Admirant le dressing de sa chambre d’hôtel, la demoiselle est ravie de voir de nouveaux vêtements s’ajouter à sa collection. Elle n’aurait jamais imaginé que des marques décident de créer un partenariat avec elle. Seohee a gagné en popularité et commence à inspirer la confiance des professionnels grâce à l’ancienneté et la pertinence de son blog. C’est d'ailleurs pour un évènement qu’elle s’est envolée vers Jeju, s’offrant quelques jours supplémentaires pour profiter du séjour. Elle n’est pourtant pas à sa première visite de l’île mais elle s’y plaît ici, comme beaucoup d’amoureux qui se baladent main dans la main, dans la rue. Elle ne saurait dire les motivations d’une telle escapade mais est-ce que les symboles bien célèbres de Jeju leur donnent des idées ? Drôle de question rédigée par un esprit bien tordu ou pervers. En tout cas, en cette soirée de Saint-Valentin, Seohee n’a aucun cavalier pour lui tenir compagnie. Elle compte bien changer la donne, maintenant qu’une opportunité lui est offerte.

En effet, à son retour à l’hôtel, une invitation lui a été tendue par un des hôteliers. Le restaurant prépare un menu spécial pour célébrer cette fête ainsi qu’une petite surprise pour les célibataires. Echanger un repas en compagnie d’une autre personne, histoire de ne pas être touchée par la solitude. Pour autant, le seul point négatif dans cette organisation, c’est d’être rangé d’office dans la case : hétérosexuelle. Enfin, ce dîner n’exige aucune obligation mais c’est sans compter sur les pensées de la belle Yun Seo Hee. Deux-trois jours plus tôt, elle avait aperçu un bellâtre dans la salle de sport. Elle avait même failli tomber du tapis de course en le regardant. Malheureusement, dans sa cascade, la jeune femme n’aurait pas pu se rattraper avec ses fesses. Car oui, c’est un peu comme sa vie sexuelle en ce moment, c’est le calme plat. Peut-être que les habitants de Gyeongju sont incompétents pour remarquer son sex-appeal mais elle a connaissance d’une seule et unique exception. Exception devant laquelle une pancarte stop est brandie fièrement. Enfin, après quatre ans d’absence, ce n’est pas le moment de recommencer les jeux puérils... Pas vrai ?

Vêtue d’une robe beaucoup trop habillée pour la majorité de la population, la jeune femme aime attirer les regards, d’autant plus quand ils appartiennent à des personnes déjà prises. D’après la légende, c’est sa marque de fabrique. Elle ne l’avouera jamais mais le petit diable dans sa tête se débrouille très bien pour toujours lui rappeler. Les interdits ne sont qu’une épreuve à franchir mais à quel prix ? Celui de la honte, peut-être ? C’est un sourire satisfait qui prend possession de ses lèvres quand elle aperçoit le sportif à une table. Une évidence frappante dont elle ne se plaindra pas. Seohee déborde de confiance en elle jusqu’au moment où passer une plante verte qui réduisait son champ de vision, une autre vérité éclate. Il était déjà accompagné ? Elle n’arrive pas à voir le visage de sa dulcinée mais ses plans sont contrecarrés par cette silhouette qui ne semble pas vendre du rêve. Maintenant, avec une telle entrée, c’est la demoiselle qui se transforme en plante verte. Ce n’est pas une histoire tirée de la mythologie, ça d’ailleurs ? Pas de dieu grec à se mettre sous la dent, c’est finalement un homme en dentier qui se lève, en se tenant le dos pour lutter contre les maux. “ Mlle Yu. “ Yu ? Elle se tourne, imaginant qu’il s’adresse à une autre personne mais le vieux a tout simplement écorché son nom. Comment le connait-il d’ailleurs ? Elle a visionné un épisode de la nouvelle saison de You, la veille. On ne lui fera pas !!! Son corps se crispe quand il tourne autour d’elle. “ Vous êtes ravissante. Votre robe brille de mille feux. “ Elle cherche ce salaud d’hôtelier, avec sa carte d’invitation pour lui mettre là où elle le pense. BIEN PROFOND. Dans la panique, Seohee ne parvient pas à trouver une autre table disponible. Contrainte, elle prend place en lâchant avec le maximum de politesse en sa possession. “ Et vous êtes ? “ Edmond, votre cavalier du soir, répond-il de toutes ses fausses dents. Le cauchemar commence, quand ses yeux se dirigent vers désormais cet homme qui devient un mirage. Peut-être qu’elle aurait dû être plus directe dans la salle de sport, la dernière fois...

« ça c’est Charlie, mon petit dernier. Je l’ai depuis… hum deux semaines ? J’aurais préféré qu’il soit encore bébé, mais il a déjà quelques mois. Il est balance, j’ai déjà eu un youyou balance et il était très paisible. Presque trop. Charlie a tendance à beaucoup parler. C’est un charmeur. Je crois qu’il est en bonne voie pour séduire Natasha. Tenez, elle est juste là. Oh, il faut à tout prix que je vous montre aussi mes perruches, elles sont incroyables.»
Il avait envie de crever.
Il s’en rendait compte maintenant. Si le restaurant n’avait pas été au rez-de-chaussée, il aurait peut-être tenté sa chance.
Est-ce que le couteau à côté de son assiette était assez tranchant ?
Est-ce qu’il devait plutôt céder au meurtre ?
Non. Il n’était pas comme ça. Lui, il était du genre à souffrir par bonté d’âme.
Mais tout de même… qu’est-ce qu’il avait fait pour mériter ça ?
Les questions de karma étaient venues hanter ses pensées tandis qu’il se remémorait les évènements de ces derniers mois.
« Ah, voici Satine, c’est la doyenne de mes perruches. Pour autant, elle n’a pas vraiment le rôle de leader. Elle a toujours été assez effacée. Le mois dernier, elle a été très malade, mais son docteur l’a sauvée et elle est de retour parmi nous. Je la vois un peu comme une survivante. Petite, elle a eu de nombreux accidents. Je me souviens encore de la fois… »
Mettre son cerveau sur off, ne plus écouter. C’était une option. Une excellente option.

Tout s’était enchaîné si vite.
Et lui, n’aurait jamais dû se trouver à Jeju. Assis à cette table, avec la dénommée Mirelle.
Il revoyait son oncle déprimer sur un énorme pot de glace, lui dire que ça n’avait pas collé avec sa fiancée - la dernière en date - et qu’ils s’étaient séparés. Il l’entendait déplorer le gâchis de ce pré-voyage de mariage qu’il avait organisé pour la Saint-Valentin. Il n’avait plus le cœur d’y aller, seul ou accompagné…
Et lui, tandis qu’il était assis près de son oncle dans le canapé, à essayer de lui remonter le moral, à lui tendre cette boîte de mouchoirs, il s’était vu offrir deux places pour un magnifique séjour.
Il s’entendait dire qu’il n’avait personne en ce moment. Qu’importe, il avait besoin de prendre un peu l’air avant la rentrée.
Il s’entendait également parler d’autres projets. Mais ça n’avait rien changé, il s’était retrouvé dans un avion en partance pour Jeju, puis dans cet hôtel. Changer d’air était en réalité sympa. La salle de sport était incroyable. Et les paysages à tomber pour y faire footing et randonnées. Mais ce matin-là, quand il était descendu pour aller faire ses traditionnelles dépenses, il avait été intercepté par le type de la réception.
Un type qui avait noté sa solitude et avait pris la liberté de l’inscrire au repas spécial Saint Valentin de ce soir.
Il avait d’abord protesté, et puis il s’était laissé convaincre. Pensant que c’était l’occasion de rencontrer peut-être une personne sympa et puis qui sait ?
Ouais… il n’était pas si intelligent que ça…

« ça a été très dur pour elle de perdre Jaki à l’automne dernier. Surtout qu’elle me l’a beaucoup reproché. C’est de ma faute, j’avais mal fermé la cage et Jaki s’est enfui. Il a toujours été du genre électron libre. Je pense aussi qu’il n’en pouvait plus de Satine. Jaki, c’était un Casanova. Une perruche dans chaque port comme on dit ! » … il était même clairement débile.
Mireille s’était mise à rire, pour la quatrième fois depuis qu’ils se trouvaient à cette table.
Elle avait un rire strident, perçant… on ne devait entendre qu’elle dans le restaurant, voir dans l’hôtel… et son rire avait cette manière de se terminer… ce grognement façon truie oui. C’était… disons que le charme s’était rompu dès que Mireille, la résidente de l’hôtel qui le collait depuis le jour de son arrivée et qu’il essayait en vain d’éviter dans les couloirs, s’était assise à sa table.
Mireille était folle d’oiseaux. Elle n’avait parlé que de ça… en défilant sa galerie photo d’un téléphone qui était remplie d’animaux à plumes.
« Charlie et lui auraient fait d’excellents amis je crois… ça me fait de la peine en y pensant. Mais j’essaie de me dire qu’ils se rencontreront dans une autre vie et qu’ils seront inséparables. »  qu’on leur apporte les plats, qu’ils mangent et fuient très loin d’ici… voilà son souhait le plus cher.

Son regard avait cherché le serveur des yeux… mais il était tombé sur elle.
La demoiselle de la salle de sport ou peu importe le surnom trouvé pour remplacer un nom qu’il ignorait.
Il avait pensé, qu’il aurait préféré de loin dîner en sa compagnie.
Non pas parce qu’elle était jolie. Vraiment très jolie d’ailleurs. Mais parce qu’elle n’avait pas l’air de parler d’oiseaux. Il était sûr qu’elle avait des conversations plus intéressantes.
Elle parlait musique, cinéma, sorties. Elle avait sans doute une vie palpitante… et pourtant… sur le coup, il avait cru lire dans son regard la même détresse qui devait se trouver actuellement dans le sien.
Presque un instant de télépathie. Le début d’une conversation composée de sos ?
« Heureusement, ils sont tous à la maison. Éternellement dans mon coeur. J’ai appris la taxidermie très jeune pour ça. »
…
Ok, il ne survivrait pas à ce repas dans sa totalité.
Mais au moins maintenant, il savait que si Jaki était parti, c’était plus probablement pour s’éviter de terminer sur une étagère lui aussi.
Vas-y Champion, Pars très loin et ne reviens jamais comme on dit !

Bien qu’elle ait quelques cadavres devant sa porte, Seohee ne pense pas mériter une telle punition. De loin, elle pense entendre les rires moqueurs des serveurs qui lui ont tendu ce piège. Un pari pour savoir quel client serait capable de tenir le plus longtemps en compagnie d’Edmond ? Pour gagner quoi au juste ? Des yeux loucheurs sur un décolleté plongeant qu’elle avait choisi de porter pour un autre ? Ce n’est pas comme s’il n’y avait grand-chose à voir dedans mais la pauvre demoiselle se sent offensée et blessée. Elle aurait pu profiter de sa soirée autrement au lieu de devenir une employée d’un ehpad. Il ne manque plus qu’elle doive lui torcher le cul. Soupir après soupir, l’étudiante en droit semble composer une nouvelle musique qui devrait faire top 1 dans le hit parade. C’est ça le nom du classement des meilleures ventes pour les vieux comme lui ? Si son père était là, peut-être qu’elle aurait pris une bonne paire de gifles, et pour le coup, elle serait presque ravie de les recevoir. “ J’ai prié tous les jours le seigneur pour que vous puissiez accepter mon invitation, mon enfant. “ Ce mec est quoi un curé ? Mais elle est majeure, d’habitude, ils les préfèrent un peu moins mûrs, non ? “ Je n’en reviens pas de pouvoir profiter de votre compagnie si délicieuse. “ Vu sa tronche, elle n’est pas certaine qu’elle soit si délicieuse - bien qu’elle accepte le compliment -. D’ailleurs, elle tente de faire redescendre le vieil homme, lui et son drapeau en berne depuis que Jeanine était décédée, vingt ans plus tôt, d’une rupture d’anévrisme après avoir éternué. “ Moi non plus. “ Elle relève le menton et cherche son point d’ancrage vers l’horizon. Elle jette un coup d’oeil sur son interlocutrice et découvre que les plis ne sont pas propres au facteur. Avec toutes les possibilités de recours à la chirurgie esthétique, c’est bien la première fois qu’elle voit un front si ridé. Elle devait certainement avoir beaucoup de soucis... Quoi qu’il en soit, Seohee avait certainement perdu face à elle et c’est affligeant. Est-ce que cet homme était un escort ? Impossible. Elle l’aurait remarqué bien avant mais alors ? Est-il aussi victime d’un complot ? Ou a-t-il commis un crime dans sa précédente vie ? Seohee met une pièce sur la deuxième option sous prétexte que le jeune homme était beaucoup trop canon pour être un simple humain. Démoniaque, il attirait certainement beaucoup de regards dans l’assemblée. Pourtant, c’est elle qui parvient à croiser le sien. Trop insistante, manque de discrétion, elle a l’impression de voir son reflet. Sa détresse semble se lire dans ses yeux, mettant un terme sur ses derniers doutes relatifs à sa profession. Mais malgré tout, la demoiselle ne perd pas le nord. Elle le gratifie d’un sourire et joue avec sa chevelure d’une façon peu naturelle. Il est désormais trop tard pour manger à sa table mais elle ne peut pas s’empêcher de vouloir s’amuser.  

Les plats sont ensuite apportés par un serveur. Par chance, celui-ci lui prête main forte en remplissant son verre de vin. Vient une dégustation dans laquelle la brune trouve refuge alors qu’elle ne fait pas l’effort d’écouter Edmond. Ça lui rappelle tristement quand sa mère lui parle au téléphone et qu’elle se contente de lâcher des “hm” sauf que la différence, c’est qu’elle aime sa mère. Cet homme ? Qu’est-ce qui peut lui apporter ? Si ce n’est de l’urticaire et un postillon qui plonge dans son assiette. La mine légèrement dégoutée, elle croise le regard d’Edmond qui ne remarque rien. Ça dégoûte. Elle ne peut pas toucher son assiette alors il est nécessaire de préserver son verre, qu’elle met volontairement en retrait. Quant à lui, ses joues sont toutes rouges. Soit l’homme passe trop son temps à boire le vin de messe, soit il est vraiment shy shy shy, comme dans la musique niaise de twice. Il a en tout cas déjà descendu un premier verre, certainement pour se donner du courage. “ Ce vin est très bon, vous ne trouvez pas ? “ Oui, Seohee vient de lui faire la conversation quand elle glisse finalement sa main sur la bouteille. “ Je vais vous resservir. “ Elle a du mal à cacher son excitation. Ce petit sourire en coin ne préserve rien de bon, quand, par maladresse, Edmond cherche à se lever avec son pauvre dos, refusant d’être servi. C’est le rôle du serveur, pas d’une belle dame, pour citer ses mots. Malheureusement, le drame se passe quand le vin rouge vient tâcher son pantalon. Confus, il s’excuse avant de s’absenter. Maintenant, c’est le bon moment pour fuir. Tant pis pour le repas gratuit... Mais d’un autre côté, quelque chose semble la démanger. Peut-être qu’elle pourrait devenir une héroïne pour le mec de la salle de sport... Il est en mauvaise posture. Doit-elle faire preuve de charité ? C’est ce qu’elle tend à savoir, en regardant de nouveau vers sa direction. Elle articule silencieusement : “ Vous venez ? “ Pas à sa table. Elle ne veut pas lui proposer des postillons en guise de dîner mais elle imagine que l’hôtel peut les servir ailleurs... Ou qu’un livreur uber eat pourrait sauver la soirée.  C’est bien pour cette raison qu’elle se lève dans l’espoir de quitter les lieux. Mais s'il ne peut pas la rejoindre maintenant, peut-être que ça pourrait être le cas plus tard. Dans ce cas, elle aurait dû songer à lui donner un point de rencontre. La salle de sport alors qu'elle n'a pas eu l'opportunité de croiser son regard ? Le pari est risqué.

« Je crois que c’est pour ça que je suis encore célibataire… » parce qu’elle empaillait ses oiseaux et devait en avoir partout chez elle ? C’est sûr que lorsqu’on n’était pas très taxidermie, ça devait avoir le don de vous mettre mal à l’aise « En réalité, je suis trop difficile. Je ne recherche pas seulement un mâle pour copuler… » à l’aide. Sos. Que quelqu’un lui vienne en aide « Mais le père de mes enfants surtout. Un mari qui aura la fibre paternelle. » est-ce qu’il souffrirait beaucoup maintenant s’il plantait ses couverts dans sa carotide ? S’il visait bien, en comptant sur ses compétences en anatomie, il avait de bonnes chances de se vider rapidement de son sang sans trop souffrir « C’est pour ça que, en voyant qu’un homme aussi bel homme que vous s’intéressait à moi… » il avait manifesté une forme d’intérêt ? Quand ça ? Est-ce qu’il avait fait ça inconsciemment ? Est-ce qu’une expression sur son visage l’avait poussé vers la mort ? « … je me suis dit vas-y, c’est ta chance. ça se voit qu’il sera doux avec les enfants.» peu importe. De toute façon, il ne survivrait pas à ce dîner … « Même si j’espère que vous serez un peu plus sauvage au lit avec moi tout à l’heure. » noyé, par son verre. Voilà comment il allait mourir. C’était du moins ce que cette gorgée avalée de travers avait décidé pour lui. Secoué par une toux violente, il aurait apprécié ne pas partir, là, le dos tapoté par une taxidermiste.
Sa main agitée pour lui faire comprendre que c’était inutile, qu’il préférait encore crever en somme, la femme avait persisté jusqu’à ce que la toux s’arrête.
Les larmes aux yeux, la gorge en feu, son regard avait à nouveau cherché une issue de secours.

Et à nouveau, il était revenu vers la même demoiselle. Demoiselle avec laquelle il avait l’impression de tester la télépathie.
Elle n’avait pas l’air de passer une très bonne soirée non plus.
Ce n’était peut-être que son imagination, mais il avait l’impression de lire dans ses pupilles le même sos renvoyé par les siennes. Alors, son sourire, il y avait répondu. Le sien formulait peut-être un brin d’excuses. Est-ce que son compagnon de table parlait de taxidermie lui aussi ?
Un instant, il avait détaillé l’homme des yeux et il avait jugé le livre à sa couverture. Il faisait un peu “pervers inquiétant”, le voisin angoissant avec une collection de petites culottes.
Une envie de fuir. Une envie de sauvetage. Les deux n’étaient pas incompatibles…

« Il ne faut pas être si timide avec ça. C’est naturel. Nous sommes nés pour procréer. » qui aurait pu lui reprocher son manque de correction ?
Pourtant, tandis que le si lisse jedi se perdait à élaborer un plan peu aimable, l’agitation à l’autre table en détresse avait attiré son attention. Sa camarade d’infortune semblait s’être trouvé une issue de secours qu’il lui avait enviée.
Est-ce qu’il pouvait user de maladresse lui aussi ?
En proie à la tentation, il avait fixé la bouteille un instant avant de retrouver le regard de la demoiselle… héroïne du soir.
« Et je ne suis pas contre l’entraînement avec un préservatif.»
… est-ce qu’on disait non à une super héroïne ? Est-ce qu’on répondait “Laisse-moi crever” à une main charitable.
Non. La réponse était non. Et sans plus hésiter, il s’était relevé pour jouer les lâches comme il l’avait parfois tant fait enfant « Je reviens. Envie pressante. » un petit mensonge de temps en temps n’avait jamais fait de mal à personne.
Et pour être tout à fait honnête, la folle aux piafs ne lui avait pas laissé le temps de culpabiliser.
Quand il était passé près d’elle, et qu’elle lui avait mis sa main au cul d’un « Tarde pas mon cacatoès. » … ses pas, au risque de démasquer sa fuite, s’étaient fait plus rapide.

Oh ça oui, il l’avait rejoint l’inconnue de la salle de sport. Il avait pressé le pas à ses côtés et ce n’était que proche de la sortie que le jedi et ses beaux principes était mort « Tirons nous vite d’ici, par pitié. » à l’aide. Grâce. Les femmes au pouvoir. « Très loin d’ici. » oh ça, on voulait bien le croire le far, far away. Sans réfléchir à une destination, il s’était retrouvé à l’extérieur pour sentir le vent de liberté sur son visage. Ce n’était que là qu’il avait enfin regardé sa sauveuse, qui n’avait pourtant fait que l’inviter à réveiller son instinct de survie, qu’il avait repris la parole « Merci. Cinq minutes de plus là-bas, et je virais fou. » faut dire que, pour sa défense, il n’était pas tombé sur la plus charmante des cavalières « Et je crois que sans vous, j’acceptais mon funeste destin. ça mérite au minimum que je vous offre un verre. »

Désormais libérée de son gourou, une étrange sensation continue de s’emparer de son corps. Dans le hall, presque saine et sauve, elle devrait pourtant être soulagée mais elle a l’impression d’avoir été salie. Elle caresse l’ensemble de ses bras comme si elle avait froid mais Seohee cherchait surtout à essuyer toute trace du regard de vieux Edmond. Au moins, il n’a pas eu l’indélicatesse de la toucher. Dans ce cas, elle aurait certainement crié et fait une scène. Elle ne comprend toujours pas pourquoi un tel incident est survenu. Devrait-elle faire un procès contre l’hôtel ? Il n’est pas bon de fâcher une étudiante en droit. Ces derniers se sentent souvent poussés des ailes, comme si le monde leur appartenait. Pourtant, quand on analyse la précédente situation, on se demande comment Yun Seo Hee pourrait avoir un tel ressenti jusqu’au moment où elle est rejointe par un invité bien plus agréable. Si elle aurait employé volontiers d’autres moyens, elle avait eu ce qu’elle voulait : le plaisir de sa compagnie. La belle a du mal à cacher son sourire et suit son invitation à rejoindre l’extérieur. D’ici, ils seront moins visibles si leurs comparses auraient la mauvaise idée d’aller les chercher.

L’air frais lui provoque un soupir de soulagement. Ce dîner est enfin terminé pour tous les deux. Il ne reste que le traumatisme à détruire mais pour y parvenir, ils vont devoir s’armer de patience et changer d’horizon. L’étudiante se retourne vers lui et lui offre un nouveau sourire. “ Je n’ai pas fait grand-chose. “ Fausse modestie ? Non. Pour le coup, la demoiselle est réaliste. Elle ne l’a pas aidé directement. “ J’ai juste été la lumière d’un phare pour vous sauver d’un naufrage. “ De postillons, lui aussi ? Mais si un simple éclairage lui permet d’avoir droit à un verre minimum, elle ne compte pas se faire prier. “ Avec plaisir. “ Son regard se porte vers l’intérieur de l’hôtel. “ Je regrette de ne pas avoir embarqué la bouteille de vin. Il était plutôt bon mais … Il ne doit plus rester grand-chose dedans. “ Et elle en est fière pour se vanter ainsi, auprès d’un inconnu. Un rire s’échappe de ses lèvres. “ Il y a un bar aux abords de la plage. Ça vous tente ? “ Elle n’a pas envie d’être enfermée toute la soirée dans un lieu blindé. Une petite promenade nocturne ne ferait pas de mal pour se changer les idées, même s’il risque de faire un peu trop froid. “ Je me demande qui est le responsable de ce fiasco. J’espère qu’ils n’auront pas la fâcheuse idée de me faire remplir une évaluation pour donner mon avis. “ Puis, un sourire en coin se dessine sur ses lèvres. “ Mais votre partenaire semblait plus charmante que le mien. “ Mais pas autant que l’actuel. Non, il y a bien un monde entre eux. Ce n’est pas de la discrimination envers les personnes âgées mais si elle devait partager un peu de salive avec quelqu’un ce soir, c’était certainement cet homme dont elle ne connait guère le nom, qui gagnerait le concours haut-la-main. Peut-être qu’avoir rencontré Edmond avait eu du bon, à un moment donné. Elle hèle un taxi, officialisant la séparation avec leur rencard forcé.

Pas fait grand chose. Pas fait grand chose. C’était vite dit.
Sans elle, sa camarade de table serait peut-être déjà en train de prendre ses mesures dans le cadre d’un funeste projet.
Sans elle, une femme le regarderait peut-être en s’imaginant la posture qu’elle lui ferait prendre à son empaillement.
Le début d’un traumatisme frôlé de près. A moins qu’il ne soit déjà trop tard pour lui et qu’il en fasse des cauchemars cette nuit. Comme un gosse qui débloque la peur des clowns à la foire, il avait peut-être débloqué celle des folles taxidermistes.
« Je suis presque sûr que vous venez de me sauver la vie alors… ne minimisons pas l’héroïsme. » Plus que la lumière d’un phare, la demoiselle prend les traits de son nouveau personnage Marvel favori.
Aucune exagération là-dedans, il fallait vivre ce début de dîner catastrophique pour le comprendre.

Alors, naturellement, et de manière tout à fait juste, il lui propose un verre plutôt qu’un vol « Et emporter un mauvais souvenir de ce dîner ? J’opte pour le bar. » il lui laisse indiquer le chemin, marche à ses côtés, et retrouve même rapidement une humeur plus légère tandis qu’elle lui parle de ce fiasco dont il partage la définition.
Un sourire passe sur ses traits avant qu’il ne réponde « Personnellement, je compte mettre une étoile symbolique étant donné le début de soirée. » peut-être la suite serait-elle meilleure ?
Supposition qui vient effleurer ses pensées tandis que ses yeux dévient vers le visage de sa nouvelle camarade.

C’est bizarre… une vague impression… presque comme un sentiment de déjà-vu. Quelque chose sur les traits d’un visage qui lui fait perdre un instant le fil de ses pensées.
Ses sourcils se froncent un instant, il réfléchit et manque de lui poser la question classique, celle dans le top du dragueur, la fameuse “Excusez-moi, je ne vous ai pas déjà vu quelque part ?”... passer pour le dragueur amateur, il ne le fait pas ceci dit. La remarque de la demoiselle le ramène à la réalité et un soupir accompagne ses lèvres qui s’étirent, un rire silencieux avant de répondre « La mienne était taxidermiste, assez imprévisible, sans peur… et je la soupçonne d’avoir eu un projet d’empaillement. Allez-y, faites mieux que ça. » qui mérite ce soir le certificat de la pire soirée ?
Bonne question. Question à laquelle ils n’ont pas encore répondu quand, quelques instants plus tard, il tire la chaise de la jeune femme pour lui permettre de s’asseoir sur une terrasse à la vue vraiment pas si mal.
Puis il s’installe à son tour et son regard se perd un peu sur la plage avant de reprendre la parole « Je pense qu’on est en sécurité. On a une vue dégagée s’il faut fuir. » et elle en aura peut-être l’envie si, par sa faute, elle se rend compte que son nouveau cavalier du soir est un Mister Carambar.

Cette fausse modestie ferait rire ses proches. Si la jeune femme voulait minimiser son impact sur le garçon, il faut surtout prêter attention à ses mots. Il n’est pas question de se comparer à une vulgaire bouée de sauvetage quand elle a la politesse d’être une lumière. Il ne manque plus que les cheveux au vent et qu’elle change son état civil : déesse. C’est le minimum syndical pour la remercier mais encore pour gagner quelques points auprès du sportif. Le sentiment désagréable ne peut pas fuir tous ses bons souvenirs à la salle de sport de l’hôtel. C’est bien ce qui la motive à l’inviter dans un bar, aperçu la veille. Jusqu’à ce soir, Seohee ne savait pas si elle pourrait trouver un cavalier pour lui tenir compagnie. Maintenant ? Ils ont tous les deux un point en commun, ce qui ne les incite pas à séparer leur route dans l’immédiat. La belle étudiante saisit cette chance, comme si elle était une experte en la matière. Et pourtant, quand on se concentre sur ses relations amoureuses passées, la jeune femme possède de sacrés échecs, surtout concernant un certain homme. Enfin, il n’est pas question de ressasser le passé et de penser à son vieux camarade. “ Vous avez raison. Autant embellir notre soirée avec de bons souvenirs ! “ Repartir de bon pied. Image qui s’illustre par un hôtel dans leur dos, de plus en plus loin.  “ Vous êtes bien généreux… “ Une étoile symbolique ? Que nenni. Seohee sera un sombre personnage en laissant toutes les étoiles de l’évaluation dans l’obscurité la plus profonde, et ça, sans aucune compassion. Enfin, l’hôtel, sans le vouloir, lui avait peut-être donné un coup de main.

La vue du bar lui provoque un soupir de soulagement. Le vent marin lui donne une sensation de liberté qui était bonne à prendre. Malheureusement, certains animaux n’ont pas eu cette chance. Grimaçant, Seohee réagit sans attendre une réponse de sa part. “ Berk. Ça existe encore ce genre de trucs ? “ Est-ce que cette vieille dame chassait ? Du jeune homme, oui mais…  Un sourire se dessine sur ses lèvres quand il tire sa chaise, tel un parfait gentleman. Décidément, il avait presque tout pour lui, en plus d’avoir une charmante demoiselle avec lui, ce soir. “ Hm, un chrétien à la recherche d’une pécheresse pour rallumer son cierge. Par tous les dieux, mes plats ont été bénis de sa salive. “ Elle pourrait lever ses bras comme si la jeune femme était en quête de réponse. “ Désolé, c’était un peu déplacé. “ Il lui cause un énième frisson désagréable, en espérant que ça soit le dernier de la soirée. Enfin, à sa remarque, le regard de Seohee se dirige vers la plage. Elle plaisante à son tour. “ Je ne suis pas sûre d’aller très loin avec ma robe… Ni avec mes chaussures. “ Elle pourrait courir pieds nus. “ Je n’ai plus qu’à espérer de me transformer en sirène pour prendre le large. “ Puis, elle sourit. “ Je vous avais dit que le bar était bien localisé. J’ai toujours eu bon goût… C’est d’ailleurs pour cette raison que je vais entamer cette nouvelle soirée en compagnie d’un bon mojito. Vous me faites encore confiance pour ce coup ? “ Un serveur se présente à eux et elle laisse le plaisir à sa nouvelle connaissance de faire son choix. “ Qu’est-ce qui vous a fait venir ici ? “ Le business, de simples vacances ? Il est temps d’apprendre à se connaître au lieu de parler de ces deux personnes, qui resteront à jamais, leur pire souvenir.

Il ne pensait jamais se le dire un jour mais oui… le bar ressemble bien trop à un sauvetage sur le moment.
Une véritable terre d’accueil pour âmes en perdition.
Pour un peu, l’un comme l’autre, ils auraient presque pu gueuler un droit d’asile en montant les marches.
Mais non. Il y a un peu plus de distinction dans la scène. Une chaise tirée, puis une conversation sur son pire cauchemar dans les mois à venir. Conversation autrement résumée d’un : Qui a eu le pire rencard ce soir ?
Aucune exagération dans son discours, il pense qu’on lui a dégoté la vraie psychopathe du lot. Celle dont il verra la photo d’ici quelques mois dans le journal à la rubrique des faits divers.
Et s’il est donc certain de ce fait que l’inconnue aux traits empreints d’une étrange nostalgie est son héroïne, il ne demande pourtant pas le nom de celle à qui il doit tout.
Le manque de curiosité fait bien les choses.

« Faut croire. Chez les personnages principaux de films d’horreur en tout cas. » pauvre trésor. Toujours assigné aux rencards qui tournent mal. Quand ce n’était pas son ex qui venait tout faire planter, on le sabotait en lui refilant une membre de la famille Adams à sa table. A ce stade, il était destiné à rejoindre les clans des purs. Il aurait au moins le privilège d’en rencontrer le président. Un avocat, peu sensible au charme des loutres, et amateur de randonnées dans les montagnes tout comme lui : quelle chance.
Ceci dit, est-ce que le type prêcheur/pêcheur ne vaut pas sa psycho ? Sa main s’agite pour les excuses, et il lui accorde le droit de figurer sur le podium du désespoir « Hum. Ok, c’est un noble score. »
Et pour ce qui est de la fuite.
Le galant homme pourra toujours la porter sur son dos. C’est la moindre des choses après ce qu’elle vient de faire pour lui.
« Alors deux mojito. » si rare qu’il boive oui. Un exploit de ne pas le voir commander un coca light. ça doit être l’effet frôler la mort «Et au cas où, je suis prêt à faire diversion pour rembourser ma dette. » un peu comme se foutre au sol et laisser les zombies le bouffer le temps pour elle de courir au loin « Mon oncle. Il m’a offert son séjour avec son ex, qui ne l’était pas encore à l’époque. » l’avantage quand on ne se connait pas, on peut se permettre d’étaler directement le pathétisme familiale sur la table tandis qu’un serveur s’en éloigne « Et vous ? A part dîner sous la pluie ? » une nouvelle version tout en postillons que Gene Kelly  n’aurait sans doute pas approuvé « Désolé. C’est encore trop tôt hein ? » bah ça dépend, est-ce qu’il avait déjà envie de parler d’oiseaux empaillés lui ?
Non. Fuir la soirée foirée, la rendre un peu mieux. Et la tradition de ce genre de situation veut  qu’on commence toujours par une interview « Vous faites quoi dans la vie ? »

Chasser les mauvaises ondes avec un bon cocktail est une bonne technique ancestrale. Il n’est pas question de s’enivrer avec des boissons pures. La jeune femme veut garder les idées claires ce soir et ce n’est pas un simple mojito qui sera en mesure de contrecarrer ses plans. Néanmoins, elle compte sur le jeune homme pour l’accompagner jusqu’au bout. Il vaut mieux partager une boisson en commun qu’un tel souvenir… En attendant leur commande, Seohee commence à s’interroger sur sa présence ici. Le séjour à l’hôtel explique qu’il n’est pas de Jeju mais d’ailleurs. Alors, qu’est-ce qui l’a incité à venir sur l’île en plein hiver ? Ce n’est pas forcément la meilleure période de l’année pour profiter des bienfaits de Jeju. Pour autant, c’est bien elle qui a proposé de se rendre à un bar situé près de la plage. Mais à quoi bon venir à Jeju si on ne compte pas profiter de la mer ? S’il n’est pas question de s’élancer sur un bain de minuit, le littoral est toujours agréable à voir, contrairement au vent marin qui lui a provoqué plus d’un frisson en arrivant. L’alcool la réchauffera un peu. Ajustant son manteau sur le dossier du siège, elle esquisse un sourire. “ Ah merde. “ Pas de bol. “ Il n’a eu le courage de venir ici tout seul ? “ Tout dépend si la rupture est difficile à vivre. Elle pince ses lèvres avant d’ajouter : “ Vous auriez pu venir accompagné aussi. Vous n’avez pas eu le temps d’inviter quelqu’un ? “ Un beau bougre comme lui ? Compliqué de croire en son célibat, même si le pauvre s’est aussi retrouvé dans une situation délicate.  Mais en tout cas, les questions ne sont pas posées innocemment contrairement à la réplique du garçon. Elle se met à rire. “ Je ne l’avais pas vu venir celle-ci ! Vous devriez faire attention si vous ne souhaitez pas que je vous renvoie la balle… “ Retenant une grimace, elle savoure une gorgée de mojito avant de lui répondre. “ Je suis ici pour le travail justement. Je suis étudiante en droit mais à mes heures perdues, j’écris des blogs sur la mode et j’ai commencé à sympathiser avec une professionnelle qui me permet de voir les backstages un peu… Mais je suis venue toute seule ici. “ Comment qualifier Miran en un seul mot ? Impossible si ce n’est avec le mot queen. Elle se demande comment c’est possible de savoir faire autant de choses… Seohee fait pâle figure à côté. “ Mélange un peu particulier, je l’avoue mais les deux univers me définissent bien. Si vous voulez déposer plainte, je suis votre femme ! “ Dit-elle en rigolant. “ Et vous donc ? A part récupérer les séjours des malheureux ? “ Elle peut bien charrier un inconnu. “ Vous occupez comment votre temps libre ? En dehors du sport. J’ai eu l’occasion de vous voir à l’œuvre. “ Sous toutes ses formes et positions. Hm, petit dérapage rapidement contrôlé. “ Désolé de vous l’avoir caché mais nous nous sommes croisés un peu plus tôt. “ A voir si elle était la seule à l’avoir aperçu ou non. Une belle prise de risque pour l’avocate !

A part pour le boulot, son oncle n’avait jamais été le genre grand solitaire.
Quand il était à la maison et qu’il devait sortir faire une course, il avait le profil du mec qui vient vous trouver pour savoir si vous ne vouliez pas l’accompagner. Petite moue en prime, comme un enfant qui quémande, il était plus le type à s’ennuyer facilement avec sa seule compagnie.
C’était peut-être en partie pour ça qu’il ne savait pas non plus rester célibataire.
Pour ça, et parce qu’il avait un coeur trop faible capable de tomber amoureux à chaque coin de rue.
Un grand besoin d’aimer. Voilà la maladie dont son oncle souffrait. Une maladie qui pouvait le rendre adorable, comme désespérant.
« Mon oncle n’est pas exactement le genre à avoir envie de se montrer brave versus la solitude. » alors il n’essayait même pas… et il refilait le tout à son neveu en pensant que ça lui ferait plaisir.
Et en ce qui le concernait… il était sans doute trop courageux avec la solitude.
Pour sa défense, son enfance l’avait forgée à la supporter.
« Non. La plupart de mes amis étaient occupés. Et quand je vois mon date de ce soir, j’me dis que je leur ai au moins épargné un traumatisme. » qui sait, l’un d’eux aurait peut être eu la mauvaise surprise de se faire empailler dans les soubassements « Et puis, vous faites partie du club des braves aussi à priori. » pas de point d’interrogation, mais la curiosité le sous-entendait sans doute un peu. Comme une attente de la voir rebondir pour l’entendre raconter un bout de sa vie.
Sensation familière. Ou autre chose. Peut-être simplement le fait que de se retrouver avec son héroïne du soir lui donne envie de la connaître.

Finalement, il ne lui épargne pas tant les questions ouvertes et pioche les renseignements plus directement.
Chacun son tour après tout. Même pour la douche ?
Il préfère éviter à en juger par la grimace qui passe ensuite sur ses traits sans pour autant chercher à imiter celle de sa camarade.
« Il y a comme un genre d’évènement dans le coin ? Désolé, j’suis novice. En réalité, presque un ignare. » presque parce qu’il a un dressing et sait assortir ses fringues ?
Son oncle aurait été plus intéressant pour elle tout à coup. Lui, il avait les aptitudes pour blablater plus facile de mode «En revanche, pour ce qui est du droit, j’ai justement rencontré une meurtrière ce soir. J’ai de quoi faire un dossier. » pas sûr que ce soit recevable pour quelques oiseaux… mais il y avait peut-être d’autres cadavres à découvrir.
La soirée n’est cependant pas vouée à devenir une murder party.
Niveau droit, il y aurait pourtant matière à fouiner dans son cabinet
« Oui. Je vous ai reconnu. » bizarre comme aveu non ? Un peu inquiétant alors qu’elle n’avait rien fait de bizarre « J’veux dire, je vous ai vu à l'œuvre moi aussi. » c’était pas encore plus bizarre ça ?
Le boulot. Parlons plutôt du boulot en trinquant avec des mojitos.
« Je suis étudiant. En architecture. Et je fais quelques heures dans une boîte. Rien de fameux, j’suis juste l’expert en photocopies et en café. Si jamais vous voulez passer commande, je m’en sors très avec le cappuccino. » d’accord il y a un truc.
Il ne sait pas si c’est une espèce de malaise. Une impression étrange ou autre. Mais il y a un truc. Et d’un coup, il se sent un peu étrange. L’idée d’être resté silencieux une seconde ou deux de trop en la regardant.
Son mojito. Voilà ce qu’il regarde alors avant de finalement avouer « Tous les deux, on ne se connait pas d’ailleurs hein ? J’sais pas, j’ai l’impression… y’a un truc nan ? » et là d’un coup, tu passes pour le dragueur aux répliques fabriquées. Bien joué Su Hwan !

Certaines personnes sont tellement habituées à être entourées qu’elles ne savent pas comment se comporter quand le calme revient dans leur vie. Seohee a déjà fréquenté quelques hommes dans sa vie, des relations plus ou moins longues mais n’a jamais considéré que c’était son objectif principal. C’est peut-être ce qui finit par se passer quand vous ratez le coche avec un homme pour lequel vous avez ressenti énormément de choses. Est-ce que ça justifie une énième solitude à la Saint-Valentin ? Pas vraiment, maintenant qu’elle s’est trouvée une compagnie bien plus intéressante que la première. Surtout que désormais, elle comprend qu’elle a le champ libre. Est-ce qu’elle utilisera ses arguments à l’égard de l’homme de la salle de sport ? Ce serait un fantasme qui deviendrait presque réalité. L’adolescente en elle serait fière de son parcours. Pour autant, elle n’est pas sûre de savoir où leurs échanges les mèneront. Car même si elle s’offre le choix de le séduire, Seohee ne se sent pas non plus obligée de poursuivre vers cette voie. Pour la raison qu’elle finit par expliciter à haute voix. “ J’apprécie ma propre compagnie, oui. “ Elle esquisse un sourire amusé. Il faut savoir relativiser dans la vie, même si elle entend que ce n’est pas toujours évident. “ Presque ? Vous êtes impeccable dans cette tenue. “ Cet homme fait preuve de fausse modestie… Mais il est vrai qu’il pourrait encore s’améliorer. “ Pour répondre à votre question, il y avait une soirée privée pour célébrer l’ouverture d’une grande boutique. Avec une nouvelle collection… J’aurais bien voulu récupérer une pièce de celle-ci. Mais j’imagine que je devrais déjà être fière d’avoir été invitée. “ Elle ne compte pas en faire son métier. Et dans tous les cas, si elle finit par gagner en popularité par la suite, elle restera toujours la sœur de. Et c’est cette même sœur qui aura le droit de porter une tenue inédite. Le monde est mal fait. “ Ça aurait été possible… Mais il aurait fallu des preuves et apparemment, vous n’avez pas eu le cran d’aller plus loin. “ Haussant les épaules d’un air suffisant, la belle le taquine également sur ce terrain avant de passer aux aveux. Peut-être qu’elle avait été une criminelle à l’épier alors qu’il était en train de transpirer. Une criminelle qui avait été prise en flagrant délit et pour l’instant, personne ne lui avait mis des menottes aux poignets. Ça s'annonce bien pour elle, non ? Seohee a du mal à dissimuler son sourire. “ Ah bon ? Je n’aurais pas utilisé le mot œuvre… Je ne suis pas prête à faire un marathon… Vous avez dû vous moquer. “ Et peut-être qu’elle tend la perche pour avoir le droit à un compliment. Perfide… Une tactique digne d’une bonne petite coréenne. Innocente, qui manque de confiance en elle. Tout l’inverse de la vraie personnalité de Yun Seo Hee, qui n’hésite pas à en rajouter une couche. “ C’est bien pour ça que je n’ai pas osé aller à votre rencontre plus tôt. “ La vérité ? C’est qu’elle imaginait sa petite-amie trop occupée à faire sa manucure pour lui tenir compagnie à la salle. “ Oh… Un stage très pertinent… Ne m’en voulez pas mais je ne suis pas sûre de vous confier encore la construction de ma maison. “ Appréciant finalement leurs échanges, Seohee n’arrive pas à déceler le malaise du garçon avant d’échapper un rire dans la même thématique à son tour. “ Alors celle-ci, je ne l’avais jamais entendu. “ Mensonge, bien évidemment. La brune penche légèrement la tête vers lui et décide de jouer sur l’ambiguïté. “ Ça dépend à quoi vous faîtes référence avec votre truc. “ Il aurait suffi de passer aux présentations pour dissiper cette sensation de déjà vu. “ Je ne pense pas vous avoir déjà vu… J’ai tendance à bien mémoriser les visages et je me serais souvenue de vous. Mais peut-être que mon prénom peut vous aider ? Je suis … “ Seohee. C’est ce qu’elle prononce mais c’est sans compter sur une soudaine agitation derrière le bar qui doit déformer ses propos. Le garçon a sûrement dû entendre autre chose. “ Un autre mojito avant qu’ils ne cassent tous les verres ? “

Il n’en n’a pas entendu parler, ou vaguement. Maintenant qu’il y pense, ou plutôt qu’elle le dit, il lui semble bien avoir capté un ou deux bavardages sur ce thème dans la journée. Une jeune femme dans l’ascenseur. Peut-être que si ça avait été l’inconnue en face de lui, tout lui reviendrait plus en détails maintenant. L’héroïsme, ça a tendance à déclencher le fanatisme, quelque chose comme ça « Dommage. Peut-être un jour, on ne sait avec le temps sur quoi on peut tomber. » ok Forrest Gump, ferme cette boîte de chocolats. L’heure n’est pas à la philosophie de vie façon Hollywood. Mais au verre partagé avec une demoiselle qui vient de sauver la soirée et qui la rend même sympathique finalement. Le genre de rencontre qui lui fera peut-être penser qu’il a bien fait de se laisser convaincre par son oncle et que non, il n’est peut-être pas mieux derrière ses bouquins à étudier «... c’est vrai. J’ai manqué de courage, je l’avoue. Je porterai donc sur ma conscience les prochaines morts de l’empailleuse. » et voilà que ça lui trouve même un nom de tueuse en série.
ça persiste. ça rigolera moins en ouvrant le journal un beau jour de juin et en parcourant le palmarès macabre d’une empailleuse.

Allez, arrêtons le macabre, on se détend.
« C’est pas mon genre de me moquer.» mais il y avait de quoi ?
Au sport, il y a de tous les niveaux. L’essentiel, c’est de prendre soin de soi. Et blablabla le discours chiant sur l’importance d’aimer son corps, de lui donner de quoi affronter la vie et gnagna. Dieu merci, il ne lui tape pas son discours de gourou de secte. Non parce que la demoiselle risque de mourir d’ennui ici et maintenant, à cette table, avant même un deuxième verre.  « Vous auriez dû. On serait peut-être sortis dîner ensemble au final et on aurait esquivé le traumatisme sans même en avoir conscience. » génial, maintenant ça critique la rapidité de l’héroïsme.

Qui sait ? Si elle l’avait abordé le genre de discours qu’ils auraient eu. Peut-être qu’ils se seraient détestés. Peut-être qu’il ne l’aurait pas invité et qu’elle n’aurait pas pris la peine du coup de le sauver face à la terrible empailleuse. Au moins maintenant, il avait une chance d’avenir pour construire sa maison d’ici une quarantaine d’années, idée qu’il suggère dans un sourire « D’ici une quarantaine d’années, j’ai bon espoir. j’vous ferai un prix.» sa maison de retraitée quoi. Si elle voulait bien la laisser exister grâce à un type qui lui sortait la réplique de drague la plus vieille du Monde.
Elle ne pense pas. Et il avoue, sur le coup, il ressent une pointe de déception. Parce qu’une partie de lui est persuadé de l’avoir déjà vu quelque part mais où ?
…
Il se fait peut-être des idées. Elle a sans doute raison. Et quand elle prononce son prénom… sa tête se secoue. Parce qu’il ne comprend pas le bon. Joohee, c’est comme ça qu’elle s’appellera jusqu’au matin. Et il se persuade que sa mémoire lui fait défaut… il se laisse porter en précisant, chiant qu’il est, que ce sera le dernier. Evidemment, lui ne se bourre jamais la gueule. Alors quelques minutes plus tard, quand leurs verres sont déjà bien entamés, il suggère « Vous voulez aller faire un tour sur la plage ? » il paiera les consommations dans tous les cas. Mais il n’est pas contre l’idée de se perdre un peu avec cette inconnue qu’il a l’impression de connaître un peu plus « On pourrait peut-être mettre un peu moins les formes non ? On a l’air d’avoir à peu près le même âge.» à un ou deux ans prêt «Je vais avoir 24 ans. »

Ainsi, Seohee aurait dû faire le premier pas dans cette salle de sport. C’est facile à dire, maintenant qu’ils ont été poussés à passer la soirée ensemble à cause de deux individus étranges. Elle ne pouvait pas deviner que le bel homme était disponible pour passer la Saint-Valentin en sa compagnie. De plus, l’étudiante n’est pas habituée à faire le premier pas avec les hommes. Elle se laisse souvent guider alors il devrait être honoré d’avoir le droit à de telles révélations. Elle aurait pu s’abstenir de faire part de sa première impression. Qu’est-ce que ça change si ce n’est dire qu’il est à son goût ? Elle esquisse un sourire. “ J’aurais dû me contenter d’un peut-être ? “ Peut-être qu’il aurait décliné sa proposition de partager un moment privilégié en sa compagnie ? Certes, une activité physique demande beaucoup d’attention mais refuser un rendez-vous avec Yun Seo Hee relève de la folie. Mais en attendant, voilà qu’il a réussi à toucher légèrement sa fierté en employant ces quelques mots.

Alors peut-être qu’il avait décidé de la suivre ce soir, faute de mieux ? Pas habituée à de telles circonstances, la jeune femme ne perd pas pied pour autant. Elle aura le droit à une remise, à un prix d’ami. A ce rythme, Seohee s’approche de la friendzone et devrait peut-être se trouver un nouveau compagnon de fortune pour éviter de se sentir seule, ce soir. Elle esquisse un simple sourire et lui révèle son identité. Elle est trop occupée à réclamer son nouveau verre pour lire la déception sur son visage. Elle a intérêt à le savourer car il sera le dernier de sa liste. Vu les émotions de la soirée, autant faire son maximum pour garder les pieds sur terre… ou sur le sable. En effet, le jeune homme l’invite à aller prendre l’air. “ Oui pourquoi pas ? C’est la première fois que je viens à Jeju en cette période de l’année. “ Elle le regrettera si le vent est beaucoup trop frais. Mais elle compte lui faire confiance et ça ne leur fera pas de mal de marcher un peu, vers les alentours. Avant que l’alcool ne fasse trop effet. “ Sérieux ? Moi aussi, je vais avoir 24 ans. C’est quoi ton mois de naissance ? “ Pour se trouver une compatibilité entre signes astrologiques ? Non, elle n’est pas si désespérée. Elle se dirige vers la sortie du bar et jette un coup d'œil sur la mer plutôt calme. “ Tu veux marcher au bord de l’eau ou on va finir avec une pneumonie ? “ Elle pose sa main sur le haut de sa poitrine et le pousse légèrement d’un air amusé. “ Tu testes pour moi ? Tu me dois bien ça. “ Parce que ça voudrait dire prendre un temps pour retirer ses chaussures.