil. A dire vrai ils auraient préférés que je reprenne l'affaire familiale... il se penche pour attraper une tasse de thé et la tend gentiment à Hyeon Min. Manque de bol pour eux, je suis bien plus tétu ! fini-il en attrapant sa propre tasse. Et toi ? Je suppose que le métier de pompier est aussi une vocation ? Pour moi les métiers qui nécessitent de sauver des vies viennent de là... dit-il en montrant son propre coeur.

Hyeon Min se souvenait clairement de l’éclat dans les yeux de la jeune femme lorsqu’elle évoquait son grand-frère. À travers ses paroles, le pompier avait ressenti toute la fierté que Seul Bi éprouvait pour lui, ainsi que l’amour qu’elle lui portait. Le lien entre les deux Kwon était magnifique, et aurait été insincère de prétendre que le trentenaire ne les avait pas un peu enviés. En tant que fils unique, il ne partageait son sang qu’avec son cousin, qui était la personne de sa famille la plus proche de son âge. « Elle t’aime énormément. » L’autre trentenaire était probablement déjà conscient de cela, mais Hyeon Min faisait juste un constat après avoir passé du temps aux côtés de la demoiselle. Assit tranquillement, il observa l’hôte arrivée avec le plateau sur ses genoux, répondant à sa question. Le sourire de Seul Woong quand il lui parlait, ne lui échappa pas. Il ne se souvenait pas l’avoir vu sourire de cette manière depuis qu’il l’avait rencontré, du moins pas avec une telle sincérité.

Un rire s’échappa de ses lèvres alors que le jeune homme évoquait son tempérament assez têtu pour tenir tête à ses propres parents. Si c’était pour suivre sa passion, Hyeon Min ne pouvait pas lui dire qu’il avait eu tort de refuser de reprendre l’entreprise familiale. Pour lui, il était essentiel de suivre ses propres passions plutôt que de se plier aux désirs des autres. L’être humain n’avait qu’une vie à vivre, il était préférable de trouver le bonheur dans un travail que l’on aime plutôt que l’inverse. « Tu as eu raison. Je pense que faire un métier qui nous passionne est une bénédiction. » L’opportunité de trouver un travail dans lequel on se sentait épanoui ou impliqué n’était pas donnée à tout le monde. « En effet, c’est également le cas pour moi. J’ai toujours su que je deviendrai un jour pompier. » Depuis qu’il était tout petit, il avait toujours regardé son père avec une grande admiration, et après le décès de ses parents, ce rêve était devenu conviction. « Mon père était pompier. J’ai toujours voulu être comme lui et je suis fier de pouvoir suivre ses traces. » Parfois Hyeon Min se demandait si ce dernier était fier de lui de là-haut. « J’aurai aimé pouvoir partager cela avec lui. » Une pointe de tristesse imprégna sa voix, repensant à ses parents partis beaucoup trop tôt. Son regard se perdit un instant à la surface du thé, mais il reprit rapidement ses esprits. Sans doute Seul Woong ne devait pas comprendre pourquoi il évoquait son père de cette manière. « Mes parents sont décédés lorsque j’avais quatorze ans . » Le temps filait à toute vitesse, bientôt il aurait le double de cet âge.